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Un enchanteur, qui porte un caractère


"Oui, c'est un enchanteur, qui porte un caractère,
Pour ressembler aux maîtres des maisons."
Amphitryon, III, 6, v. 1636-1637

La réplique correspondante de l'Amphitruo de Plaute comportait elle aussi le même terme :

ego pol illum ulciscar hodie Thessalum veneficum,
qui pervorse perturbavit familiae mentem meae.
Je me vengerai aujourd'hui de l'Enchanteur de Thessalie qui a troublé si cruellement l'esprit de toute ma famille.
(trad. Marolles, 1658, p. 64)

Une hypothèse semblable avait été formulée dans le conte "Joconde" (Contes et nouvelles en vers, 1665) de La Fontaine :

D'ailleurs tout l'univers est plein
Des maudits enchanteurs, qui des corps et des âmes,
Font tout ce qu'il leur plaît : savons-nous si ces gens
(Comme ils sont traîtres et méchants
Et toujours ennemis, soit de l'un soit de l'autre)
N'ont point ensorcelé mon épouse et la vôtre ?
(p.30)

L'exemple des "enchanteurs" et des "caractères" avait été utilisé par La Mothe le Vayer pour dénoncer la croyance dans les pouvoirs de la magie :

Sans doute qu'il y en a qui prennent pour enchanteurs tous ceux qui font quelque chose d'extraordinaire, ou qui ont des connaissances dont les autres ne sont pas capables; ce qui sert de beaucoup à en augmenter le nombre.
(p. 362)

Se peut-il faire que, pour avoir lu dans Le Mercure français qu'il fallut assommer quelques soldats impériaux, parce que ni le fer ni le feu ne les pouvait entamer à cause des caractères qu'il portaient, vous ayez été porté à croire une chose si ridicule ?
[...]
Je n'ai rien à dire sur ce que l'Eglise trouve bon. Mais je pense qu'on peut soutenir que, hors de ce qu'opèrent les prières prononcées dans la vraie religion, et jointes aux cérémonies dont elle se sert, toutes les autres paroles ne sont pas capables de produire le moindre des effets qu'on leur attribue. Si ce n'est que vous ne receviez pour des vérités historiques tout ce qui se dit de plus fabuleux.
[...]
De certains philosophes vous fourniront même de quoi rendre ici probables les plus grandes absurdités [...] Albert le Grand vous maintiendra que les paroles et les caractères sont des instruments dont les corps célestes se servent pour faire ce que nous nommons souvent des miracles.
[...]
Ce que je vous puis dire sommairement dans une lettre, c'est que l'imposture ne manque jamais ni d'autorités ni de raisonnements, non plus que la vérité.
(édition des Oeuvres de 1756, VI, 1, p. 356-361)




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