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Analyseur de différences : Festin-82 comparé à Festin-83
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DOM JUAN, LE
OU FESTIN
LE FESTIN DE
PIERRE,
COMEDIE . COMEDIE.
PAR I. Par J. B. P. DE MOLIERE.
Representée pour la premiere fois, le quinziéme Février 1665. sur le Theatre Edition nouvelle et tout differente de la Salle du Palais Royal. celle qui
Par la Trouppe de MONSIEUR a paru jusqu’à present.
Frere Unique du Roy . A AMSTERDAM.
M. DC. LXXXIII.
PERSONNAGES.
DOM JUAN, Fils L’IMPRIMEUR
AU
LECTEUR.
De toutes les pieces qui ont esté publiées sous le nom de Dom Loüis.
SGANARELLE, Valet M. Moliere, aucune ne lui a esté contestée, que le Festin de Dom Pierre. Car bien que l’invention en parût assez de sa façon, on la trouva neantmoins si mal executée, que plutost que de la lui attribuer, on aima mieux la faire passer pour une mechante copie de quelqu’un qui l’avoit veu representer, et qui, en ajoutant des lambeaux à sa faintaisie à ce qu’il en avoit retenu, en avoit formé une piece à sa mode.
Comme on demeuroit d’accord que Moliere avoit fait une piece de Theatre qui portoit ce titre, j’ai fait ce que j’ai pû pour en avoir une bonne copie. Enfin un Amy m’a procuré celle que je donne ici, et bien que je n’ose pas asseurer positivement qu’elle soit composée par Moliere, au moins paroit elle mieux de sa façon, que l’autre que nous avons vû courir sous son nom jusques à present. J’en laisse le jugement au Lecteur : et me contente de lui donner la piece telle que je l’ai pû avoir.
ACTEURS.
D. JUAN.
D. LOUIS, Pere de D. Juan.
ELVIRE, Femme Maitresse de Dom D. Juan.
GUSMAN, Escuyer d'Elmire.
DOM CARLOS.
D. ALONSE
} Freres d'Elvire.
DOM ALONSE.
DOM LOUIS, Pere de Dom D. Elvire.
D. CARLOS
GUSMAN, Valet de D. Elvire.
SGANARELLE, Valet de D. Juan.
FRANCISQUE, Pauvre.
CHARLOTTE,
} Paysanes.
MATHURINE,
PIERROT, Paysan.
LA STATUE du Commandeur.
LA VIOLETTE,
} Laquais de D. Juan.
RAGOTIN,
MONSIEUR DIMANCHE, Marchand.
Mr. DIMANCHE.
LA RAME'E, Spadassin.
SUITTE RAMEE, Breteur.
PIERROT, Paisan, Amant de Dom Juan.
SUITTE de Dom Carlos, et de Dom Alonse, Freres.
UN SPECTRE.
Charlotte.
CHARLOTTE, Paisane.
MATHURINE, Paisane.
La Scene est en Sicile .
Statue du Commandeur.
Un Spectre.
DOM JUAN,
OU
LE FESTIN DE PIERRE,
COMEDIE .
Un Povre.
ACTE PREMIER. I.
SCENE PREMIERE. PREMIERE
SGANARELLE, GUSMAN.
SGANARELLE
tenant une Tabatiere. SGANARELLE.
Quoy que Quoyque puisse dire Aristote, Aristote et toute la Philosophie, il n'est nest rien d'égale d’egal au Tabac, c'est c’est la passion des honnestes gens ; gens, et qui vit sans Tabac, n'est tabac n’est pas digne de vivre ; vivre ; non seulement il réjoüit, réjouït et purge les cerveaux humains ; humains, mais encore il instruit les ames âmes à la vertu, et l'on les apprend avec luy à devenir demeurer honneste homme. homme ; Ne voyez-vous voyez vous pas bien bien, dés qu'on qu’on en prend, de quelle maniere obligeante on eu en use avec tout le monde, et comme on est ravy d'en donner, ravi d’en donner à droit, droit et à gauche, par tout où l'on l’on se trouve ? trouve ? On n'attend n’attend pas mesme qu'on même qu’on en demande, et l'on l’on court au devant audevant du soûhait souhait des gens : gens, tant il est vray, vray que le Tabac tabac inspire des sentimens d'honneur, d’honneur et de vertu, vertu à tous ceux qui en prennent. prennent : Mais c'est c’est assez de cette matiere, matiere ; reprenons un peu nostre discours. Si bien donc, cher Gusman, Gusman que Done Elvire D. Elvire, ta Masitresse, Maitresse, surprise de nostre départ, s'est depart, s’est mise en Campagne aprés nous ; campagne aprez ; et son cœur, que mon Maistre Maitre a sçeu sceu toucher trop fortement, n'a n’a pû vivre, dis-tu, depuis vivre sans le venir chercher icy ? veux-tu qu'entre nous ;Veux tu qu’entre nous, je te dise m'a pensée ; j'ay ma pensée, j’ay peur qu'elle ne qu’elle soit mal payée de son amour, que son voyage en cette Ville ville produise peu de fruit, et que vous eussiez autant gagné à ne bouger de là.
GUSMAN.
Et la raison encore, dy moy, moy je te pris, prie Sganarelle, qui peut t'inspirer une peur d'un t’inspirer de si mauvais augure ? augure ? ton Maistre t'a-t-il ouvert Maitre t’a-t-il decouvert son cœur là-dessus, et t'a-t-il t’a t-il dit qu'il qu’il eust pour nous quelque froideur qui l'ait l’ait obligé à partir ? partir ?
SGANARELLE. SGANA.
Non pas, mais à veuë de païs, pays je connois à peu prés le train des choses, et sans qu'il m'ait qu’il m’ait encore rien dit dit, je gagerois presque que l'affaire va-là. l’affaire va là. Je pourrois pourois peut-estre me tromper, mais enfin, enfin sur de tels sujets, l'experience m'a pû donner quelques lumieres. sujets l’experience m’a donné quelque lumiere.
GUSMAN.
Quoy, Quoy ! ce départ depart si peu préveu, preveu seroit une infidelité de D. Juan ? Juan ! il pourroit faire cette injure aux chastes feux de D. Elvire ? Elvire !
SGANARELLE. SGANA.
Non, c'est qu'il c’est qu’il est jeune encore, et qu'il n'a trop seur encore qu’il n’a pas le courage.
GUSMAN.
Un homme de sa qualité feroit seroit une action si lâche ? lâche.
SGANARELLE. SGANA.
Eh oüy ; ! ouy, sa qualité ! qualité, la raison en est belle, et c'est cest par là qu'il s'empescheroit qu’il s’empescheroit des choses.
GUSMAN.
Mais les saints saincts nœuds du mariage le tiennent engagé.
SGANARELLE. SGANA.
Eh ! Eh ! mon pauvre Gusman, mon amy, tu ne sçais pas encore, croy moy, quel homme est c’est D. Juan.
GUSMAN.
Je ne sçay pas de vray quel homme il peut estre, s'il s’il faut qu'il qu’il nous ait fait cette perfidie ; perfidie, et je ne comprends point, comprens point comme aprés tant d'amour, et tant d'impatience témoignée, après tant d'hommages pressants, d’hommages pressans, de vœux, de soûpirs, soupirs, et de larmes ; larmes, tant de lettres passionnées, de protestations ardentes, ardantes et de sermens reïterez ; reïterés, tant de transports, transports enfin, et tant d'emportemens qu'il d’emportemens qu’il a fait paroître, jusqu'à paroistre, jusques à forcer dans sa passion l'obstacle l’obstacle sacré d'un Convent, d’un Convent pour mettre D. Elvire en sa puissance ; puissance, je ne comprends comprens pas, dis-je, comme aprés après tout cela il auroit le cœur de pouvoir manquer à sa parole.
SGANARELLE. SGANA.
Je n'ay n’ay pas grande peine à le comprendre moy, et si tu connoissois le pelerin, tu trouverois la chose assez facile pour luy. Je luy ; je ne dis pas qu'il qu’il ait changé de sentimens pour D. Elvire, je n'en n’en ay point de certitude encore ; encore ; tu sçais que par son ordre je partis avant luy, et depuis son arrivée arrivée, il ne m'a m’a point entretenu, entretenu ; mais par precaution, precaution je t'apprens ( t’apprens inter nos ) , que tu vois en D. Juan mon Maistre, Maitre le plus grand scelerat que la terre ait jamais porté, un enragé, enrage, un chien, un Demon, Diable, un Turc, un Heretique, heretique, qui ne croit, croit ny Ciel, Ciel ny Enfer, Sainct, ny Diable, Dieu, ny loup garou, qui passe cette vie en veritable beste-brute, un beste brute, en pourceau d'Epicure, un d’Epicure, en vray Sardanapale, qui ferme l'oreille l’oreille à toutes les remontrances qu'on Chrestiennes qu’on luy peut faire, et traite de billevezées belles visées tout ce que nous croyons. Tu croyons ; tu me dis qu'il qu’il a épousé ta Maîtresse, Maitresse, croy qu'il qu’il auroit plus fait pour contenter sa passion, et qu'avec qu’avec elle il auroit encore épousé toy, son chien, toy,son chien et son chat. Un Mariage chat ; un mariage ne luy coûte coute rien à contracter, il ne se sert point d'autres pieges d’autre piege pour attraper les belles, et c'est c’est un épouseur à toutes mains, Dame, Demoiselle, Damoiselle, Bourgeoise, Païsane, il Païsane ; Il ne trouve rien de trop chaud, chaud ny de trop froid pour luy ; luy, et si je te disois le nom de toutes celles qu'il qu’il a épousées espousées en divers lieux, ce seroit un chapitre à durer jusques au soir. Tu soir ; tu demeures surpris, surpris et changes de couleur à ce discours ; discours ; ce n'est-là qu'une n’est là qu’une ébauche du personnage, personnage ; et pour en achever le portrait, il faudroit bien d'autres d’autres coups de pinceau, suffit qu'il pinceau ; Suffit qu’il faut que le courroux du Ciel l'accable l’accable quelque jour : qu'il jour, qu’il me faudroit vaudroit bien mieux d'estre d’estre au diable, que d'estre à Diable qu’à luy, et qu'il qu’il me fait voir veoir tant d'horreurs, d’horreurs que je souhaiterois qu'il qu’il fust déja déjà je ne sçay où ; mais un grand Seigneur méchant homme est où. C’est une terrible chose ; chose terrible, il faut que je luy sois fidele fdelle en dépit depit que j'en aye, j’en aye ; la crainte en moy fait l'office l’office du zele, bride mes sentimens, sentimens et me reduit d'applaudir à la complaisance d’aplaudir bien souvent à ce que mon ame déteste. Le voila deteste ; le voyla qui vient se promener promerner dans ce Palais, separons-nous ; separons nous ; écoute, au moins, aumoins je t'ay fait cette te fais confidence avec grande franchise, et cela m'est sorty m’est sorti un peu bien viste de la bouche ; bouche ; mais s'il faloit qu'il en vinst s’il falloit qu’il enviast quelque chose à ses oreilles, je dirois hautement que tu aurois menty. menti.
SCENE II.
D. DON JUAN, SGANARELLE.
D. JUAN.
Quel homme te parloit-là, parloit-là ? il a bien de l'air l’air, ce me semble semble, du bon Gusman de D. Elvire ? Elvire.
SGANARELLE. SGANA.
C'est C’est quelque chose aussi à peu prés de comme cela.
D. JUAN.
Quoy, c'est luy ? c’est luy !
SGANARELLE. SGANA.
Luy-mesme.
D. JUAN.
Et depuis quand est-il en cette Ville ?
SGANARELLE.
D'hier au soir.
D. JUAN.
Et quel sujet l'ameine ?
SGANARELLE.
Je croy que vous juger assez ce qui le peut inquieter.
D. JUAN.
Nostre départ, depart sans doute ? doute.
SGANARELLE. SGANA.
Le bon homme en est tout mortifié, et m'en m’en demandoit le sujet. sujet
D. JUAN.
Et quelle réponse Réponce as-tu faite ? faite ?
SGANARELLE. SGANA.
Que vous ne m'en m’en aviez rien dit.
D. JUAN.
Mais encore, quelle est ta pensée là-dessus, que timagines-tu t’imagines-tu de cette affaire ? affaire ?
SGANARELLE. SGANA.
Moy, Moy ? je croy crois, sans vous faire tort, que vous avez quelque nouvel amour en teste.
D. JUAN.
Tu le crois ? crois ?
SGANARELLE. SGANA.
Oüy. Ouy.
D. JUAN.
Ma foy, foy tu ne te trompes pas, et je dois t'avoüer qu'un l’avouer qu’un autre objet a chassé Elvire D. Elvire, de ma pensée.
SGANARELLE. SGANA.
Eh, Eh mon Dieu, Dieu ! je sçay, sçay mon Dom Juan, D. Juan sur le bout du doigt, et connois vostre cœur pour le plus grand coureur du monde, monde ; il se plaist plait à se promener de liens lieux en liens, lieux, et n'aime guere n’ayme point à demeurer en place.
D. JUAN.
Et tu ne trouves pas, dy moy, trouves-tu pas que j'ay j’ay raison d'en d’en user de la sorte ? sorte ?
SGANARELLE. SGANA.
Eh, Eh Monsieur.
D. JUAN.
Quoy, parle ? Quoy ? parle.
SGANARELLE. SGANA.
Assurement Asseurement que vous avez raison, si vous le voulez, on voulez. On ne peut pas aller là contre ; contre ; mais si vous ne le vouliez pas, ce seroit peut-estre une autre affaire.
D. JUAN.
Et bien bien, je te donne la liberté de parler, et de me dire tes sentimens.
SGANARELLE. SGANA.
En ce cas, Monsieur, je vous diray franchement que je n'approuve n’approuve point vostre methode, et que je trouve fort vilain d'aimer d’aymer de tous costez costés comme vous faites.
D. JUAN.
Quoy ? Quoy ? tu veux qu'on qu’on se lie à demeurer au premier objet qui nous prend, qu'on qu’on renonce au monde pour luy, et qu'on n'ait qu’on n’ait plus d'yeux d’yeux pour personne ? La personne ; la belle chose de vouloir se picquer d'un piquer d’un faux honneur d'estre honneur, d’estre fidelle, de s'ensevelir s’ensevelir pour toûjours toujours dans une passion, et d'estre d’estre mort dés sa jeunesse, à jeunesse pour toutes les autres beautez beautés qui nous peuvent frapper les yeux : non, yeux ; non non, la constance n'est n’est bonne que pour des ridicules, ridicules : toutes les belles ont droit de nous charmer, et l'avantage d'estre l’avantage d’estre rencontrée la premiere, ne doit point dérober derober aux autres les justes pretentions qu'elles qu’elles ont toutes sur nos cœurs. Pour cœurs ; pour moy, la beauté me ravit par tout, tout où je la trouve, et je cede facilement à cette douce violence, dont violence où elle nous entraisne ; j'ay entraîne ; J’ay beau estre engagé, l'amour l’amour que j'ay j’ay pour une belle, n'engage belle n’engage point mon ame à faire une injustice aux autres ; je autres ; Je conserve des yeux pour voir veoir le merite de toutes, et je rends à chacune les hommages, hommages et les tributs où la nature nous oblige. Quoy qu'il oblige ; quoy qu’il en soit, soit je ne puis refuser mon cœur à tout ce que je voy d'aimable, d’aymable, et dés qu'un qu’un beau visage me le demande, si j'en j’en avois dix mille, je les donnerois tous. Les tous : les inclinations naissantes aprés tout, après tout ont des charmes inexplicables, et tout le plaisir de l'amour l’amour est dans le changement. On goûte changement : on gouste une douceur extrême extreme à reduire reduire, par cent hommages hommages, le cœur d'une d’une jeune beauté, à voir veoir de jour en jour, jour les petits progrés qu'on y fait ; qu’on fait, à combatre combattre par des transports, par des larmes, larmes et des soûpirs, l'innocente soupirs, l’innocente pudeur d'une ame, d’une ame qui a peine à rendre les armes, à forcer pied à pied, pied toutes les petites resistances qu'elle qu’elle nous oppose, à vaincre ses scrupules, les scrupules dont elle se fait un honneur, et à la mener doucement, douvement où nous avons envie de la faire venir. Mais lors qu'on en est maître venir ; mais lorsque on estmaistre une fois, il n'y n’y a plus rien à dire, dire ny rien à soûhaiter, souhaitter, tout le beau de la passion est finy, finie, et nous nous endormons dans la tranquilité d'un tranquillité d’un tel amour ; amour, si quelque objet nouveau ne vient réveiller reveiller nos desirs, et presenter à nostre cœur les charmes attrayants d'une attrayans d’une conqueste à faire. Enfin, faire, ; enfin il n'est n’est rien de si doux, doux que de triompher de la resistance d'une d’une belle personne ; personne, et j'ay j’ay sur ce sujet l'ambition l’ambition des Conquerants, conquerants qui volent perpetuellement de victoire en victoire, et qui ne peuvent point se resoudre à borner leurs soûhaits. Il n'est souhaits ; il n’est rien qui puisse arrester l'impetuosité l’impetuosité de mes desirs, et je me sens un cœur porté à aimer aymer toute la terre ; terre, et comme Alexandre, Alexandre je soûhaiterois qu'il souhaitterois qu’il y eûst d'autres mondes, eust d’autres mondes pour y pouvoir étendre estendre mes conquestes amoureuses.
SGANARELLE. SGANA.
Vertu de ma vie, comme vous debitez : debitez ; il semble que vous ayez appris cela par cœur, coeur cela, et vous parlez tout comme un Livre. Sire.
D. JUAN.
Qu'as-tu Qu’as tu à dire là-dessus.
SGANARELLE. SGANA.
Ma foy, j'ay j’ay à dire, et je ne sçay que dire ; dire, car vous tournez les choses d'une maniere, qu'il d’une maniere qu’il semble que vous avez ayez raison, et cependant il est vray que vous ne l'avez pas. J'avois l’avez pas ; j’avois les plus belles pensées du monde, et vos discours m'ont m’ont broüillé tout cela ; cela : laissez faire, une autre fois je mettray mes raisonnemens raisonnement par écrit, pour disputer avec vous.
D. JUAN.
Tu feras bien.
SGANARELLE. SGANA.
Mais, Mais Monsieur, cela seroit-il seroit il de la permission que vous m'avez m’avés donnée, si je vous disois que je suis tant soit peu scandalisé scandalizé de la vie que vous menez ? menés ?
D. JUAN.
Comment, Comment ? quelle vie est-ce que je meine ? mene ?
SGANARELLE. SGANA.
Fort bonne. Mais bonne, mais par exemple de je vous voir vois tous les mois vous marier comme vous faites.
D. JUAN.
Y a-t'il a-t-il rien de plus agreable ? agreable ?
SGANARELLE. SGANA.
Il est vray, je conçois que cela est fort agreable, agreable et fort divertissant, et je m'en m’en accommoderois assez assés moy, s'il n'y avait s’il n’y avoit point de mal, mais, Monsieur, mal ; mais Monsieur se jouër ainsi d'un Mystere sacré, jouer ainsy d’un mistere sacré et...
D. JUAN.
Va, va, c'est un c’est une affaire entre le Ciel et moy, et nous la démeslerons demelerons bien ensemble, sans que tu t'en t’en mettes en peine.
SGANARELLE. SGANA.
Ma foy, foy Monsieur, j'ay toûjours oüy dire, j’ay toujours ouï dire que c'est c’est une méchante raillerie, meschante raillerie que de se railler du Ciel, et que les libertins ne font jamais une bonne fin.
D. JUAN.
Hola, Hola maistre sot, vous sçavez que je vous ay ait dit que je n'ayme n’ayme pas les faiseurs de remontrances. remonstrances.
SGANARELLE. SGANA.
Je ne parle pas aussi aussy à vous, Dieu m'en m’en garde, vous sçavez ce que vous faites vous, faites, et su si vous ne croyez rien, rien vous avez vos raisons ; mais raisons : il y a de certains petits impertinents impertinens dans le monde, qui sont libertins, libertins sans savoir sçavoir pourquoy, qui font les esprits forts, parce qu'ils forts parcequ’ils croyent que cela leur sied bien ; bien, et si j'avois j’avois un Maistre maistre comme cela, je luy dirois fort nettement nettement, le regardant en face : osez-vous face, ozés vous bien ainsi ainsy vous joüer au jouer du Ciel, et ne tremblez vous point de vous mocquer moquer comme vous faites des choses les plus saintes ? C'est saintes ; c’est bien à vous petit vers ver de terre, petit mirmidon que vous estes, estes (je parle au Maistre maistre que j'ay dit,) c'est j’ay dit) c’est bien à vous à vouloir vous mesler de tourner en raillerie, raillerie ce que tous les hommes reverent. Pensez-vous reverent ; pensés vous que pour estre de qualité, pour avoir une perruque blonde, blonde et bien frisée, des plumes à vostre chapeau, un habit bien doré, et des rubans couleur de feu, feu (ce n'est n’est pas à vous que je parle, c'est c’est à l'autre ;) pensez-vous, dis-je, lautre) pensés vous dis-je que vous en soyez plus habile homme, que tout vous soit permis, permis et qu'on n'ose qu’on n’oze vous dire vos veritez ? Apprenez verités ? apprenez de moy qui suit suis vostre Valet, que le Ciel punit tost , ou tard les Impies, qu'une valet, qu’une méchante vie ameine amene une méchante mort, mort et que... que.....
D. JUAN.
Paix.
SGANARELLE. SGANA.
De quoy est-il question ? est il question ?
D. JUAN.
Il est question de te dire qu'une qu’une jeune beauté me tient au cœur , coeur, et qu'entraisné qui entraine par ses appas, je l'ay l’ay suivie jusques en dans cette Ville.
SGANARELLE. SGANA.
Et n'y n’y craignez vous rien, Monsieur, de la mort de ce Commandeur, Commandeur que vous tuastes tuates il y a six mois. mois ?
D. JUAN.
Et pourquoy craindre, craindre ? ne l'ay-je l’ay-je pas bien tué ? tué.
SGANARELLE. SGANA.
Fort bien, le mieux du monde, et il auroit tort de se s’en plaindre.
D. JUAN.
J'ay J’ay eu ma grace en de cette affaire.
SGANARELLE. SGANA.
Oüy, Ouy, mais cette grace, n'esteint grace n’esteint pas peut-estre le ressentiment des Parents, parents et des amis, et... amis et....
D. JUAN.
Ah ! n'allons Ah, n’allons point songer au mal qui nous peut arriver, et songeons seulement à ce qui nous peut nous donner du plaisir. La plaisir : la personne dont je te parle, parle est une jeune Fiancée, fiancée, la plus agreable du monde, qui a esté conduite icy par celuy-mesme qu'elle celuy mesme qu’elle y vient épouser ; espouser, et le hazard me fit voir ce m’a fait veoir le couple d'Amans, d’amans trois ou quatre jours, jours avant leur voyage. Jamais je n'ay n’ay veu deux personnes estre si contents l'un contens l’un de l'autre, l’autre, et faire éclater plus d'amour. La d’amour : la tendresse visible de leurs mutuelles ardeurs me donna de l'émotion ; j'en l’emotion, j’en fus frappé frapé au cœur, et mon amour commença par la jalousie. Oüy, jalousie ; ouy je ne pus souffrir d'abord d’abord de les voir veoir si bien ensemble, ensemble ; le dépit allarma depit alluma mes desirs, et je me figuray un plaisir extrême, extreme à pouvoir troubler leur intelligence, et rompre cet cette attachement, dont la délicatesse delicatesse de mon cœur se tenoit offencée ; offencé ; mais jusques icy jusqu’icy tous mes efforts ont esté inutiles, et j'ay j’ay recours au dernier remede. Cet époux prétendu remede ; cet Epoux pretendu doit aujourd'huy aujourd’huy regaler sa Maistresse d'une Maitresse d’une promenade sur Mer, mer, sans t'en avoir rien dit, toutes choses sont preparées preprarées pour satisfaire mon amour, et j'ay j’ay une petite Barque, barque et des gens, avec quoy fort facilement je pretends pretens enlever la Belle. belle.
SGANARELLE. SGANA.
Ha ! Monsieur... Ah Monsieur !
D. JUAN.
Hen ? Hen.
SGANARELLE. SGANA.
C'est C’est fort bien fait à vous, et vous le prenez comme il faut, il n'est n’est rien tel en ce monde, monde que de se contenter.
D. JUAN.
Prepare toy donc à venir avec moy, et prend prens soin de toy-mesme d'apporter d’apporter toutes mes armes, armes afin que... Ah ! que..... Ah rencontre fâcheuse, fâcheuse ! traistre tu ne m'avois m’avois pas dit qu'elle qu’elle estoit icy elle mesme. elle-mesme.
SGANARELLE. SGANA.
Monsieur, Monsieur vous ne me l'avez l’aviés pas demandé.
D. JUAN.
Est-elle Est elle folle de n'avoir n’avoir pas changé d'habit, d’habit, et de venir en dans ce lieu-cy, lieu-cy avec son équipage equipage de Campagne ? Campagne ?
SCENE III.
D. ELVIRE, D. JUAN, SGANARELLE. SGAN.
D. ELVIRE.
Me ferez-vous feriez vous la grace, D. Juan, de vouloir bien me reconnoistre, et puis-je puis je au moins esperer, esperer que vous daigniez daigniés tourner le visage de ce costé ? costé ?
D. JUAN.
Madame, Madame je vous avouë que je suis surpris, et que je ne vous attendois attandois pas icy.
D. ELVIRE.
Oüy, Ouy, je voy vois bien que vous ne m'y attendiez m’attandiez pas, et vous estes surpris à la verité, mais tout autrement que je ne l'esperois, l’esperois, et la maniere dont vous le paroissez, paroissez me persuade pleinement ce que je refusois de croire. J'admire croire ; j’admire ma simplicité, et la foiblesse de mon cœur, à douter d'une trahison, d’une trahison que tant d'apparences d’apparences me confirmoient. J'ay confirmoient : j’ay esté assez assés bonne, je le confesse, ou plutost assez sotte, assés sotte pour vouloir me vouloir tromper moy-mesme, et travailler à démentir mes yeux, yeux et mon jugement. J'ay J’ay cherché des raisons, raisons pour excuser à ma tendresse, tendresse le relâchement d'amitié qu'elle relachement d’amitié qu’elle voyoit en vous ; vous, et je me suis forgé exprés cent sujets legitimes d'un départ d’un depart si precipité, pour vous justifier du crime, dont ma raison vous accusoit. Mes justes soupçons chaque jour soupçons, châque jour, avoient beau me parler, j'en j’en rejettois la voix, voix qui vous rendoit criminel à mes yeux, et j'écoutois j’ecoutois avec plaisir mille chimeres ridicules, ridicules qui vous peignoient innocent à mon cœur ; cœur ; mais enfin, enfin cet abord ne me permet plus de douter, et le coup d'œil d’œil qui m'a receuë, m'apprend m’a receuë m’apprend bien plus de choses, choses que je ne voudrois en sçavoir. sçavoir : Je seray bien aise bienaise pourtant d'oüir d’ouïr de vostre bouche les raisons Raisons de vostre départ. Parlés, depart. Parlés D. Juan, Juan je vous prie ; prie, et voyons de quel air vous sçaurez sçavez vous justifier.
D. JUAN.
Madame, voilà Sganarelle, voyla Sganarelle qui sçait pourquoy je suis party.
SGANARELLE. SGANA.
Moy, Ouy Monsieur, je n'en ne sçay rien, s'il rien s’il vous plaist. plait.
D. ELVIRE.
Hé bien, Et bien Sganarelle, parlez, parlés, il n'importe n’importe de quelle bouche j'entende j’entende ces raisons.
D. JUAN
faisant signe d'approcher à Sganarelle. JUAN.
Allons, parle donc à Madame.
SGANARELLE. SGANA.
Que voulez-vous voulez vous que je dise ? dise ;
D. ELVIRE.
Approchez, puisqu'on puis qu’on le veut ainsi, ainsy, et me dites un peu les causes d'un départ de ce depart si prompt.
D. JUAN.
Tu ne répondras pas ? repondras pas ?
SGANARELLE. SGANA.
Je n'ay rien à répondre, vous vous mocquez de vostre Serviteur. Madame.
D. JUAN. ELVIRE.
Veux-tu répondre, te dis-je ? Quoy.
SGANARELLE. SGANA.
Madame... Monsieur.
D. ELVIRE.
Quoy ?
SGANARELLE
se retournant vers son Maistre.
Monsieur...
D. JUAN.
Si... Si....
SGANARELLE. SGANA.
Madame, les Conquerants, le conquerans, Alexandre, et les autres Mondes, mondes, sont causes de nostre départ ; voilà depart : voyla Monsieur tout ce que je puis dire.
D. ELVIRE.
Vous plaist-il, plait-il, D. Juan, nous éclaircir ces beaux mysteres ? misteres.
D. JUAN.
Madame, à vous dire la verité.
D. ELVIRE.
Ah, que vous sçavez mal vous défendre deffendre, pour un homme de Cour, Cour et qui doit estre accoûtumé accoutumé à ces sortes de choses ! J'ay choses, j’ay pitié de vous voir dans la confusion que vous avez. Que ne avez ; que vous armez vous armez-vous le front d'une d’une noble effronterie ? effronterie ? que ne me jugez-vous jurez vous que vous estes toûjours toujours dans les mesmes sentimens pour moy, que vous m'aimez toûjours m’aymez toujours avec une ardeur sans égale, et que rien n'est n’est capable de vous détacher detacher de moy que la mort ! mort ? que ne me dites-vous dites vous que des affaires de la derniere consequence vous ont obligé à partir sans m'en m’en donner avis, qu'il qu’il faut que malgré vous vous demeuriez icy quelque temps, et que je n’ay qu’à me retourner d’où je viens, asseurée que vous suivrez suivez mes pas le plûtost qu'il plutost qu’il vous sera possible : Qu'il possible, puisque il est tres certain que vous brûlez brulés de me rejoindre, et qu'éloigné qu’esloigné de moy, moy vous souffrez soufrez ce que souffre soufre un corps qui est separé de son ame. Voila ame ; voyla comme il faut vous défendre, defendre, et non pas estre interdit comme vous estes.
D. JUAN.
Je vous avoüe, Madame, que je n'ay n’ay point le talent de dissimuler, et que je porte un cœur sincere. Je sincere, je ne vous diray point que je suis toûjours toujours dans les mesmes sentimens pour vous, et que je brûle brusle de vous rejoindre, puis qu'enfin puisqu’enfin il est assuré asseuré que je ne suis party que pour vous fuir ; fuir, non point par pour les raisons que vous pouvez vous figurer, mais par un pur pu motif de conscience, et pour ne croire pas qu'avec qu’avec vous davantage je puisse vivre sans peché. Il m'est peché ; il m’est venu des scrupules, scrupules Madame, et j'ay j’ay ouvert les yeux de l'ame l’ame sur ce que je faisois. J'ay faisois, j’ay fait reflexion que pour vous épouser, espouser je vous ay dérobée à la closture d'un Convent, d’un convent, que vous avez avés rompu des vœux, vœux qui vous engageoient autre part, et que le Ciel est fort jaloux de ces sortes de choses. Le repentir m'a m’a pris, et j'ay j’ay craint le couroux celeste. J'ay courroux celeste ; j’ay cru que nostre mariage n'estoit qu'un n’estoit qu’un adultere déguisé, qu'il deguisé, qu’il nous attireroit arriveroi quelque disgrace d'enhaut, d’en haut, et qu'enfin qu’enfin je devois tascher devais tâcher de vous oublier, et vous donner moyen de retourner à vos premieres chaisnes. Voudriez-vous, Madame, chaînes ; voudriez vous Madame vous opposer à une si sainte pensée, pensée ; et que j'allasse, j’allasse, en vous retenant retenant, me mettre le Ciel sur les bras, bras ? que par.... pour.....
D. ELVIRE.
Ah ! Ah scelerat, c'est c’est maintenant que je te connois tout entier, et pour mon malheur, malheur je te connois lors qu'il n'en qu’il n’en est plus temps, et qu'une qu’une telle connoissance connaissance ne peut plus me servir qu'à qu’à me desesperer ; desesperer ; mais sçache que ton crime ne demeurera pas impuny ; impuni, et que le mesme Ciel dont tu te joües, joue, me sçaura vanger de ta perfidie.
D. JUAN.
Sganarelle, le Ciel.
SGANA.
Vrayment ouy, nous nous moquons bien de cela nous autres.
D. JUAN.
Madame.
D. ELVIRE.
Il suffit, je n'en n’en veux pas oüir ouïr davantage, et je m'accuse mesme d'en m’accuse moy-mesme d’en avoir trop entendu. C'est entendu, c’est une lâcheté que de se faire expliquer trop se honte ; sa honte, et sur de tels sujets, un noble cœur cœur, au premier mot mot, doit prendre son party. N'attends party ; n’attends pas que j'éclate j’esclate icy en reproches reproche et en injures, non, non, je n'ay n’ay point un couroux courroux à exhaler en paroles vaines, une parole vaine, et toute sa chaleur se reserve pour sa vengeance. Je ma vengeance ; je te le dis encore, le Ciel te punira, perfide, de l'outrage l’outrage que tu me fais, et si le Ciel n'a n’a rien que tu puisses apprehender, apprehende du au moins la colere d'une Femme d’une femme offencée.
SGANARELLE. SGANA.
Si le remords le pouvoit prendre.
D. JUAN
aprés une petite reflexion. JUAN.
Allons songer à l'exécution l’execution de nostre entreprise amoureuse.
SGANARELLE. SGANA.
Ah, Ah ! quel abominable Maître Maistre me vois-je obligé de servir ! servir.
ACTE II. SECOND.
SCENE PREMIERE. I.
CHARLOTTE, PIERROT.
CHARLOTE. CHARLOTTE.
Nostre-dinse, Piarrot, Nostre dinje, Pierrot, tu t'es trouvé-là t’is trouvé là bien à point.
PIERROT.
Parquienne, Porquisenne, il ne s'en s’en est pas falu l'époisseur d'une éplinque, qu'ils fallu l’espoisseur d’un espingle qu’ils ne se sayant nayez tous deux. s’ayant noyez tou deu.
CHARLOTE. CHARL.
C'est C’est donc le coup de vent da matin d’amatin qui les avoit ranvarsez dans la mar. renversez.
PIERROT.
Aga guien, Charlote, Aga, quien, Charlotte, je m'en m’en vas te conter tout fin drait dray comme cela est venu : car, venu ça, comme dit l'autre, l’autre, je les ay le premier avisez, avisez le premier je les ay. Enfin donc, j'estions ay ; enfin donc jesquions sur le bord de la mar, moy mo et le gros Lucas, et je nous amusions à batifoler avec avé des mottes motes de tarre tarre, que je nous jesquions à la teste : teste ; car comme tu sçai sçais bian, le gros Lucas aime ayme à batifoler, et moy par fouas per fois je batifole itou. En batifolant i tou ; en batifolans donc, pisque batifoler y a, j'ay apparceu j’ay aperceu de tout loin queuque chose qui groüilloit grouilloit dans gliau, glieau, et qui venoit comme envars nou par secousse. Je nous per secousse, je voyois cela fixiblement, ça fisiblement, et pis tout d'un d’un coup je voyois que je ne voyois plus rien. Eh, Lucas, çay-je rien ; eh Lucas ! ç’ay je fait, je pense que ula vla des hommes qui nageant là-bas. Voire, là-bas ; voire ce ma til m’a-t-il fait, t'as t’as esté au trépassement d'un trepassement d’un chat, tas t’as la veuë trouble. Pal sanquienne, çay trouble ; pal sanguiene, ç’ay je fait, je n'ay n’ay point la veuë trouble, ce sont des hommes. Point hommes ; point du tout, tout ce ma til m’a-t-il fait, t'as t’as la barluë. Veux barluë ; veux tu gager, çay ç’ay je fait, que je nay point la n’ay pointla barluë, cay ç’ay je fait, et que ce sont deux des hommes, çay ç’ay je fait, fait qui nageant droit drai icy, çay ç’ay je fait. Morquenne, fait ; morguenne ce ma til m’a-t-il fait, je gage que non, non ; o ça, çay ça ç’ay je fait, veux tu gager dix sols que si ? Je le sy ? je veux bian, ce ma til m’a-t-il fait, et pour te montrer, ula monstrer, vlà argent su ser jeu, ce ma til fait. Moy, m’a-t-il fait ; moy je n'ay point n’ay esté ny fou, fou ny estourdy, j'ay j’ay bravement bouté à tarre quatre pieces tapées, tapées et cinq sols en doubles, jergniguenne double, j’erniguenne, aussi hardiment que si j'avois j’avois avalé un varre vare de vin : vin, car je ses si hazardeux moy, et je vas à la debandade. Je débandade ; je sçavois bian ce que je faisois pourtant, queuque gniais ! Enfin donc, gniais : enfin don je n'avons n’avois pas putost eü gagé plustost eu gagé, que javon j’avons veu les deux hommes tout tous à plain plein, qui nous faisiant faisians signe de les aller querir, et moy de tirer d’hier auparavant les enjeux. Allons, enjeux, allons Lucas, çay je ç’ay-je dit, tu vois bian qu'ils qu’ils nous appellont : appellent, allons viste à leu secours. Non, leur secours ; non ce ma til m’a-t-il dit, ils mont m’ont fait pardre. O donc pardre ; o dont tanquia, qua qu’à la par fin parfin, pour le faire court, je l'ay l’ay tant sarmonné, sarmonné que je vous nous sommes boutez boutés dans une barque, et pis j'avons j’avons tant fait cahin, fait, cahin caha, que je les avons tirez tiré de gliau, et pis je les avons menez cheux nous mené cheu nous, auprés du feu, et pis ils se sant depoüillez sont dépouillez tous nuds nus pour se secher, et pis il y en est venu encor venu deux de la mesme bande bande, qui sequiant sauvez saguiant sauvés tout seul, et pis Maturine Mathurine est arrivée là là, à qui l'en l’on a fait les doux yeux, ula justement, Charlote, yeux ; vla justement Charlotte comme tout ça s'est s’est fait.
CHARLOTE. CHARL.
Ne m'as-tu m’as tu pas dit, Piarrot, qu'il qu’il y en a un qu'est bien pû qui est bian pu mieux fait que les autres.
PIERROT. PIARROT.
Oüy, c'est Ouy, c’est le Maître, Maistre, il faut que ce soit queuque gros gros Monsieur, car il a du dor à son habit tout de pis le haut jusqu'en depis l’haut jusque en bas, et ceux qui le servont sarvant sont des Monsieux eux-mesme, Monsieurs eux-mesmes, et stapandant, Stan pandant, tout gros Monsieur qu'il qu’il est, il seroit par per ma fique nayé fegue nayé, si je n'aviomme esté là. n’avions esté-là.
CHARLOTE. CHARL.
Ardez Ardés un peu.
PIERROT PIARROT.
O Parquenne, pat guenne, sans nous, il en avoit pour sa maine de féves. feves.
CHARLOTE. CHARL.
Est-il Est il encore cheux cheu toy tout nu, Piarrot. Piarrot ?
PIERROT.
Nannain, PIARROT.
Nanain, ils l'avont r'habillé l’avont rhabillé tout devant nous. Mon quieu, nous ; monquieu je n'en n’en avois jamais veu s'habiller, s’habiller ; que d'histoires d’histoires et dangigorniaux d’angingorniaux boutont ces Messieus-là Monsieurs-là les Courtisans, courtisans, je me pardrois là dedans pour moy, et j'estois j’estois tout ebobi ebody de voir ça. Quien, Charlote, ça ; quien Charlotte, ils avont des cheveux qui ne tenont point à leu teste, et il bouton ils boutont ça aprés tout comme un gros bonnet de filace. Ils filace, ils ant des chemises chemines qui ant des manches où j'entrerions ou j’entrerois tout brandis toy et moy. En moy ; en glieu d'haut d’haut de chausse, chausse ils portont un garderobe aussi aussy large que d'icy d’icy à Pasque, pasque ; en glieu de pourpoint de petites brassieres, que brasieres qui ne leu leur venont pas usqu'au jusqu’au brichet, et en glieu de rabas rabat un grand mouchoir de cou à reziau aveuc avec quatre grosses houpes de linge qui leu pendont sur l'estomaque. Ils ser l’estoumaque ; ils avont itou d'autres petits rabats ytou d’autres petis rabat au bout des bras, et de grands entonnois antonoirs de passement aux au jambes, et parmy tout ça tant de rubans, ribans, tant de rubans, ribans, que c'est c’est une vraye piquié. Ignia piquié ; ignia pas jusqu'au soulier jusqu’au souliez qui n'en soiont farcis n’en soyont farcy tout de pis depis un bout jusqu'à l'autre, jusqu’à lautre, et ils sont faits d'eune d’une façon que je me romprois romperois le cou aveuc. au cul.
CHARLOTE. CHARL.
Par ma fy, Perma si, Piarrot, il faut que j'aille voir un j’aille veor en peu ça.
PIERROT. PIARROT.
O O, acoute un peu auparavant, Charlote, j'ay auparavant Charlotte, j’ay queuque autre chose à te dire, dire moy.
CHARLOTE. CHARL.
Et bian, dy, qu'est-ce qu’est que c'est. c’est ?
PIERROT. PIARROT.
Vois-tu, Charlote, Vois tu, Charlotte, il faut, faut comme dit l'autre, l’autre que je débonde debonde mon cœur. Je taime, cœur, je t’ayme, tu le sçais bian, et je somme sommes pour estre mariez mariés ensemble, mais marquenne, mais, morguenne, je ne suis point satisfait de toy.
CHARLOTE. CHARL.
Quement ? qu'est-ce Quemant ? qu’est-ce que c'est c’est donc qu'il glia ? qu’il y glia ?
PIERROT. PIARROT.
Iglia Il y glia, que tu me chagraignes l'esprit chagraines l’esprit franchement.
CHARLOTE. CHARL.
Et quement donc ? quemant donc ?
PIERROT. PIARROT.
Testiguienne, Teste quienne, tu ne maimes m’ayme point.
CHARLOTE. CHARL.
Ah Ah, ah, n'est-que ça ? n’est ce que ça ?
PIERROT. PIARROT.
Oüy, Ouy ce n'est n’est que ça, et c'est c’est bian assez. assés.
CHARLOTE. CHARL.
Mon quieu, Monguieu, Piarrot, tu me viens toujou dire la mesme chose.
PIERROT. PIARROT.
Je te dis toujou la mesme chose, parce que c'est parceque c’est toujou la mesme chose, et si ce n'estoit n’estoit pas toujou la mesme chose, je ne te dirois pas toujou la mesme chose.
CHARLOTE. CHARL.
Mais, qu'est-ce qu'il Mais qu’est-ce qu’il te faut ? faut ? que veux-tu ? veux tu ?
PIERROT. PIARROT.
Jerniquenne, Jerniguienne je veux que tu m'aimes. m’aymes.
CHARLOTE. CHARL.
Est-ce Est ce que je ne taime pas ? t’ayme pas ?
PIERROT. PIARROT.
Non, Non tu ne maimes m’ayme pas, et si je fais tout ce que je pis pour ça. Je tachete ça, je t’ajette sans reproche des rubans à tout les Marciers tous ces marciers qui passont, je me romps le cou à taller t’aller denicher des marles, je fais joüer jouer pour toy les Vielleux vielloux quand ce vient ta feste, et tout ça comme si je me frapois la teste contre un mur. Vois-tu, ça ny mur ; vois-tu, ç’a n’est ni biau ny honneste honeste de naimer n’aymer pas les gens qui nous aimont. aymant.
CHARLOTE. CHARL.
Mais, Mais mon guieu, je taime aussi. t’ayme aussy.
PIERROT. PIARROT.
Oüy, Ouy, tu maimes dune m’ayme d’une belle deguaine.
CHARLOTE. CHARL.
Quement veux-tu Quemant veux tu donc qu'on fasse ? qu’on fasse ;
PIERROT. PIARROT.
Je veux que l'en l’on fasse comme l'en l’on fait quand l'en aime l’on ayme comme il faut.
CHARLOTE. CHARL.
Ne taimay-je t’ayme-je pas aussi aussy comme il faut ? faut.
PIERROT. PIARROT.
Non, quand ça est, ça se void, et l'en l’on fait mille petites singeries aux personnes personnes, quand on les aime ayme du bon bou du cœur. Regarde cœur : regarde la grosse Thomasse Tomasse comme elle est assotée assotie du jeune Robain, alle est toujou autour entour de ly à lagacer, l’agacer, et ne le laisse jamais en repos. Toujou al ly repos, toujou elle y fait queuque niche, ou ly baille quelque queuque taloche en passant, passant ; et l'autre jour qu'il l’autre jou, qu’il estoit assis sur un escabiau, escabeau, al fut le tirer de dessous ly, ly et le fit choir tout de son long par tarre. Jarny ula tarre ; jarny vla où len l’on voit les gens qui aimont, aymant, mais toy, toy tu ne me dis jamais mot, t'es t’es toujou là comme une vray vraye souche de bois, et je passerois ving vingt fois devant toy que tu ne te groüllerois grouillerois pas pour me bailler le mondre cou, coup, ou me dire la moindre chose. Ventrequenne, ça n'est chose, ventre guienne c’a n’est pas bian aprés apres tout, et t'es t’es trop froide pour les gens.
CHARLOTE. CHARL.
Que Enfin que veux-tu que j'y fasse ? c'est je fasse ? c’est mon himeur, humeur, et je ne me pis refondre. pas me resoudre.
PIERROT. PIARROT.
Ignui himeur Ignia humeur qui quienne, guienne, quand en on a de l'amiquié l’amiquié pour les personnes, lan l’on en baille toujou queuque petite signifiance.
CHARLOTE. CHARL.
Enfin, je taime Enfin j’ayme tout autant que je pis, et si tu n'es n’es pas content de ça, tu n'as qu'à n’as qu’à en aimer queuquautre. aymer queuque autre.
PIERROT. PIARROT.
Eh bien, ula bien vla pas mon conte ? Testigué, conte, testiquié si tu m'aimois, m’aymois me dirois-tu ça ? dirois tu ça ?
CHARLOTE. CHARL.
Pourquoy me viens-tu aussi viens tu tarabuster l'esprit ? l’esprit.
PIERROT. PIARROT.
Morqué, queu Morgué que mal te fais-je ? fais-je ? je ne te demande qu'un qu’un peu d'amiquié. pus damiquié.
CHARLOTE.
CHARL.
Et bian, bien laisse faire aussi, aussy, et ne me presse point tant, peut-estre que ça viendra tout d'un d’un coup sans y songer.
PIERROT. PIARROT.
Touche donc là, Charlote. là Charlotte.
CHARLOTE. CHARL.
Et bien, quien.
PIERROT. PIARROT.
Promets-mou donc Promets moy que tu tâcheras tascheras de maimer m’aymer davantage.
CHARLOTE. CHARL.
J'y J’y feray tout ce que je pourray, pourray ; mais il faut que ça vienne de luy-mesme. Pierrot, luy-mesme ; Piarrot, est-ce là ce Monsieur.
PIERROT. PIARROT.
Oüy, Ouy, le ula. vla.
CHARLOTE. CHARL.
Ah, Ah mon quieu, qu'il qu’il est genty, gentis, et que ç'auroit c’auroit esté dommage qu'il qu’il eust esté nayé. nayé !
PIERROT. PIARROT.
Je revians tout à l'heure, l’heure, je m'en vais m’en vas boire chopaine pour me rebouter tant tent soit peu de la fatigue que j'ays euë. jay eu.
SCENE SECONDE. II.
D. JUAN, SGANARELLE, CHARLOTE. SGANA., CHARLOTTE.
D. JUAN.
Nous avons manqué nostre coup, coup Sganarelle, et cette céte bourasque impreveuë a renversé renversé, avec nostre barque barque, le projet que nous avions fait ; fait ; mais à te dire vray, vray la Paysane païsanne que je viens de quiter quitter repare ce mal-heur, malheur, et je luy ay trouvé des charmes qui effacent de mon esprit tout le chagrin que me donnoit le mauvais succez succés de nostre entreprise. Il entreprise ; il ne faut pas que ce cœur m'échape, coup m’eschape, et j'y j’y ay déja jetté des dispositions à ne pas me pas souffrir long-temps de pousser longtemps des soûpirs. soupirs.
SGANARELLE. SGANA.
Monsieur, j'avoüe Monsieur j’avouë que vous m'estonnez ; m’estonnés, à peine sommes-nous present que nous sommes échapez d'un d’un peril de mort, qu'au qu’au lieu de rendre grace au Ciel ciel de la pitié qu'il peine qu’il a daigné prendre de nous, vous travaillez tout de nouveau à vous attirer sa colere par vos fantaisies accoûtumées, accoustumées et vos amours cr.... Paix, or.... paix, coquin que vous estes, vous ne sçavez ce que vous dites, et Monsieur sçait ce qu'il quil fait, allons. allons
D. JUAN
appercevant Charlotte. JUAN.
Ah, Ah ah, d'où d’où sort cette céte autre Paysane, Sganarelle ? as-tu Païsanne ? Sganarelle as tu rien veu de plus joly, et ne trouves-tu trouves tu pas, dy-moy, dis moy, que celle-cy celle cy vaut bien l'autre ? l’autre ?
SGANARELLE. SGANA.
Assurément. Autre Asseurement. autre piece nouvelle.
D. JUAN.
D'où D’où me vient, la Belle, belle, une rencontre si agreable ? agreable ? quoy, dans ces lieux champestres, parmy ces arbres arbres, et ces rochers, Rochers, on trouve des personnes faites comme vous estes ? estes ?
CHARLOTE. CHARL.
Vous voyez, voyez Monsieur.
D. JUAN.
Estes-vous Estes vous de ce Village ? Village ?
CHARLOTE. CHARL.
Oüy, Ouy Monsieur.
D. JUAN.
Et vous y demeurez ? demeurés ?
CHARLOTE. CHARL.
Oüy, Ouy Monsieur.
D. JUAN.
Vous vous appellez ? appellez.
CHARLOTE. CHARL.
Charlote, Charlotte pour vous servir.
D. JUAN.
Ah ! Ah la belle personne, et que ses yeux sont penetrans ? penetrans !
CHARLOTE. CHARL.
Monsieur, Monsieur vous me rendez toute honteuse.
D. JUAN.
Ah, n'ayez Ah n’ayés point de honte d'entendre d’entendre dire vos veritez. Sganarelle, qu'en dis-tu ? peut-on verités. Sgana. qu’en dis tu ? peut on rien voir veoir de plus agreable ? Tournez-vous agreable ? tournés vous un peu, s'il peu s’il vous plaist, plaist ; ah que cette Taille taille est jolie ! haussez jollie ! haussiés un peut peu la teste, teste de grace, grace. ah que ce visage est mignon. Ouvrez mignon ! ouvrez vos yeux entierement, ah qu'ils qu’ils sont beaux ! Que beaux ! que je voye un peu vos dents, je vous prie, ah qu'elles prie. Ah qu’elles sont amoureuses ! amoureuses, et ces lévres appetissantes. Pour moy, levres appetissantes ! pour moy je suis ravy, ravi, et je n'ay n’ay jamais veu une si charmante personne.
CHARLOTE. CHARL.
Monsieur, cela vous plaist à dire, et je ne sçay pas si c'est s’y c’est pour vous railler de moy.
D. JUAN.
Moy, me railler de vous ? vous, Dieu m'en m’en garde, je vous aime ayme trop pour cela, et c'est c’est du fond du cœur que je vous parle.
CHARLOTE. CHARL.
Je vous suis bien obligée, obligée si ça cela est.
D. JUAN.
Point du tout, vous ne m'estes m’estes point obligée, obligée de tout ce que je dis, et ce n'est qu'à n’est que à vostre beauté que vous en estes redevable.
CHARLOTE. CHARL.
Monsieur, tout ça est trop bien dit pour moy, et je n'ay n’ay pas d'esprit d’esprit pour vous répondre.
D. JUAN.
Sganarelle, regarde un peu ses mains.
CHARL.
Fy, Monsieur, elles sont noires comme je ne sçay quoy.
D. JUAN.
Ha Ah que dites-vous là, dites vous là ? elles sont les plus belles du monde, souffrez soufres que je les baise, je vous prie.
CHARLOTE. CHARL.
Monsieur, c'est c’est trop d'honneur d’honneur que vous me faites, et si j'avois sçeu j’avois sceu ça tantôt, tantost je n'aurois n’aurois pas manqué de les laver avec du son.
D. JUAN.
Et dites-moy dites moy un peu, Belle Charlote, belle Charlotte, vous n'estes n’estes pas mariée sans doute ? doute ?
CHARLOTE. CHARL.
Non, Non Monsieur, mais je dois bien-tost l'estre bien l’estre avec Piarrot, le fils de la voisine Simonere. Simonette.
D. JUAN.
Quoy, Quoy ! une personne comme vous seroit seriez la femme d'un d’un simple Paysan ? Païsan ? non, non c'est profaner non, c’est prophaner tant de beautez, beauté, et vous n'estes n’estes pas née pour demeurer dans un Village, Village ; vous meritez merités sans doute une meilleure fortune, et le Ciel qui le connoist bien, m'a bien m’a conduit icy tout exprés pour empescher ce mariage, et rendre justice à vos charmes : charmes ; car enfin, Belle Charlote, belle Charlotte, je vous aime ayme de tout mon cœur, et il ne tiendra qu'à qu’à vous que je ne vous arrache de ce miserable lieu, lieu miserable, et ne vous mette dans l'estat l’estat où vous meritez d'estre, cét merités d’estre ; cet amour est bien prompt sans doute ; doute ; mais quoy, c'est quoy ! c’est un effet, Charlote, éclat, Charlotte, de vostre grande beauté, et l'on l’on vous aime ayme autant en un quart d'heure, qu'on d’heure quon feroit une autre en six mois.
CHARLOTE. CHARL.
Aussi vray, Monsieur, je ne sçay comment faire vous faites quand vous parlez, parlés, ce que vous dites me fait aise, et j'aurois j’aurois toutes les envies du monde de vous croire, mais on m'a toujou dit, qu'il m’a tousjours dit qu’il ne faut jamais croire les Monsieux, Monsieurs, et que vous autres Courtisans vous estes des enjoleus, enjoleurs qui ne songez qu'à qu’à abuser les filles.
D. JUAN.
Je ne suis pas de ces gens-là.
SGANARELLE. SGANA.
Il n'a n’a garde.
CHARLOTE. CHARL.
Voyez-vous, Voyez vous, Monsieur, il n'y n’y a pas plaisir à se laisser abuser, abuser : je suis une pauvre Paysane, païsanne, mais j'ay l'honneur j’ay l’honneur en recommandation, et j'aimerois j’aymerois mieux me voir veoir morte que de me voire veoir deshonorée.
D. JUAN.
Moy, j'aurois l'ame assez méchante Moy j’aurois l’ame assés meschante pour abuser une personne comme vous, vous ? je serois assez lâche pour vouloir vous deshonorer ? deshonorer ? non, non, j'ay j’ay trop de conscience pour cela, cela ; je vous aime, Charlote, ayme Charlotte en tout bien et en tout honneur, et pour vous montrer que je vous dis vray, sçachez que je n'ay n’ay point d'autre d’autre dessein que de vous épouser, en voulez-vous espouser. En voulez vous un plus grand témoignage, m'y tesmoignage ? m’y voila prest quand vous voudrez, et je prends prens à témoin l'homme tesmoin l’homme que voila voyla de la parole que je vous donne.
SGANARELLE. SGANA.
Non, non, je ne craignez point, il se mariera avec vous tant que vous voudrez.
D. JUAN.
Ah, Charlote, Eh Charlotte, je vois bien que vous ne me connoissez pas encore, vous me faites grand tort de juger de moy par les autres, autres ; et s'il s’il y a des fourbes dans le monde, des gens qui ne cherchent qu'à qu’à abuser des Filles, filles, vous devez me tirer du nombre, et ne pas me mettre en doute la sincérité sincerité de ma foy, foy ; et puis vostre beauté vous assure asseure de tout. Quand tout ; quand on est faite comme vous, on doit estre à couvert de toutes ces sortes de crainte, creances ; vous n'avez n’avez point l'air, croyez-moy, d'une l’air, croyez moy, d’une personne qu'on qu’on abuse, et pour moy, je l'avoüe, vous l’avouë, je me percerois le cœur de mille coups, coups si j'avois j’avois eu la moindre pensée de vous trahir.
CHARLOTE. CHARL.
Mon Dieu, je ne sçay si vous dites vray ou non, mais vous faite faites que l'on l’on vous croit. croye.
D. JUAN.
Lors que Lorsque vous me croirez, croyez, vous me rendrez rendez justice assurément, asseurement, et je vous reïtere encore la promesse que je vous ay faite, ne l'acceptez-vous pas ? la croyez vous pas ? et ne voulez-vous voulez vous pas consentir à estre ma femme ? femme ?
CHARLOTE. CHARL.
Oüy, pourveu que Ouy, pourveuque ma Tante tante le veüille. veuille.
D. JUAN.
Touchez donc là, Charlote, puis Charlotte, que vous le voulez donc bien de vostre part.
CHARLOTE. CHARL.
Mais au moins, moins Monsieur, ne m'allez m’y allez pas tromper, tromper je vous prie, il y auroit de la conscience à vous, et vous voyez comme j'y j’y vais à la bonne foy.
D. JUAN.
Comment, il semble que vous doutiez doutiés encore de ma sincerité ? Voulez-vous sincerité ! voulez vous que je vous fasse des sermens épouvantables ? Que epouvantables ? que le Ciel... Ciel.
CHARLOTE. CHARL.
Mon Dieu, Dieu ! ne jurez point, je vous croy.
D. JUAN.
Donnez-moy Donnez moy donc un petit baiser pour gage de vostre parole.
CHARLOTE. CHARL.
Oh, Monsieur, Oh Monsieur ! attendez que je soyons mariez, mariées, je vous prie, aprés aprez ça je vous baiseray tant que vous voudrez.
D. JUAN.
Et bien, Belle Charlote, belle Charlotte, je veux tout ce que vous voulez, abandonnez-moy abandonnez moy seulement vostre main, et souffrez soufrez, que par mille cent baisers je luy exprime le ravissement où je suis... suis.
SCENE III.
D. JUAN, SGANARELLE, PIERROT, CHARLOTTE.
PIERROT
se mettant entre deux et poussant D. Juan. PIERROT.
Tout doucement, Monsieur tenez-vous, s'il doucement Monsieur, tenés vous plaist, s’il vous plait, vous vous échauffez eschaufez trop, et vous pourriez gagner pouriez gaigner la puresie.
D. JUAN
repoussant rudement Pierrot. JUAN.
Qui m'amene cét impertinent ? m’amene cet Impertinent ?
PIERROT. PIARROT.
Je vous dis qu'ou que vous tegniez, tgnais, et qu'ou que vous ne carressiais caressiez point nos accordées.
D. JUAN
continuë de le repousser. poussant.
Ah, Ah que de bruit.
PIERROT.
Jerniquenne, Jerniguenne, ce n'est n’est pas comme ça qu'il quil faut pousser les gens. gens...
CHARLOTE
prenant Pierrot par le bras. CHARL.
Et laisse-le Etlai sse le faire aussi, aussy Piarrot.
PIERROT.
Quement, que je laisse faire. Je faire ? je ne veux pas moy ? moy.
D. JUAN.
Ah.
PIERROT.
Testiguenne, par ce qu'ous estes Monsieu, ous Testequenne, parceque vous estes... vous viendrez caresser nos femme femmes à note notre barbe, allez u-s-en v. f. , et caresser les vostres.
D. JUAN.
Heu ? Heu.
PIERROT.
Heu.
D Juan luy donne un soufflet.
Testigué Heu testiqué ne me frapez frapés pas,
autre soufflet.
Oh, ah jernigué,
autre soufflet.
Ventrequé,
autre soufflet.
Palsanqué, morquenne, ventregué, pal sangué, morguenne, ça n'est n’est pas bian bien de batre battre les gens, et ce n'est n’est pas là la recompense de u-s- vous avoir sauvé d'estre d’estre nayé.
CHARLOTE. CHARL.
Piarrot ne te fasche point. point...
PIERROT.
Je me veux fascher, et t'es t’es une vilaine toy d'endurer qu'on vilaine, toy, d’endurer qu’on te caieole. caresse.
CHARLOTE. CHARL.
Oh, Oh Piarrot, ce n'est n’est pas ce que tu penses, ce Monsieur Monsr. veut m'épouser, m’espouser, et tu ne dois pas te bouter en colere.
PIERROT.
Quement ? Quement, jerny, tu m'es promise. renie promesse !
CHARLOTE. CHARL.
Ca ny n’y fait rien, Piarrot, si tu m'aimes, m’ayme ne dois-tu dois tu pas estre bien-aise bien ayse que je devienne Madame. Madame ?
PIERROT.
Jerniqué, Jernigué non, jaime j’ayme mieux te voir crevée veoir crever, que de te voir veoir à un autre.
CHARLOTE. CHARL.
Va va, Piarrot, va Pierrot, ne te mets point en peine ; peine, si je sis Madame, Madame je te feray gagner queuque chose, et tu apporteras du beure beurre et du fromage cheux cheu nous.
PIERROT.
Ventrequenne, Ventreguenne je gny en porteray jamais jamais, quand tu m'en poyrais m’y en payerois deux fois autant. Est-ce autant ; est-ce donc comme ça que t'escoutes t’escoute ce qu'il qu’il te dit ? morquenne, dit ? morguenne si j'avois sçeu j’avois sceu ça tantost, je me serois bian bien gardé de le tirer de gliau, et je gly ly aurois baillé bailli un bon coup d'aviron d’aviron sur la teste.
D. JUAN
s'aprochant de Pierrot pour le fraper. JUAN.
Qu'est-ce Qu’est-ce que vous dites ? dites ?
PIERROT
s'éloignant derriere Charlote. s’esloignant.
Jerniquenne, Jerniguenne, je ne crains parsonne. personne.
D. JUAN
passe du costé où est Pierrot. JUAN.
Attendez-moy Attends moy un peu.
PIERROT
repasse de l'autre costé de Charlote. PIERROT.
Je me moque de tout, moy.
D. JUAN
court aprés Pierrot. JUAN.
Voyons cela.
PIERROT
se sauve encore derriere Charlote. PIERROT.
J'en J’en avons bien veu d'autres. dautres.
D. JUAN.
Hoüais. Houais.
SGANARELLE. SGANA.
Eh, Eh Monsieur, laissez-là laissés là ce pauvre miserable. C'est pôvre miserable, c’est conscience de le batre. Ecoute, battre ; ecoute mon pauvre Garçon, retire-toy, pôvre garçon, retire toy et ne luy dis rien.
PIERROT
passe devant Sganarelle, et dit fierement à D. Juan. PIERROT.
Je veux luy dire, moy.
D. JUAN
leve la main pour donner donnant un soufflet souflet à Pierrot, qui baisse la teste, et Sganarelle reçoit le soufflet. Sgana. qu’il croit donner à Pierrot.
Ah, Ah je vous apprendray.
SGANARELLE SGANA.
regardant Pierrot qui s'est s’est baissé pour éviter eviter le soufflet. coup.
Peste soit du maroufle.
D. JUAN.
Te voila voyla payé de ta charité.
PIERROT.
Jarny, je vas dire à sa Tante ta tante tout ce ménage-cy.
D. JUAN.
Enfin, Enfin je m'en m’en vais estre le plus heureux de tous les hommes, et je ne changerois pas mon bonheur à toutes les choses du monde. Que monde : que de plaisirs, que de plaisirs plaisirs, quand vous serez ma femme, et que... que !
SCENE IV. V.
D. JUAN, SGANARELLE, CHARLOTE, MATHURINE. MATHURINE, CHARLOTTE, SGANARELLE.
SGANARELLE,
appercevant Mathurine. SGANA.
Ah, ah.
MATHURINE
à Dom Juan. MATHURINE.
Monsieur, que faites vous donc là avec Charlote, Charlotte, est-ce que vous luy parlez d'amour aussi ? d’amour aussy ?
D. JUAN
à Mathurine. Mathur.
Non, au contraire, c'est contraire c’est elle qui me témoignoit une envie d'estre temoignoit vouloir estre ma femme, et je luy répondois respondois que j'estois j’estois engagé à vous.
CHARLOTE. CHARL.
Qu'est-que c'est Qu’est-ce que c’est donc que vous veut Mathurine ? Mathurine ?
D. JUAN JUAN.
bas à Charlotte. Charlote.
Elle est jalouse de me voir veoir vous parler, et voudroit bien que je l'épousasse, l’espousasse, mais je luy dis ait dit que c'est c’est vous que je veux.
MATHURINE. MATH.
Quoy, Charlote.... Quoy Charlotte ?
D. JUAN
bas à Mathurine. Math.
Tout ce que vous luy direz sera inutile, elle s'est s’est mis cela dans en la teste.
CHARLOTE. CHARL.
Quement donc Mathurine..... Mathurine ?
D. JUAN
bas à Charlote. Charl.
C'est C’est en vain que vous luy parlerez, vous ne lu luy osterez point pas cette fantaisie.
MATHURINE. MATH.
Est-ce que... Est ceque.
D. JUAN
bas à Mathurine. Mathur.
Il n'y n’y a pas moyen de luy faire entendre raison.
CHARLOTE. CHARL.
Je voudrois.... voudrois.
D. JUAN
bas à Charlotte. Charlot.
Elle est obstinée comme tous les Diables.
MATHURINE. MATH.
Vramant.... Vremant.
D. JUAN
bas à Mathurine. Mathur.
Ne luy dites rien, c'est c’est une folle.
CHARLOTE. CHARL.
Je pense.... pense.
D. JUAN
bas à Charlote. Charlot.
Laissez-là la, c'est Laissés-la là, c’est une extravagante.
MATHURINE. MATH.
Non, Non non, il faut que je luy parle. parlé.
CHARLOTE. CHARL.
Je veux voir veoir un peu ses raisons.
MATHURINE. MATH.
Quoy.... Quoy ?
D. JUAN
bas à Mathurine. Math.
Je gage qu'elle va qu’elle vous dire dira que je luy ay promis de l'épouser. l’espouser.
CHARLOTE. CHARL.
Je.... Je.
D. JUAN
bas à Charlote. Charlot.
Gageons qu'elle qu’elle vous soustiendra soutiendra que je luy ay donné parole de la prendre pour femme.
MATHURINE. MATH.
Hola, Charlote, ça n'est Charlotte, ç’a n’est pas bien de courir sur le marché des autres.
CHARLOTE. CHARL.
Ca n'est C’a n’est pas honneste, Mathurine, d'estre d’estre jalouse que Monsieur me parle.
MATHURINE. MATH.
C'est C’est moy que Monsieur a veu la premiere.
CHARLOTE. CHARL.
S'il S’il vous a veu la premiere, il m'a m’a veu la seconde, et m'a m’a promis de m'épouser. m’espouser.
D. JUAN
bas à Mathurine. Mathur.
Et bien, que vous ay-je dit ? vous-ay-je dit ?
MATHURINE. MATH.
Je vous baise les mains, c'est c’est moy, et non pas vous qu'il qu’il a promis d'épouser. d’espouser.
D. JUAN
bas à Charlote. Charlot.
N'ay-je N’ay-je pas deviné ? deviné.
CHARLOTE. CHARL.
A d'autres, d’autres je vous prie, c'est moy, c’est moy vous dis-je, vous dis-je.
MATHURINE.
Vous vous moquez des gens, c'est moy, encore c’est moy encor un coup.
CHARLOTE. MATH.
Le ula qui est pour le dire, si je n'ay pas raison.
MATHURINE.
Le ula vla qui est pour me démentir, dementir si je ne dis pas vray.
CHARLOTE. CHARL.
Est-ce, Monsieu, Est ce Monsieur que vous luy avez aviez promis de l'épouser ? l’espouser ?
D. JUAN
bas à Charlote. Charl.
Vous vous raillez de moy.
MATHURINE. MATH.
Est-il vray, Monsieur, vray Monsieur que vous luy avez ly ayez donné parole d'estre d’estre son mary ? mary ?
D. JUAN
bas à Mathurine. Mathur.
Pouvez-vous Pouvez vous avoir cette pensée ? pensée.
CHARLOTE.
CHARL.
Vous voyez qu'al qu’al le soûtient. soutient.
D. JUAN
bas à Charlote. Charl.
Laissez-la Laissés la faire.
MATHURINE. MATH.
Vous estes témoin temoin comme al l'assure. l’asseure.
D. JUAN
bas à Mathurine. Math.
Laissez-la Laissés la dire.
CHARLOTE. CHARL.
Non, Non non, il faut sçavoir la verité.
MATHURINE. MATH.
Il est question de juger ça.
CHARLOTE. CHARL.
Oüy, Ouy, Mathurine, je veux que Monsieur vous montre monstre vostre bec jaune.
MATHURINE. MATH.
Oüy, Charlote, Ouy Charlotte, je veux que Monsieur vous rende un peu camuse.
CHARLOTE. CHARL.
Monsieur, vuidez vuidés la querelle, s'il querelle s’il vous plaît. plaist.
MATHURINE. MATH.
Mettez-nous d'accord, Mettés nous d’accord Monsieur.
CHARLOTE CHARL.
à Mathurine. Math.
Vous allez voir. veoir.
MATHURINE MATH
à Charlote. Charl.
Vous allez voir vous mesme. veoir vous-mesme.
CHARLOTE CHARL.
à D. Juan.
Dites. Perlez.
MATHURINE MATH.
à D. Juan.
Parlez. Perlez.
D. JUAN
embarassé leur dit à toutes deux. JUAN.
Que voulez-vous voulez vous que je dise ? vous soûtenez également dise, vous soustenez egalement toutes deux que je vous ay promis de vous prendre pour femmes. Est-ce femmes, est-ce que chacune de vous ne sçait pas ce qui en est, sans qu'il qu’il soit necessaire que je m'explique davantage ? pourquoy m'obliger m’explique davantage. Pourquoy m’obliger là-dessus à des redites ? redites ? celle à qui j'ay j’ay promis effectivement n'a-t-elle n’a-t-elle pas en elle-mesme dequoy se moquer des discours de l'autre, l’autre, et doit-elle doit elle se mettre en peine pourveu que j'accomplisse ; pourveuque j’accomplisse ma promesse ? Tous promesse ? tous les discours n'avancent n’avancent point les choses, il faut faire, faire et non pas dire, et les effets decident effects decideront mieux que les paroles. Aussi n'est-ce paroles ; aussy n’est-ce rien que par là que je vous veux vous mettre d'accord, d’accord, et l'on l’on verra quand je me marierai, marieray laquelle des deux a mon cœur, cœur ;
bas à Mathurine,
laissez-luy laissés luy croire ce qu'elle voudra, qu’elle voudra.
bas à Charlote, Charlotte
laissez-là se flater dans son imagination,
bas à Mathurine,
je vous adore,
bas à Charlote,
je suis tout à vous, vous.
bas à Mathurine, Mathurine
tous les visages sont laids auprès auprés du vostre, vostre.
bas à Charlote, Charlotte
on ne peut plus souffrir les autres quand on vous a veuë. J'ay veuë, j’ay un petit ordre à donner, je viens vous retrouver dans un quart d'heur. d’heure.
CHARLOTE CHARL.
à Mathurine. Math.
Je suis celle qu'il aime, qu’il ayme au moins.
MATHURINE. MATH.
C'est C’est moy qu'il épousera. qu’il espousera.
SGANARELLE. SGANA.
Ah, pauvres Ah ! Pauvres filles que vous estes, j'ay j’ay pitié de vostre innocence, et je ne puis souffrir de vous voir veoir courir à vostre malheur. Croyez-moy l'une malheur ; croyez moy l’une et l'autre, l’autre, ne vous amusez amusés point à tous les contes qu'on qu’on vous fait, et demeurez dans vostre village.
D. JUAN
revenant.
Je voudrois bien sçavoir pourquoy Sganarelle ne me suit pas.
SGANARELLE. SGANA.
Mon Maître Maistre est un fourbe, il n'a n’a dessein que de vous abuser, et en a bien abusé d'autres, c'est l'Epouseur d’autres, cest l’espouseur du genre humain, et.... et
(il apperçoit D. Juan)
cela est faux, et quiconque vous dira cela, vous luy devez dire qu'il qu’il en a menty. Mon Maître n'est menty, mon Maistre n’est point l'Epouseur l’espouseur du genre humain, il n'est humain ; Il n’est point fourbe, il n'a n’a pas dessein de vous tromper, et n'en n’en a point abusé d'autres. Ah, tenez, d’autres ; ah tenez le voila, demandez-le plûtost voyla, demandez le plustost à luy-mesme.
D. JUAN.
Oüy. Ouy.
SGANARELLE.
Monsieur, SGANA.
Monsieur comme le monde est plein de médisans, mesdisances, je vais au devant audevant des choses, et je leur disois que si quelqu'un quelcun leur venoit dire du mal de vous, elles se gardassent bien de le croire, et ne manquassent pas de luy dire qu'il qu’il en auroit avoit menty.
D. JUAN.
Sganarelle.
SGANARELLE. SGANA.
Oüy, Ouy, Monsieur est homme d'honneur, d’honneur, je le garantis tel. guarantis tel
D. JUAN.
Hon.
SGANARELLE. SGANA.
Ce sont des impertinens. Impertinens.
SCENE CINQUIESME. V.
D. JUAN, LA RAME'E, CHARLOTE, MATHURINE, SGANARELLE. la RAME’E, CHARLOTTE, MATHUR., SGANAR.
LA RAME'E. la RAMEE.
Monsieur, Monsieur je viens vous avertir qu'il qu’il ne fait pas bon icy pour vous.
D. JUAN.
Comment ? Comment ?
LA RAME'E. la RAMEE.
Douze hommes à cheval vous cherchent, qui doivent arriver icy dans un moment, moment ; je ne sçay pas par quel moyen ils peuvent vous avoir suivi, suivy, mais j'ay j’ay appris cette nouvelle d'un Païsan qu'ils d’un païsan qu’ils ont interrogé, et auquel ils vous ont dépeint. L'affaire depeint ; l’affaire presse, et le plûtost plustost que vous pourrez pouvez sortir d'icy, d’icy sera le meilleur.
D. JUAN
à Charlote Charl. et à Mathurine.
Une affaire pressante m'oblige m’oblige de partir d'icy, d’icy, mais je vous prie de vous ressouvenir resouvenir de la parole que je vous ay donnée, et de croire que vous aurez de mes nouvelles nouvelles, avant qu'il qu’il soit demain au soir. soir ; Comme la partie n'est n’est pas égale, egale, il faut user de stratageme, stratageme et éluder eluder adroitement le malheur qui me cherche, je veux que Sganarelle se reveste veste de mes habits, habits et moy.... moy...
SGANARELLE. SGANA.
Monsieur, vous vous moquez, m'exposer m’exposer à estre tué sous vos habits, habits et...
D. JUAN.
Allons viste, c'est c’est trop d'honneur d’honneur que je vous fais, et bien-heureux bien heureux est la le valet qui peut avoir la gloire de mourir pour son Maître. Maistre.
SGANARELLE. SGANA.
Je vous remercie d'un d’un tel honneur. O Ciel, puis qu'il s'agit Ciel puisqu’il s’agit de mort, fait-moy fais moy la grace de n'estre n’estre point pris pour un autre.
ACTE III. TROISIEME
SCENE PREMIERE. I.
D. JUAN en habit de campagne, SGANARELLE en Medecin. JUAN, SGANARELLE.
SGANARELLE.
Ma foy, foy Monsieur, avoüez avoués que j'ay j’ay eu raison, et que nous voila l'un voyla l’un et l'autre déguisez l’autre deguisés à merveille. Vostre merveille, vostre premier dessein n'estoit n’estoit point du tout à propos, et cecy nous cache bien mieux que tout ce que vous vouliez faire.
D. JUAN.
Il est vray, vray que te voila voyla bien, et je ne sçay où tu as esté déterrer cét deterrer cet attirail ridicule.
SGANARELLE. SGANA.
Oüy, c'est l'habit d'un Ouy, c’est l’habit d’un vieux Medecin qui a esté laissé en gage au lieu où je l'ay pris, l’ay pris. et il m'en m’en a coûté cousté de l'argent l’argent pour l'avoir. Mais sçavez-vous, l’avoir. mais sçavez vous, Monsieur, que cét cet habit me met déja en consideration ? consideration, que je suis salué des gens que je rencontre, et que l'on me l’on vient me consulter ainsi qu'un ainsy qu’un habile homme ? homme.
D. JUAN.
Comment donc ? donc ?
SGANARELLE. SGANA.
Cinq ou six Païsans et Païsanes ou Païsannes, en me voyant passer passer, me sont venus demander mon avis sur differentes maladies.
D. JUAN.
Tu leur as répondu respondu, que tu n'y n’y entendois rien ? rien.
SGANARELLE. SGANA.
Moy Moy, point du tout, j'ay j’ay voulu soûtenir l'honneur soustenir l’honneur de mon habit, j'ay j’ay raisonné sur le mal, et leur ay fait des ordonnances ordonnance à chacun.
D. JUAN.
Et quels remedes encore leur as-tu ordonnez ? ordonnés ?
SGANARELLE. SGANA.
Ma foy, Monsieur, j'en j’en ay pris par où j'en j’en ay pû peu attraper, j'ay j’ay fait mes ordonnances ordonnance à l'avanture, l’avanture, et ce seroit une chose plaisante si les ces malades guérissoient, guerrissoient, et qu'on m'en qu’on me vinst remercier.
D. JUAN.
Et pourquoy non ? non, par quelle raison n'aurois-tu n’aurois tu pas les mesmes privileges qu'ont qu’ont tous les autres Medecins ? Medecins ? ils n'ont n’ont pas plus de part que toy aux guérisons guerisons des malades, et tout leur art est pure grimace. Ils grimace, ils ne font rien que recevoir la gloire des heureux succez, et tu peux peus profiter comme eux du bon-heur bonheur du malade, et vois veoir attribuer à tes remedes tout ce qui peut venir des faveurs du hazard, hasard, et des forces de la nature.
SGANARELLE. SGANA.
Comment, Comment Monsieur, vous este aussi estes aussy impie en Medecine ? Medecine.
D. JUAN.
C'est C’est une des grandes erreurs qui soit parmy les hommes.
SGANARELLE. SGANA.
Quoy, Quoy ! vous ne croyez pas au sené, Sené, ny à la casse, ny Casse, au vin hemetique ? Vin hemetique ?
D. JUAN.
Et pourquoy veux-tu que j'y croye ? j’y croye ?
SGANARELLE. SGANA.
Vous avez l'ame l’ame bien mécreante. Cependant meschante, cependant vous voyez depuis un temps que le vin Vin hemetique fait bruire les fuseaux. Les ses fuseaux, ses miracles ont converty les plus incredules uncredules esprits, et il n'y n’y a pas trois semaines que j'en j’en ay veu, moy qui vous parle, un effet effect merveilleux.
D. JUAN.
Et quel ? quel ?
SGANARELLE. SGANA.
Il y avoit un homme qui depuis six jours estoit à l'agonie, on l’agonie. On ne sçavoit plus que luy ordonner, et tous les remedes ne faisoient rien, rien ; on s'avisa s’avisa à la fin de luy lu donner de l'hemetique. l’hemetique.
D. JUAN.
Il réchapa, n'est-ce pas ? reschappa ?
SGANARELLE. SGANA.
Non, il mourut.
D. JUAN.
L'effet L’effet est admirable.
SGANARELLE.
Comment ? il y avoit si jour entiers qu'il ne pouvoit mourir, et cela le fit mourir tout d'un coup. Voulez-vous rien de plus efficace ?
D. JUAN.
Tu as raison.
SGANARELLE. SGANA.
Mais laissons-là laissons là la Medecine Medecine, où vous ne croyez point, et parlons des autres choses : choses ; car cet habit me donne de l'esprit, l’esprit, et je me sens en humeur de disputer contre vous. Vous vous ; vous sçavez bien que vous me permettez les disputes, et que vous ne me défendez defendez que les remontrances. Remontrances.
D. JUAN.
Et bien ? bien...
SGANARELLE. SGANA.
Je veux sçavoir un peu vos pensées à fonds. Est-il fonds ; est il possible que vous ne croyez point du tout au Ciel ? Ciel ?
D. JUAN.
Laissons cela. Laissons-cela.
SGANARELLE. SGANA.
C'est C’est à dire que non. Et non ; et à l'Enfer ? l’enfer ?
D. JUAN.
Eh.
SGANARELLE. SGANA.
Tout de mesme. Et demesme ; et au Diable, s'il Diable s’il vous plaît ? plaist ?
D. JUAN.
Oüy, oüy. Ouy, ouy.
SGANARELLE. SGANA.
Aussi peu. Ne croyez-vous Aussy peu ; ne croyez vous point en l'autre vie ? l’autre vie ?
D. JUAN.
Ah, ah, ah.
SGANARELLE. SGANA.
Voila Voyla un homme que j'auray j’auray bien de la peine à convertir. Et dites-moy convertir ; et dites moy un peu, le Moyne bourru, qu’en croyez vous ? eh !
D. JUAN.
La peste soit du fat.
SGANA.
Et voyla ce que je ne puis souffrir, car il n’y a rien de plus vray que le Moyne bourru ; et je me ferois pendre pour celuy-là ; mais encore faut-il croire en quelque chose. Qu'est-ce chose dans le monde, qu’est-ce donc que vous croyez ?
D. JUAN.
Qu'est-ce Ce que je croy ? crois.
SGANARELLE. SGANA.
Oüy. Ouy.
D. JUAN.
Je croy crois que deux et deux font quatre, Sganarelle, Sganarelle et que quatre et quatre font huit.
SGANARELLE. SGANA.
La belle Belle croyance, et les beaux articles de foy que voila ! voicy ; vostre religion, à ce que je vois, voy, est donc l'Arithmetique ? l’aritmetique ; il faut avoüer qu'il avouër qu’il se met d'étranges folies d’estrange folie dans la teste des hommes, et que pour avoir bien estudié, estudié on en est bien moins sage le plus souvent. Pour moy, Monsieur, souvent ; pour moy Mr. je n'ay n’ay point estudié comme vous, Dieu mercy, et personne ne sçauroit se sçauroit vanter de m'avoir m’avoir jamais rien appris ; appris ; mais avec mon petit sens, sens et mon petit jugement, jugement je voy les choses mieux que tous les vos livres, et je comprends fort bien que ce monde monde, que nous voyons, n'est n’est pas un champignon qui soit venu tout seul en une nuit. nuict. Je voudrois bien vous demander qui a fait ces arbres-là, ces Rochers, rochers, cette Terre, terre ; et ce Ciel que voilà voylà là-haut, et si tout cela s'est baty s’est basty de luy-mesme ? Vous voila vous, luy-mesme ; vous voylà vous par exemple, vous estes là ; là ; est-ce que vous vous estes fait tout seul, et n'a-t-il n’a-t-il pas falu fallu que vostre pere ait engrossé vostre mere pour vous faire ? Pouvez-vous voir faire ? pouvez-vous veoir toutes les inventions ces inventions, dont la machine de l'homme l’homme est composée, sans admirer de quelle façon cela est agencé l'un ageancé l’un dans l'autre, l’autre ? ces nerfs, ces os, ces veines, ces arteres, ces... ce poumon, ce cœur, ce foye, et tous ces autres ingrediens qui sont là, là et qui.... Oh dame, interrompez-moy qui... ah Dame interrompés moy donc si vous voulez, je ne sçaurois disputer si l'on l’on ne m'interrompt, m’interrompt, vous vous taisez exprés, exprez, et me laissez parler par belle malice.
D. JUAN.
J'attends J’attends que ton raisonnement soit finy.
SGANARELLE. SGAN.
Mon raisonnement Raisonnement est qu'il qu’il y a quelque chose d'admirable d’admirable dans l'homme, quoy que l’homme quoyque vous puissiez dire, dire que tous les Sçavans sçavas ne sçauroient expliquer. Cela n'est-il expliquer ; cela n’est il pas merveilleux que me voila icy, voylà icy ; et que j'aye j’aye quelque chose dans la teste qui pense cent choses differentes en un moment, et fait de mon corps tout ce qu'elle veut ? Je qu’il veut ! je veux fraper frapper des mains, hausser le bras, lever les yeux au Ciel, aux CIel, baisser la teste, remuer les pieds, aller à droit, à gauche, en avant, en arriere, tourner.... tourner,
Il il se laisse tomber en se tournant.
D. JUAN.
Bon, voila Bon voyla ton raisonnement qui a le nez nés cassé.
SGANARELLE. SGAN.
Morbleu, Morbleu je suis bien sot de m'amuser à raisonner avec vous. Croyez vous, croyez ce que vous voudrez, il m'importe m’importe bien que vous soyez damné.
D. JUAN.
Mais tout en raisonnant, je croy que nous sommes égarez, esgarés ; appelle un peu cét cet homme que voila là-bas voyla là-bas, pour luy demander le chemin.
SGANARELLE. SGAN.
Hola ho, l'homme, ho, ho l’homme, ho mon compere, ho l'amy, l’amy, un petit mot, s'il mot s’il vous plaist.
SCENE SECONDE. II.
D. JUAN, SGANARELLE, UN PAUVRE. un POVRE.
SGANARELLE.
Enseignez-nous Enseigne nous un peu le chemin qui mene à la Ville. ville.
LE PAUVRE. le POVRE.
Vous n'avez qu'à n’avez qu’à suivre cette route, Messieurs, et détourner tournez à main droite quand vous serez au bout de la forest, forest ; mais je vous donne avis que vous devez vous tenir sur vos gardes, et que depuis quelque temps il y a des voleurs icy autour.
D. JUAN.
Je te suis obligé, obligé mon amy, et je te rends grace graces de tout mon cœur.
LE PAUVRE. le POVRE.
Si vous vouliez, Monsieur, voulez me secourir secourir, Monsieur de quelque aumosne.
D. JUAN.
Ah, ah, ton avis est interessé, interessé à ce que je voy. vois.
LE PAUVRE. le POVRE.
Je suis un pauvre Povre homme, Monsieur, retiré tout seul dans ce bois depuis plus de dix ans, et je ne manqueray pas de prier le Ciel qu'il qu’il vous donne toute toutes sorte de biens.
D. JUAN.
Eh, prie-le qu'il Eh prie le Ciel qu’il te donne un habit, sans te mettre en peine des affaires des autres.
SGANARELLE. SGAN.
Vous ne connoissez pas Monsieur, par Monsieur ce bon homme, il ne croit qu'en qu’en deux et deux font quatre, et en quatre et quatre fon font huit.
D. JUAN.
Quelle est ton occupation parmy ces arbres ? arbres.
LE PAUVRE. le POVRE.
De prier le Ciel tout le jour pour la prosperité des gens de bien qui me donnent quelque chose.
D. JUAN.
Il ne se peut donc pas que tu ne sois bien à ton aise. aise ?
LE PAUVRE. le POVRE.
Helas, Monsieur, je suis dans la plus grande necessité du monde.
D. JUAN.
Tu te moques ; moques, un homme qui prie le Ciel tout le jour, jour ne peut pas manquer d'estre d’estre bien dans es ses affaires.
LE le PAUVRE.
Je vous assure, Monsieur, asseure Monsieur que le plus souvent je n'ay n’ay pas un morceau de pain à mettre sous les dents.
D. JUAN.
Je Voyla qui est estrange, et tu es bien mal reconnu de tes soins ; ah ah, je me’nvais te veux donner un loüis d'or, et louis d’or tout à l’heure pourveu que tu veuilles jurer.
le POVRE.
Ah, Monsieur, voudriez vous que je commisse un tel peché ?
D. JUAN.
Tu n’as qu’à voir si tu veux gagner un louis d’or ou non, en voyci un que je te donne si tu jures, tiens il faut jurer.
le POVRE.
Monsieur.
D. JUAN.
A moins de cela tu ne l’auras pas.
SGAN.
Va, va, jure un peu, il ny a pas de mal.
D. JUAN.
Prens, le voyla, prens te dis-je, mais jure donc.
le POVRE.
Non Monsieur, j’ayme mieux mourir de faim.
D. JUAN.
Va va, je te le donne pour l'amour l’amour de l'humanité. Mais humanité, mais que vois-je là ? là ? un homme attaqué par trois autres ? autres ! la partie est trop inégale, inegale, et je ne dois pas souffrir cette lâcheté. lascheté.
SCENE III.
D. JUAN, D. CARLOS, SGANARELLE. SGANA.
SGANARELLE. SGANA.
Mon Maître Maistre est un vray enragé d'aller d’aller se presenter à un peril qui ne le cherche pas, mais, pas ; mais ma foy, foy le secours a servy, et les deux ont fait fuir les trois. füits.
D. CARLOS
l'épée à la main. CARLOS.
On voit par la fuite suite de ces voleurs de quel secours est vostre bras, souffrez, Monsieur, Monsieur ; que je vous rende rends grace d'une d’une action si genereuse, genereuse et que....
D. JUAN
revenant l'épée à la main. JUAN.
Je n'ay n’ay rien fait, Monsieur, que vous n'eussiez n’eussiez fait en à ma place. Nostre place, nostre propre honneur est interessé dans de pareilles avantures, et l'action l’action de ces coquins Coquins estoit si lâche, lasche que ç'eust c’eust esté y prendre part que de ne s'y s’y pas opposer, opposer ; mais par quelle rencontre vous estes-vous estes vous trouvé entre leurs mains ? mains ?
D. CARLOS.
Je m'estois m’estois par hazard égaré d'un Frere, écarté d’un frere et de tous ceux de nostre suite, et comme je cherchois à les rejoindre, j'ay rejoindre j’ay fait rencontre de ces voleurs, voleurs qui d'abord dabord ont tué mon cheval, et qui sans vostre valeur en auroient fait autant de moy.
D. JUAN.
Vostre dessein est-il d'aller est il d’aller du costé de la Ville ? ville ?
D. CARLOS.
Oüy, Ouy, mais sans y vouloir entrer, et nous nous voyons obligez obligez, mon frere et moy moy, à tenir la campagne pour une de ces fâcheuses affaires qui reduisent les Gentilshommes à se sacrifier eux et leur famille à la severité de leur honneur, puis qu'enfin puisque enfin le plus doux succez en est toûjours toujours funeste, et que si l'on l’on ne quite quitte pas la vie, le vie on est contraint de quiter quitter le Royaume, et c'est c’est en quoy je se trouve la condition d'un d’un Gentilhomme malheureuse, malheureuse de ne pouvoir s'assurer point s’assurer sur toute la prudence et toute l'honnesteté l’honnesteté de sa conduite, d'estre condition, d’estre asservy par les Loix loix de l'honneur l’honneur au déreglement dereglement de la conduite d'autruy, d’autruy, et de voir sa vie, son repos, repos et ses biens dépendre bien dependre de la fantaisie du premier temeraire, temeraire qui s'avisera s’avisera de luy faire une de ces injures pour qui un honneste homme doit perir.
D. JUAN.
On a cét cet avantage qu'on qu’on fait courir le mesme risque, risque et passer mal aussi aussy le temps temps, à ceux qui prennent fantaisie de nous venir faire une offense offence de gayté de cœur. Mais cœur ; mais ne seroit-ce point une indiscretion indiscretion, que de vous demander quelle peut estre vostre affaire ? affaire ?
D. CARLOS.
La chose en est aux termes de n'en n’en plus faire de secret, et lors que l'injure l’injure a une fois éclaté, esclaté nostre honneur ne va point à vouloir cacher nostre honte, mais à faire éclater eclater nostre veangeance, vengeance et à publier mesme le dessein que nous en avons. Ainsi, avons ; ainsi, Monsieur, je ne feindray point de vous dire que l'offense l’offence que nous cherchons à vanger, vaner, est une sœur seduite et enlevée d'un Convent, d’un convent, et que l'Auteur l’auteur de cette offence est un D. Juan Tenorio, fils de D. Louis Tenorio. Nous Cores Tenorio ; nous le cherchons depuis quelques jours, jours et nous l'avons l’avons suivy ce de matin sur le rapport d'un valet, d’un valet qui nous a dit qu'il qu’il sortoit à cheval accompagné de quatre ou cinq, et qu'il qu’il avoit pris le long de cette coste, ce costé, mais tous nos soins ont esté inutiles, inutiles et nous n'avons n’avons pû decouvrir ce qu'il qu’il est devenu.
D. JUAN.
Le connoissez-vous, connoissez vous, Monsieur, ce D. Juan Juan, dont vous parlez. parlez ?
D. CARLOS.
Non, quant à moy. Je moy je ne l'ay l’ay jamais veu, et je l'ay l’ay seulement ouy dépeindre ouï depeindre à mon frere, frere ; mais la Renommée n'en n’en dit pas force bien, et c'est c’est un homme dont la vie.... vie.
D. JUAN.
Arrestez, Monsieur, s'il s’il vous plaist, plaist ; il est un peu un de mes amis, et ce seroit à moy une espece de lâcheté que d'en ouir den ouïr dire du mal.
D. CARLOS.
Pour l'amour l’amour de vous, Monsieur, je n'en n’en diray rien du tout, et c'est c’est bien la moindre chaose chose que je vous doive, aprés m'avoir m’avoir sauvé la vie, que de me taire devant vous d'une d’une personne que vous connoissez, lors que lorsque je ne puis en parler sans en dire du mal : mal ; mais quelque amy que vous luy soyez, j'ose j’oze esperer que vous n'approuverez n’approuverez pas son action, et ne trouverez pas estrange que nous cherchions d'en den prendre la vengeance.
D. JUAN.
Au contraire, je vous y veux servir, et vous épargner des soins inutiles ; inutiles ; je suis amy de D. Juan, je ne puis pas m'en m’en empescher, mais il n'est n’est pas raisonnable qu'il qu’il offence impunément des Gentilshommes, et Gentilshommes impunement, je m'engage m’engage à vous faire faire raison par luy.
D. CARLOS.
Et quelle raison peut-on peut on faire à ces sortes d'injures ? d’injures.
D. JUAN.
Toute celle que vostre honneur peut souhaiter, et sans vous donner la peine de chercher D. Juan davantage, je m'oblige m’oblige à le faire trouver au lieu que vous voudrez, voudrez et quand il vous plaira.
D. CARLOS.
Cét Cet espoir est bien doux, Monsieur, à des cœurs offencez ; offencez ; mais aprés apres ce que je vous dois, dois ce me seroit une trop sensible douleur, douleur que vous fussiez de la partie.
D. JUAN.
Je suis si attaché à D. Juan, qu'il Juan qu’il ne sçauroit se battre que je ne me batte aussi : aussy, mais enfin j'en j’en répons comme de moy-mesme, et vous n'avez qu'à n’avez qu’à dire quand vous voulez qu'il paroisse, qu’il paroisse et vous donne satisfaction.
D. CARLOS.
Que ma destinée est cruelle ! faut-il cruelle ! faut il que je vous doive la vie, et que D. Juan soit de vos amis ? amis !
SCENE IV.
D. ALONSE, et trois suivans , Suivans, D. CARLOS, D. JUAN, SGANARELLE.
D. ALONSE.
Faites boire là mes no chevaux, et qu'on qu’on les amene aprés nous, je veux un peu marcher à pied. O Ciel, Ciel que vois-je icy ? Quoy, icy ! quoy, mon frere, vous voila voyla avec nostre Ennemy mortel ?
D. CARLOS.
Nostre Ennemy mortel ? ennemy mortel !
D. JUAN.
se reculant trois pas et mettant
fierement la main sur la garde de son épée.
Oüy, Ouy je suis D. Juan moy-mesme, et l'avantage l’avantage du nombre ne m'obligera m’obligera pas à vouloir déguiser deguiser mon nom.
D. ALONSE.
Ah, traître, Ah traistre, il faut que tu perisse, et....
D. CARLOS.
Ah, mon frere, arrestez, je luy suis redevable de la vie, et sans le secours de son bras, j'aurois esté tué par des voleurs que j'ay trouvez.
D. ALONSE.
Et voulez-vous que cette consideration empesche nostre vengeance ? tous les services que nous rend une main ennemie, ne sont d'aucun merite pour engager nostre ame, et s'il faut mesurer l'obligation à l'injure, vostre reconnoissance, mon frere, est icy ridicule ; et comme l'honneur est infiniment plus precieux que la vie, c'est ne devoir rien proprement, que d'estre redevable de la vie à qui nous a osté l'honneur.
D. CARLOS.
Je sçay la difference, mon frere, qu'un Gentilhomme doit toûjours mettre entre l'un et l'autre, et la reconnoissance de l'obligation n'efface point en moy le ressentiment de l'injure : mais souffrez que je luy rende icy ce qu'il m'a presté, que je m'acquitte sur le champ de la vie que je luy dois par un delay de nostre vengeance, et luy laisse la liberté de joüir durant quelques jours du fruit de son bienfait.
D. ALONSE.
Non, non, c'est hazarder nostre vengeance que de la reculer, et l'occasion de la prendre peut ne plus revenir, le Ciel nous l'offre icy, c'est à nous d'en profiter. Lors que l'honneur est blessé mortellement, on ne doit point songer à garder aucunes mesures, et si vous repugnez à prester vôtre bras à cette action, vous n'avez qu'à vous retirer, et laisser à ma main la gloire d'un tel sacrifice. perisses et...
D. CARLOS.
De grace, mon frere.... frere.
D. ALONSE.
Tous ces les discours sont superflus ; superflux, il faut qu'il qu’il meure.
D. CARLOS.
Arrestez-vous, Arrestez vous dis-je, mon frere, je ne souffriray point du tout qu'on attaque ses jours, qu’on attaque.... et je jure le Ciel que je le défendray deffendray icy contre qui que ce soit, et je sçauray luy faire un rempart rempar de cette mesme vie qu'il qu’il a sauvée, et pour adresser arrester vos coups, coups il faudra que vous me perciez. perciés.
D. ALONSE.
Quoy Quoy, vous prenez le party de nostre Ennemy ennemy contre moy, moy ? et loin d'estre saisi d’estre saisy, à son aspect aspect, des mesmes transports que je sens, vous faites voir pour luy des sentimens pleins de douceurs ? douceurs ?
D. CARLOS.
Mon frere, montrons de la moderation dans une action legitime, et ne vangeons point nostre honneur honeur avec cét cet emportement que vous témoignez. Ayons tesmoignés ; ayons du cœur dont nous soyons les maîtres, maistres, une valeur qui n'ait n’ait rien de farouche, et qui se porte aux choses par une pure deliberation de nostre raison, et non point par le mouvement d'une d’une aveugle colere. Je colere ; je ne veux point, point mon frere, demeurer frere demeurez redevable à mon Ennemy, ennemy, et je luy ay une obligation dont il faut que je m'acquite m’acquitte avant toute chose. Nostre vangeance chose : nostre vangeance, pour estre differée n'en n’en sera pas moins éclatante ; eclatante, au contraire, contraire elle en tirera de l'avantage, l’avantage, et cette occasion de l'avour pû l’avoir peu prendre, la fera paroistre plus juste aux yeux de tout le monde. juste.
D. ALONSE.
O l'étrange Ah l’estrange foiblesse, et l'aveuglement effroyable, d'hazarder ainsi l’aveuglement effroyable de hazarder ainsy les interests de son honneur pour la ridicule pensée d'une d’une obligation chimerique ! chimeriquée !
D. CARLOS.
Non, Non mon frere, ne vous mettez pas en peine ; peine, si je fais une faute, je sçauray bien la reparer, et reparer ; je me charge de tout le soin de nostre honneur, je sçay sçais à quoy il nous oblige, et cette suspension d'un d’un jour que ma reconnoissance reconnaissance luy demande, ne fera qu'augmenter l'ardeur qu’augmenter l’ardeur que j'ay j’ay de la le satisfaire. D. Juan, vous voyez que j'ay j’ay soin de vous rendre le bien qu j'ay que j’ay receu de vous, et e vous devez pouvés par là juger du reste, et croire que je m'acquite m’acquitte avec mesme chaleur de tout ce que je dois, et que je ne seray pas moins exact à vous payer l'injure l’injure que le bien-fait. Je bienfait : je ne veux point vous obliger à m’expliquer icy à expliquer vos sentimens, et je vous donne la liberté de penser à loisir aux resolutions que vous avez à prendre. Vous prendre ; vous connoissez assez assés la grandeur de l'offence l’offence que vous nous avez faite, et je vous fais juge vous mesme juges vous-mesmes des reparations qu'elle demande. Il qu’elle demande : il est des moyens doux pour nous satisfaire ; satisfaire, il en est de violens et de sanglans, sanglants ; mais enfin, quelque choix que vous fassiez, fassiés, vous m'avez m’avez donné parole de me faire faire raison par D. Juan, songez à me la faire, tenir je vous prie, et vous ressouvenez que hors d'icy d’icy je ne dois plus qu'à qu’à mon honneur.
D. JUAN.
Je n'ay n’ay rien exigé de vous, et je vous tiendray ce que j'ay j’ay promis.
D. CARLOS.
Allons, mon frere, un moment de douceur ne fait aucune injure à la severité de nostre devoir.
SCENE V.
D. JUAN, SGANARELLE.
D. JUAN.
Hola, hé, Holà, ho, Sganarelle.
SGANARELLE. SGAN.
Plaist-il ? Plaist il.
D. JUAN.
Comment, Comment coquin, tu fuis quand on m'attaque ? m’attaque ?
SGANARELLE. SGAN.
Pardonnez-moy, Pardonnez moy, Monsieur, je viens seulement d'icy d’icy prés, je croy crois que cét cet habit est purgatif, et que c'est c’est prendre medecine Medecine que de le porter.
D. JUAN.
Peste soit l'insolent, l’insolent, couvre au moins ta poltronnerie d'un poultronnerie d’un voile plus honneste, sçais-tu honneste ; sçais tu bien qui est que celuy à qui j'ay j’ay sauvé la vie.
SGANARELLE.
Moy ? non.
D. JUAN.
C'est un frere d'Elvire.
SGANARELLE.
Un....
D. JUAN.
Il vie est assez assés honneste homme, il en a bien usé, et j'ay j’ay regret d'avoir démêlé d’avoir du demeslé avec luy.
SGANARELLE. SGAN.
Il vous seroit aisé de pacifier toutes choses. toute chose.
D. JUAN.
Oüy, Ouy, mais ma passion est usée pour D. Elvire, Elvire et l'engagement l’engagement ne compatit point avec mon humeur. J'aime humeur ; j’ayme la liberté en amour, tu le sçais, et je ne sçaurois me resoudre à renfermer mon cœur entre quatre murailles. Je murailles, je te l'ay l’ay dit vingt fois, j'ay j’ay une pente naturelle à me laisser aller à tout ce qui m'attire. Mon m’attire, mon cœur est à toutes les belles, et c'est cest à elles à le prendre tour à tour, et à le garder tant qu'elles le pourront. Mais qu’elles pourront ; mais quel est le superbe Edifice edifice que je vois entre ces arbres ? arbres.
SGANARELLE. SGAN.
Vous ne le sçavez pas ? pas ?
D. JUAN.
Non vraiment. vraymént.
SGANARELLE. SGAN.
C'est Bon, c’est le Tombeau tombeau que le Commandeur faisoit faire lors que lorsque vous le tuastes. tuates.
D. JUAN.
Ah, tu as raison, je ne sçavois songeois pas que c'estoit c’estoit de ce costé-cy quil estoit. Tout costé qu’il estoit, tout le monde m'a m’a dit des merveilles de cét cet ouvrage, aussi bien que de la statuë statue du Commandeur, et j'ay j’ay envie de l'aller voir. l’aller veoir.
SGANARELLE. SGAN.
Monsieur, n'allez n’allez point là.
D. JUAN.
Pourquoy ? Pourquoy ?
SGANARELLE. SGAN.
Cela n'est n’est pas civil d'aller voir d’aller veoir un homme que vous avez avés tué.
D. JUAN.
Au contraire, c'est c’est une visite dont je luy veux faire civilité, et qu'il qu’il doit recevoir de bonne grace, s'il s’il est galant homme, homme ; allons, entrons dedans.
Le Tombeau s'ouvre, où l'on voit un superbe Mausolée, et la Statuë du Commandeur.
SGANARELLE. SGAN.
Ah, que cela est beau ! beau, les belles Statuës ! belle statues ! le beau marbre ! marbre, les beaux pilliers ! Piliers ! ah, que cela est beau, qu'en dites-vous, Monsieur ? qu’en dites vous Monsieur ?
D. JUAN.
Qu'on Qu’on ne peut voir veoir aller plus loin l'ambition d'un loing l’ambition d’un homme mort, et ce que je trouve admirable, c'est qu'un d’admirable c’est qu’un homme qui s'est s’est passé durant sa vie d'une assez d’une assés simple demeure, en veüille veuille avoir une si magnifique pour quand il n'en n’en a plus que faire.
SGANARELLE. SGAN.
Voicy Voyla la Statuë statue du Commandeur.
D. JUAN.
Parbleu, Parbleu le voila bon voyla beau, avec son habit d'Empereur d’Empereur Romain.
SGANARELLE. SGAN.
Ma foy, Monsieur, voila foy Monsieur voyla qui est bien fait. Il fait, il semble qu'il qu’il est en vie, et qu'il s'en qu’il s’en va parler. Il parler ; il jette des regards sur nous qui me feroient peur si j'estois j’estois tout seul, et je pense qu'il qu’il ne prend pas plaisir de à nous voir. veoir.
D. JUAN.
Il auroit tort, et ce seroit mal recevoir l'honneur l’honneur que je luy fais. Demande-luy s'il fais ; demande luy s’il veut venir souper avec moy. nous.
SGANARELLE. SGAN.
C'est un C’est une chose dont il n'a n’a pas besoin, besoin je croy. crois.
D. JUAN.
Demande-luy, Demande luy te dis-je.
SGANARELLE. SGAN.
Vous moquez-vous ? Ce moquez vous ? ce seroit estre fou que d'aller d’aller parler à une Statuë. statuë.
D. JUAN.
Fais Fay ce que je te dis.
SGANARELLE. SGAN.
Quelle bizarrerie ! bizarrerie ? Seigneur Commandeur..... je ry ris de ma sottise, sotise ; mais c'est c’est mon Maître Maistre qui me la fair faire. fait faire ; Seigneur Commandeur, mon Maître Maistre D. Juan vous demande si vous voulez luy faire l'honneur l’honneur de venir souper avec luy. luy.... ah.
La Statuë baisse la teste.
Ha !
D. JUAN.
Qu'est-ce ? qu'as-tu, Qu’est-ce ? qu’as-tu ? dy donc, veux-tu parler ? donc ? veux tu parler ?
SGANARELLE
fait le mesme signe
que luy a fait la Statuë, et baisse la teste. SGAN.
La Statuë.... statuë.
D. JUAN.
Et bien, que veux-tu dire, traistre ? traitre ?
SGANARELLE. SGAN.
Je vous dis que la Statuë.... statuë.
D. JUAN.
Et bien, bien la Statuë ? statuë, je t'assomme t’assomme si tu ne parles.
SGANARELLE. SGAN.
La Statuë m'a statuë m’a fait signe. Signe.
D. JUAN.
La peste le coquin. Coquin.
SGANARELLE. SGAN.
Elle m'a m’a fait signe, signe vous dis-je, il n'est n’est rien de plus vray. Allez-vous en luy vray, allez vous-en-luy parler vous-mesme pour voir ; peut-estre.... veoir, peut-estre.
D. JUAN.
Viens, Maraut, maraut, viens, je te veux bien faire toucher au doigt ta poltronnerie, Poltronnerie, prends garde. garde ; Le Seigneur Commandeur voudroit-il voudroit il venir souper avec moy. La Statuë baisse encore la teste . moy ?
SGANARELLE. SGAN.
Je ne voudrois pas en tenir dix pistolles. Et pistolles, eh bien, Monsieur ? Monsieur ?
D. JUAN.
Allons, sortons d'icy. d’icy.
SGAN.
SGANARELLE.
Voila Voyla de mes esprits forts qui ne veulent rien croire.
ACTE IV. QUATRIEME.
SCENE PREMIERE. I.
D. JUAN, SGANARELLE.
D. JUAN.
Quoy qu'il en soit, qu’il soit laissons cela, c'est c’est une bagatelle, et nous pouvons avoir esté trompez par un faux jour, ou surpris de quelque vapeur qui nous ait troublé la veuë.
SGANARELLE. SGAN.
Eh, Ah, Monsieur, ne cherchez cherchons point à démentir dementir ce que nous avons veu des yeux que voila. Il n'est voyla ; il n’est rien de plus veritable que ce signe de teste, et je ne doute point que le Ciel scandalizé scandalisé de vostre vie, n'ait vie n’ai produit ce miracle pour vous convaincre, et pour vous retirer de....
D. JUAN.
Ecoute. Tu m'importunes Ecoute, si tu m’importunes davantage de tes sottes moralitez, moralités, si tu me dis encore le moindre mot là-dessus, je vais appeller quelqu'un, quelqu’un, demander un nerf de bœuf, bœuf ; te faire tenir par trois ou quatre, et te roüer rouer de mille coups. M'entens-tu bien ? coups ; m’entens tu bien ?
SGANARELLE. SGAN.
Fort bien, Monsieur, le mieux du monde, monde ; vous vous expliquez clairement, c'est expliqués clairement ; c’est ce qu'il qu’il y a de bon en vous, que vous n'allez ne m’allés point chercher de détours, des tours, vous dites les choses avec une netteté admirable.
D. JUAN.
Allons, qu'on qu’on me fasse souper le plûtost que l'on plustost qu’on pourra, une chaise, chaize, petit garçon.
SCENE II.
D. JUAN, LA VIOLETTE, SGANARELLE. SGANAR.
LA VIOLETTE. laVIOLETTE.
Monsieur voila Monsieur, voyla vostre Marchand, marchand, Monsieur Dimanche, qui demande à vous parler.
SGANARELLE.
SGAN.
Bon, voila voyla ce qu'il qu’il nous faut qu'un complement faut, qu’un compliment de creancier ; de creancier. De quoy s'avise-t-il s’avise-t-il de nous venir demander de l'argent, l’argent, et que ne luy disois-tu que Monsieur n'y n’y est pas ? pas ?
LA VIOLETTE. laVIOLETTE.
Il y a trois quarts d'heure d’heure que je luy dis, mais il dis. Il ne veut pas le me croire, et s'est s’est assis là-dedans pour attendre. attandre.
SGANARELLE. SGAN.
Qu'il attende Qu’il attande tant qu'il qu’il voudra.
D. JUAN.
Non, au contraire, faites-le faites le entrer, c'est c’est une fort mauvaise politique que de se faire celer aux creanciers. Il creanciers ; il est bon de les payer de quelque chose, et j'ay j’ay le secret de les renvoyer satisfaits sans leur donner un double.
SCENE III.
D. JUAN, Mr MR. DIMANCHE, SGANARELLE, Suite . Suite.
D. JUAN
faisant de grandes civilitez. JUAN.
Ah, Monsieur Dimanche, approchez. Que approché ; que je suis ravy de vous voir, veoir, et que je veux de mal à mes gens de ne vous pas faire entrer d'abord ! j'avois donner d’abord ; j’avois donné ordre qu'on qu’on ne me fist parler à personne, mais cét cet ordre n'est n’est pas pour vous, et vous estes en droit de ne me trouver jamais de porte fermée chez moy.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Monsieur, Monsieur je vous suis fort obligé.
D. JUAN
parlant à ses Laquais. JUAN.
Parbleu, coquins, Coquin, je vous apprendray à laisser Monsieur Mr. Dimanche dans une antichambre, et je vous feray connoistre les gens.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Monsieur Monsieur, cela n'est n’est rien.
D. JUAN.
Comment ? Comment ? vous dire dirés que je n'y n’y suis pas, à Monsieur pas Mr. Dimanche, au meilleur de mes amis ? amis ?
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Monsieur, je suis vostre serviteur. J'estois venu... serviteur ; j’estois venu.
D. JUAN.
Allons, viste, un siege pour Monsieur Mr. Dimanche.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Monsieur, je suis bien comme cela.
D. JUAN.
Point, point, je veux que vous soyez assis contre comme moy.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Cela n'est point n’est pas necessaire.
D. JUAN.
Ostez ce pliant, et apportez un fauteüil. fauteuil.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Monsieur, vous vous moquez, et.... mocqués et...
D. JUAN.
Non, non, je sçay ce que je vous doy, dois, et je ne veux point qu'on mette qu’on mettre de difference entre nous deux.
Mr DIMANCHE. SGAN.
Monsieur.... Allons assoyez vous.
D. JUAN. Mr. DIMAN.
Allons, asseyez-vous.
Mr DIMANCHE.
Il n'est Ce n’est pas besoin, Monsieur, besoin Mr. et je n'ay qu'un n’ay qu’un mot à vous dire. J'estois.... J’estois...
D. JUAN.
Mettez-vous-là, Mettez vous là vous dis-je.
Mr DIMANCHE. DIMAN.
Non, Monsieur, je suis bien, je viens pour.... pour.
D. JUAN.
Non, je ne vous écoute point si vous n'estes n’este assis.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Monsieur, je fais ce que vous voulez. Je.... voulez, je...
D. JUAN.
Parbleu, Monsieur Dimanche, vous vous portez bien.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Oüy, Ouy Monsieur, pour vous rendre service. Je service ; je suis venu.... venu...
D. JUAN.
Vous avez un fonds fond de santé admirable, des levres fraisches, fresches, un teint vermeil, et des yeux vifs.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Je voudrois bien.... bien...
D. JUAN.
Comment se porte Madame Dimanche, Dimanche vostre Epouse ? espouse ?
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Fort bien, Monsieur, bien Monsieur Dieu mercy.
D. JUAN.
C'est C’est une brave femme.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Elle est vostre servante. Monsieur. Je venois.... servante Mr. je venois...
D. JUAN.
Et vostre petite fille Claudine, comment se porte-t-elle ? porte-t-elle ?
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Le mieux du monde.
D. JUAN.
La jolie Jolie petite fille que c'est ! c’est, je l'aime l’ayme de tout mon cœur.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
C'est C’est trop d'honneur d’honneur que vous luy faites, Monsieur. Je vous.... faites Monsr. je vous...
D. JUAN.
Et le petit Colin fait-il toûjours fait toujours bien du bruit avec son tambour ? tambour ?
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Toûjours de mesme, Monsieur. Je.... Toujours demesme Monsieur, je...
D. JUAN.
Et vostre petit chien Brusquet ? brusquet, gronde-t-il toûjours aussi fort, toujours aussy fort et mord-il toûjours mord il toujours bien aux jambes les gens qui vont chez vous ? vous ?
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Plus que jamais, jamais Monsieur, et nous vous ne sçaurions sçauriez en chevir.
D. JUAN.
Ne vous estonnez pas etonnés pas, si je m'informe m’informe des nouvelles de toute la vostre famille, car j'y prends j’y prens beaucoup d'interest. d’interest.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Nous vous sommes, Monsieur, Mr. infiniment obligez. Je.... obligez ;
D. JUAN
luy tendant la main. JUAN.
Touchez Touchés donc là, Monsieur Dimanche. Estes-vous là Mr. Dimanche, estes vous bien de mes amis ? amis ?
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Monsieur, je suis vostre serviteur.
D. JUAN.
Parbleu, Parbleu je suis à vous de tout mon cœur.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Vous m'honorez trop. Je.... m’honorés trop Mr. Je...
D. JUAN.
Il n'y n’y a rien que je ne fisse fasse pour vous.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Monsieur, vous avez trop de bonté pour moy.
D. JUAN.
Et cela sans interest, je vous prie de le croire.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Je n'ay n’ay point merité cette grace assurément, mais, Monsieur.... grace, Monsieur, mais Monsieur...
D. JUAN.
Oh, Oh ça, Monsieur Dimanche, sans façon, voulez-vous Mr. Dimanche, voulez vous souper avec moy ? moy ?
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Non, Non Monsieur, il faut que je m'en m’en retourne tout à l'heure. Je.... l’heure.
D. JUAN
se levant. JUAN.
Allons, viste viste, un flambeau pour conduire Monsieur Monsr. Dimanche, et que quatre ou cinq de mes gens prennent des mousquetons pour l'escorter. l’escorter.
Mr DIMANCHE
se levant de mesme. Mr. DIMAN.
Monsieur, il n'est Il n’est pas necessaire, et je m'en m’en iray bien tout seul. Mais.... Mais.....
Sganarelle oste les sieges promptement.
D. JUAN.
Comment ? Comment ? je veux qu'on que l’on vous escorte, et je m'interesse m’interesse trop à vostre personne, je suis vostre serviteur, et de plus vostre debiteur.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Ah, Monsieur.... Ah Monsieur !
D. JUAN.
C'est C’est une chose que je ne cache pas, et je le dis à tout le monde.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Si.... Si.
D. JUAN.
Voulez-vous Voulez vous que je vous reconduise ? reconduise.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Ah, Monsieur, Ah Mr., vous vous moquez. Monsieur.... mocquez. Mais...
D. JUAN.
Embrassez-moy Embrassez moy donc, s'il s’il vous plaist, plait ; je vous prie encore une fois d'estre d’estre persuadé que je suis tout à vous, et qu'il n'y qu’il n’y a rien au monde que je ne fisse fasse pour vostre service. Il sort .
SGANARELLE. SGAN.
Il faut avouer que vous avez en Monsieur un homme qui vous aime ayme bien.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Il est vray, il me fait tant de civilitez civilités, et tant de complimens que je ne luy sçaurois jamais luy demander de l'argent. l’argent.
SGANARELLE. SGAN.
Je vous assure asseure que toute sa la maison periroit pour vousn vous, et je voudrois qu'il qu’il vous arrivast quelque chose, que quelqu'un s'avisast quelqu’un s’avisast de vous donner des coups de baston, vous verriez de quelle maniere..... maniere.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Je le croy, mais, croy ; mais Sganarelle, je vous prie de luy dire un petit mot de mon argent.
SGANARELLE. SGAN.
Oh, Oh ne vous mettez mettés pas en peine. Il peine, il vous payera payra le mieux du monde.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Mais vous, Sganarelle, vous me devez quelque chose en vostre particulier.
SGANARELLE. SGAN.
Fy, ne parlez pas de cela.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Comment ? je.... Comment. Je...
SGANARELLE. SGAN.
Ne sçais-je sçay-je pas bien que je vous dois.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Oüy, mais.... Ouy, Mais...
SGANARELLE. SGAN.
Allons, Monsieur Allons Mr. Dimanche, je vais vous éclairer. éclairer :
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Mais mon argent.... argent ?
SGANARELLE
prenant Monsieur Dimanche par le bras. SGAN.
Vous moquez-vous ? moquez vous ?
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Je veux.... veux.
SGANARELLE
le tirant. SGAN.
Eh.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
J'entends.... J’entens.
SGANARELLE
le poussant. SGAN.
Bagatelles.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Mais.... Mais.
SGANARELLE
le poussant. SGAN.
Fy.
Mr DIMANCHE. Mr. DIMAN.
Je.... De.
SGANARELLE
le poussant tout à fait hors du Theatre. SGAN.
Fy, Fy vous dis-je.
SCENE IV.
D. LOUIS, D. JUAN, LA VIOLETE, SGANARELLE. SGANA., VIOLETTE.
LA VIOLETE. laVIOLETTE.
Monsieur, voila Mr. voyla Monsieur vostre pere. Pere.
D. JUAN.
Ah, Ah me voicy bien, bien ! il me falloit cette visite pour me faire enrager.
D. LOUIS.
Je vois voy bien que je vous embarasse, embarrasse, et que vous vous passeriez fort aisement aysement de ma venuë. A venue : à dire vray, vray nous nous incommodons estrangement l'un et l'autre, l’un l’autre, et si vous estes las de me voir, veoir, je suis bien las aussi aussy de vos déportemens. Helas, deportemens ; helas ! que nous sçavons peu ce que nous faisons, quand nous ne laissons pas au Ciel le soin des choses qu'il qu’il nous faut, donne, quand nous voulons estre plus avisez avisés que luy, et que nous venons à l'importuner l’importuner par nos souhaits aveugles, aveugles et nos demandes inconsiderées ! J'ay souhaité inconsiderées ! j’ay souhaitté un fils avec des ardeurs nompareilles, je l'ay l’ay demandé sans relasche relâche avec des transports incroyables, incroyables ; et ce fils fils, que j'obtiens, j’obtiens en fatiguant le Ciel de vœux, est le chagrin et le supplice de cette vie mesme vie dont je croyois qu'il qu’il devoit estre la joye et la consolation. consolation : De quel œil, à vostre avis, pensez-vous pensés vous que je puisse voir cét cet amas d'actions indignes d’actions indignes, dont on a peine aux yeux du u monde d'adoucir d’adoucir le mauvais visage, visage ? cette fuite continuelle suite continue de méchantes méchans affaires, qui nous reduisent à toutes heures toute heure à lasser les bontez la bonté du Souverain, et qui ont épuisé espuisé auprés de luy le merite de mes services, services et le credit de mes amis ? ah, amys ? ah quelle bassesse est la vostre ! vostre ! ne rougissez-vous rougissez vous point de meriter si peu vostre naissance ? estes-vous naissance ; estes vous en droit, dites-moy, d'en dites moy, d’en tirer quelque vanité ? Et qu'avez-vous vanité ? et qu’avez vous fait dans le monde pour estre Gentilhomme ? Gentilhomme ? croyez-vous qu'il qu’il suffise d'en d’en porter le nom et les armes, et que ce nous soit une gloire d'estre sorty d'un d’estre sorti d’un sang noble, lors que lorsque nous vivons en infames ? infames ? non, non, la naissance n'est n’est rien où la vertu n'est pas. Aussi n’est pas ; ainsy nous n'avons n’avons part à la gloire de nos Ancestres, qu'autant ancestres qu’autant que nous nous efforçons de leur ressembler, et cét cet éclat de leurs actions qu'il qu’ils répandent sur nous, nous impose un engagement de leur faire le mesme honneur, de suivre les pas qu'ils qu’ils nous tracent, et de ne point degenerer de leurs vertu, vertus, si nous voulons estre estimez leurs veritables descendans. Ainsi Ainsy vous descendez en vain des Ayeux ayeux dont vous estes né, ils vous desavoüent desavouent pour leur sang, et tout ce qu'ils qu’ils ont fait d'illustre d’illustre ne vous donne aucun avantage, avantage ; au contraire, l'éclat n'en contraire l’esclat n’en rejaillit sur vous qu'à vostre nous qu’à nostre deshonneur, et leur gloire est un flambeau qui éclaire aux yeux d'un d’un chacun la honte de vos actions. Apprenez enfin qu'un Apprenés encore qu’un Gentilhomme qui vit mal, est un monstre dans la nature, que la vertu est le premier titre permier tître de Noblesse, noblesse, que je regarde bien moins au nom qu'on qu’on signe, qu'aux qu’aux actions qu'on qu’on fait, et que je ferois plus d'estat du d’estat d’un fils d'un Corcheteur, d’un crocheteur qui seroit honneste homme, que du fils d'un d’un Monarque qui vivroit comme vous.
D. JUAN.
Monsieur, si vous estiez assis, vous en seriez bien mieux pour parler.
D. LOUIS.
Non, insolent, je ne veux point m'asseoir, m’asseoir ny parler davantage, et je vois bien que toutes mes paroles ne font rien sur ton ame ; ame ; mais sçache, fils indigne, que la tendresse paternelle est poussée à bout par tes actions, que je ne sçauray, sçauray plustost que tu ne penses, penses mettre une cette borne à tes déreglemens, dereglemens, prevenir sur toy le courroux du Ciel, et laver par ta punition la honte de t'avoir t’avoir fait naistre. naitre.
Il sort.
SCENE V.
D. JUAN, SGANARELLE.
D. JUAN.
Eh, moures Eh mourez, le plûtost plustost que vous pourrez, c'est c’est le mieux que vous puissiez faire. Il faire ; il faut que chacun ait vive son tour, et j'enrage j’enrage de voir veoir que des peres qui Peres vivent autant que leurs fils.
Il se met dans son fauteüil.
SGANARELLE. SGAN.
Ah, Ah Monsieur, vous avez tort.
D. JUAN.
J'ay tort ? J’ay tort.
SGANARELLE. SGAN.
Monsieur.
D. JUAN
se leve de son siege. JUAN.
J'ay tort ? J’ay tort.
SGANARELLE. SGAN.
Oüy, Ouy Monsieur, vous avez tort d'avoir d’avoir souffert ce qu'il qu’il vous a dit, et vous le deviez mettre dehors par les épaules. A-t-on espaules ; a-t-on jamais rien veu de plus impertinent ? impertinent ? un pere venir faire des remontrances à son filsn fils, et luy dire de corriger ses actions, de ce ressouvenir se resouvenir de sa naissance, de mener un une vie d'honneste d’honneste homme, et cent autres sottises de pareille nature. Cela nature ; cela se peut-il peut il souffrir à un homme comme vous, vous qui sçavez comme il faut vivre ? J'admire vivre ? j’admire vostre patience, et si j'avois j’avois esté en vostre place, je l'aurois l’aurois envoyé promener. promener ; O complaisance maudite, complaisant maudit, à quoy me reduis-tu . reduis tu ?
D. JUAN.
Me fera-t-on souper bien-tost ? bientost ?
SCENE VI.
D. JUAN, D. ELVIRE, RAGOTIN, SGANARELLE.
RAGOTIN.
Monsieur, voicy voyci une Dame voilé voylée qui vient vous parler.
D. JUAN.
Que pourroit-ce estre ? estre ?
SGANARELLE. SGAN.
Il faut voir. veoir.
D. ELVIRE.
Ne soyez point surpris, surpris D. Juan, Juan de me voir à cette heure heure, et dans cét équipage. C'est cet equipage ; C’est un motif pressant qui m'oblige m’oblige à cette visite, et ce que j'ay j’ay à vous dire ne veut point du tout tous de retardement. Je retardement ;je ne viens point icy ici pleine de ce couroux courroux, que j'ay j’ay tantost fait éclater, et vous me voyez bien changée de ce que j'estois j’estois ce matin. Ce n'est matin ; ce n’est plus cette D. Elvire qui faisait faisoit des vœux contre vous, et dont l'ame l’ame irritée ne jettoit que menaces, et ne respiroit que vangeance. Le vangeance : le Ciel a banny banni de mon ame toutes ces indignes ardeurs que je sentois pour vous, tous ces transports tumultueux d'un d’un attachement criminel, tous ces honteux emportemens d'un d’un amour terrestre terrestre, et grossier, et il n'a n’a laissé dans mon cœur pour vous qu'une flâme épurée vous, qu’une flamme espurée de tout le commerce des sens, une tendresse toute sainte, un amour détaché detaché de tout, qui n'agit n’agit point pour soy, et ne se met en peine que de vostre interest.
D. JUAN
à Sganarelle. Sgana.
Tu pleures, je pense.
SGANARELLE. SGAN.
Pardonnez-moy. Pardonnés moy.
D. ELVIRE.
C'est C’est ce parfait et pur amour qui me conduit icy pour vostre bien, pour vous faire part d'un d’un avis du Ciel, et tâcher tascher de vous retirer du precipice où vous courez. Oüy, courez ; ouy D. Juan, Juan je sçay tous les déreglemens dereglemens de vostre vie, et ce mesme Ciel qui m'a m’a touché le cœur, et fait jetter les yeux sur les égaremens egaremens de ma conduite, m'a m’a inspiré de vous venir trouver, et de vous dire de sa part part, que vos offences ont épuisé espuisé sa misericorde, que sa colere redoutable est preste de tomber sur vous, qu'il qu’il est en vous de l'éviter l’eviter par un prompt repentir, repentir ; et que peut-estre vous n'avez n’avez pas encore un jour à vous, pour vous pouvoir soustraire au plus grand de tous les malheurs. Pour moy, malheurs ; pour moy je ne tiens plus à vous par aucun un attachement du monde. Je monde, je suis revenuë, graces grace au Ciel, de toutes mes foles pensées, folles pensées ; ma retraite est resoluë, resoluë et je ne demande qu'assez qu’assés de vie pour pouvoir expier la faute que j'ay j’ay faite, et meriter meriter, par une austere penitence penitence, le pardon de l'aveuglement l’aveuglement où m'ont m’ont plongée les transports d'une d’une passion condamnable ; condamnable : mais dans cette retraite, j'aurois retraite j’auray une douleur extrême qu'une personne qu’une personne, que j'ay j’ay cherie tendrement, devint devinst un exemple funeste de la Justice justice du Ciel, et ce me sera une joye incroyable, si je puis vous y porter à détourner et detourner de dessus vostre teste, l'épouvantable teste l’epouvantable coup qui vous menace. De grace, grace D. Juan, accordez-moy Juan accordés moy pour derniere faveur cette douce consolation, ne me refusez point vostre salut, que je vous demande avec larmes, larmes ; et si vous n'estes n’estes point touché de vostre interest ; soyez-le interest, soyez le au moins de mes prieres, et m'épargnez m’espargnez le cruel déplaisir deplaisir de vous voir condamner veoir condamné à des supplices éternels. eternels.
SGANARELLE. SGAN.
Pauvre femme ! Pôvre femme.
D. ELVIRE.
Je vous ay aimé aymé avec une tendresse extréme, extreme, rien au monde ne m'a m’a esté si cher que vous, j'ay j’ay oublié mon devoir pour vous, j'ay j’ay fait toutes choses pour vous, vous ; et toute la recompense que je vous en demande, c'est demande c’est de corriger vostre vie, et de prevenir vostre perte. Sauvez-vous, Sauvez vous je vous prie, ou pour l'amour l’amour de vous, moy, ou pour l'amour l’amour de moy. vous. Encore une fois, fois D. Juan, je vous le demande avec larmes, et si ce n'est assez n’est assés des larmes d'une d’une personne que vous avez aimée, aymée, je vous en conjure par tout ce qui est le qu’il y a de plus capable de pour vous toucher.
SGANARELLE. SGAN.
Cœur de tigre ! tygre.
D. ELVIRE.
Je m'en m’en vais aprés ce ces discours, et voila voyla tout ce que j'avois j’avois à vous dire.
D. JUAN.
Madame, Madame il est tard, demeurez demeurés icy, on vous y logera le mieux qu'on que l’on pourra.
D. ELVIRE.
Non, Non D. Juan, ne me retenez retenés pas davantage.
D. JUAN.
Madame, vous me ferez ferés plaisir de demeurer, demeurer icy, je vous assure. asseure.
D. ELVIRE.
Non, Non vous dis-je, ne perdons point de temps tems en discours superflus, laissez-moy superflux, laissés-moy viste aller, ne faites aucune instance pour me conduire, et songez songés seulement à profiter de mon avis.
SCENE VII.
D. JUAN, SGANARELLE, Suite . Suite.
D. JUAN.
Scais-tu bien que j'ay j’ay encore senty quelque peu d'émotion d’émotion pour elle, que j'ay j’ay trouvé de l'agrément l’agrêment dans cette nouveauté bizarre, et que son habit negligé, son air languissant, languissant et ses larmes ont réveillé reveillé en moy quelques petits restes d'un de feu éteint. esteint ?
SGANARELLE. SGAN.
C'est C’est à dire que ses ces paroles n'ont n’ont fait aucun effet sur vous. effect sur.
D. JUAN.
Viste à souper.
SGANARELLE. SGAN.
Fort bien.
D. JUAN
se mettant à table. JUAN.
Sganarelle, il Sgana. Il faut songer à s'amender s’amender pourtant.
SGANARELLE. SGAN.
Oüy dea. Ouyda
D. JUAN.
Oüy, Ouy ma foy, il faut s'amender, encore s’amender encor vingt ou trente ans de cette vie cy, vie-cy, et puis nous songerons à nous.
SGANARELLE. SGAN.
Oh. Eh.
D. JUAN.
Qu'en dis-tu ? Qu’en dis-tu ?
SGANARELLE. SGAN.
Rien, voila voyla le soupé.
Il prend un morceau d'un d’un des plats qu'on apporte, et le met dans
à sa bouche.
D. JUAN.
Il me semble que tu as la joüe enflée, qu'est-ce joue enflée ; qu’est-ce que c'est ? c’est, parle donc, qu'as-tu là ? qu’as-tu là ?
SGANARELLE. SGAN.
Rien.
D. JUAN.
Montre un peu, parbleu c'est c’est une fluxion qui luy lui est tombée sur la joüe, joue, viste une lancette pour percer cela. Le pauvre cela, le pôvre garçon n'en n’en peut plus, et cét cet abcez le pourroit étouffer, attends, voyez estoufer, attends voycy comme il estoit meur. Ah, meur, ah coquin que vous estes.
SGANARELLE. SGAN.
Ma foy, Monsieur, foy Monsieur je voulois voir si vostre cuisinier n'avait pas trop cuisiniere n’avoit point mis trop de sel, sel ou trop de poivre.
D. JUAN.
Allons, mets-toy Allons mets toy là, et mange. J'ay mange, j’ay affaire de toy quand j'auray j’auray soupé, tu as faim à ce que je voy. vois.
SGANARELLE
se met à table. SGAN.
Je le croy bien, Monsieur, je n'ay n’ay point mangé depuis ce matin. Tastez le matin, tastés de cela, voila voyla qui est le meilleur du monde.
Un laquais oste les assiettes de Sganarelle d'abord qu'il y a dessus à manger.
Mon assiette, monde, mon assiete, mon assiette. Tout doux, s'il assiete, tout doux s’il vous plaist. Vertubleu, plaist, vertubleu petit Compere, compere que vous estes habile à donner des assiettes nettes, assietes, et vous petit la Violete, La Violette que vous sçavez presenter à boire à propos.
Pendant qu'un laquais donne à boire à Sganarelle, l'autre laquais oste encore son assiette.
D. JUAN.
Qui peut fraper de cette sorte ? sorte ?
SGANARELLE. SGAN.
Qui diable Diable nous vient troubler dans nostre repas ? repas ?
D. JUAN.
Je veux souper en repos au moins, et qu'on qu’on ne laisse entrer personne.
SGANARELLE. SGAN.
Laissez-moy Laissés moy faire, je m'y m’y en vais moy-mesme.
D. JUAN.
Qu'est-ce donc ? qu'y a-t-il ? Qu’est-ce donc, qui a-t-il là.
SGANARELLE SGAN.
baissant la teste comme fait la Statuë. teste.
Le.... Le... qui est là ! là.
D. JUAN.
Allons voir, et montrons que rien ne me sçauroit ébranler.
SGANARELLE. SGAN.
Ah, pauvre Sganarelle, Ah pôvre Sganarelle ! où te cacheras-tu ? cacheras tu ?
SCENE VIII.
D. JUAN, LA STATUE du Commandeur
qui vient se mettre à table . Commandeur, SGANAR., Suite.
D. JUAN.
Une chaise chaire et un couvert, viste donc,
à Sganarelle.
Allons, mets-toy allons, mets toy à table.
SGANARELLE. SGAN.
Monsieur, je n'ay n’ay plus de faim.
D. JUAN.
Mets-toy Mets toy là te dis-je. A boire. A dis-je, à boire à la santé Santé du Commandeur, je te la porte, Sganarelle. Qu'on lui porte Sganarelle, qu’on luy donne du vin.
SGANARELLE. SGAN.
Monsieur, Monsieur je n'ay n’ay pas soif.
D. JUAN.
Bois Bois, et chante ta la chanson pour regaler le Commandeur.
SGANARELLE. SGAN.
Je sui enrumé, Monsieur. suis enrheumé Mr.
D. JUAN.
Il n'importe, allons. Vous n’importe, allons, vous autres venez, venez accompagnez sa voix.
LA STATUE. STATUE.
D. Juan, c'est assez, c’est assés, je vous invite à venir demain souper avec-moy, souper avec moy, en aurez-vous aurez vous le courage ? courage ?
D. JUAN.
Oüy, j'iray Ouy j’iray accompagné du seul Sganarelle.
SGANARELLE. SGAN.
Je vous rends grace, il est demain jeusne jeune pour moy.
D. JUAN
à Sganarelle. Sgana.
Prends Prens ce flambeau.
LA STATUE. STATUE.
On n'a n’a pas besoin de lumière, lumieres quand on est conduit par le Ciel.
ACTE V. CINQUIEME.
SCENE PREMIERE. I.
D. LOUIS, D. JUAN, SGANARELLE. SGANA.
D. LOUIS.
Quoy, mon fils, seroit-il possible que la bonté du Ciel eust exaucé mes vœux ? Ce vœux ? ce que vous me dites est-il est il bien vray ? vray ? ne m'abusez-vous m’abusés vous point d'un d’un faux espoir, et puis-je prendre quelque assurance asseurance sur la nouveauté surprenante d'une d’une telle conviction ? conversion ?
D. JUAN
faisant l'hipocrite. JUAN.
Oüy, Ouy, vous me voyez revenu de toutes mes erreurs, je ne suis plus le mesme d'hier d’hier au soir, et le Ciel tout d'un d’un coup a fait en moy un changement qui va surprendre tout le monde. Il monde, il a touché mon ame, ame et dessillé mes yeux, et je regarde avec horreur le long aveuglement dereglement où j'ay esté ; j’ay esté, et les desordres criminels de la vie que j'ay menée. J'en j’ay menée ; j’en repasse dans mon esprit toutes les abominations, et m'estonne m’etonne comme le Ciel les a pû apeu souffrir si long-temps, long tems, et n'a n’a pas vingt fois sur ma teste laissé tombé tomber les coups de sa Justice redoutable. Je voy justice redoutable ; je vois les graces que sa bonté m'a m’a faites en ne me punissant point de mes crimes, et je pretends pretens en profiter comme je doy, dois, faire éclater eclater aux yeux du de tout le monde un soudain changement de vie, reparer par là le scandale de mes actions passées, et m'efforcer d'en m’efforcer d’en obtenir du Ciel une pleine remission. C'est plaine remission ; c’est à quoy je vais vay travailler, et je vous prie, Monsieur, de vouloir bien contribuer à ce dessein, et de m'aider vous mesme m’ayder vous-mesme à faire le un choix d'une d’une personne qui me serve de guide, et sous la conduite de qui je puisse marcher seurement dans le chemin où je m'en vais entrer.
D. LOUIS.
Ah, Ah mon fils, que la tendresse d'un d’un pere est aisément facilement rappellée, et que les offences d'un offenses d’un fils s'évanoüissent s’evanouissent viste au moindre mot de repentir ! Je repentir ! je ne me souviens plus déja de tous les déplaisirs que vous m'avez donnez, m’avés donnés, et tout est effacé par les paroles que vous venez de me faire entendre. Je entendre ; je ne me sens pas, je l'avoüe, l’avouë, je jette des larmes de joye, tous mes vœux sont satisfaits, et je n'ay n’ay plus rien desormais à demander au Ciel. Embrassez-moy, mon fils, Ciel ; embrassez moy et persistez, persistez je vous conjure, conjure dans cette loüable pensée. Pour moy, j'en vais louable pensée ; pour moy je m’en vay tout de ce pas porter l'heureuse l’heureuse nouvelle à vostre mere, partager avec elle les doux transports du de ravissement où je suis, et rendre grace au Ciel des saintes sainte resolutions qu'il qu’il a daigné vous inspirer.
SCENE II.
D. JUAN, SGANARELLE.
SGANARELLE.
Ah, Monsieur, Ah Monsieur ! que j'ay j’ay de joye de vous voir converty ! veoir converti ; il y a long-temps long temps que j'attendois j’attendois cela, et voila, voyla, grace au Ciel, tous mes souhaits sont accomplis.
D. JUAN.
La peste, peste le benest.
SGANARELLE. SGAN.
Comment, Comme, le benest ? benest.
D. JUAN.
Quoy ? Quoy, tu prends prens pour de bons bon argent ce que je viens de dire, et tu crois que ma bouche estoit d'accord est d’accord avec mon cœur ? cœur ?
SGANARELLE. SGAN.
Quoy, Quoy ? ce n'est pas.... n’est pas... vous ne.... vostre.... oh vostre... eh quel homme ! homme, quel homme ! homme, quel homme ! homme !
D. JUAN.
Non, non, je ne suis point changé, et mes sentimens sont toûjours toujours les mesmes.
SGANARELLE. SGAN.
Vous ne vous rendez pas à sur la surprenante merveille de cette Statuë mouvante et parlante ? parlante ?
D. JUAN.
Il y a bien quelque chose là-dedans que je ne comprends pas, comprens pas ; mais quoy que ce puisse estre, cela n'est n’est pas capable, capable ny de convaincre mon esprit, esprit ny d'ébranler d’esbranler mon ame, et si j'ay j’ay dit que je voulois corriger ma conduite, et me jetter dans un train de vie exemplaire, c'est c’est un dessein que j'ay j’ay formé par pure politique, un stratageme utile, une grimace necessaire, necessaire où je veux me contraindre pour ménager en menager un pere dont j'ay j’ay besoin, et me mettre à couvert du costé des hommes de cent fâcheuses fascheuses avantures qui pourroient m'arriver. Je m’arriver ; je veux bien, Sganarelle, t'en bien Sgana. t’en faire confidence, et je suis bien aise d'avoir bien-aise d’avoir un témoins tesmoin du fond de mon ame, et des véritables veritables motifs qui m'obligent m’obligent à faire les choses.
SGANARELLE. SGAN.
Quoy ? toûjours libertin Quoy, vous ne croyez rien du tout, et débauché, vous voulez cependant vous eriger en homme de bien ? bien ?
D. JUAN.
Et Eh pourquoy non ? non ? il y en a tant d'autres d’autres comme moy moy, qui se mélent melent de ce métier, mestier, et qui se servent du mesme masque pour abuser le monde.
SGANARELLE. SGAN.
Ah, Ah quel homme ! homme ! quel homme ! homme !
D. JUAN.
Il n'y ny a plus de honte maintenant à cela, l'Hipocrisie l’hypocrisie est un vice à la mode, et tous les vices à la mode passent pour vertus. La des vertus, le personnage d’homme de bien est le meilleur de tous les personnages qu’on puisse jouer, aujourd’huy la profession d'Hipocrite d’hypocrite a de merveilleux avantages. C'est avantages, c’est un art de qui l'imposture l’imposture est toûjours tousjours respectée, et quoy qu'on qu’on la découvre, decouvre on n'ose n’oze rien dire contr'elle. Tous contre elle, tous les autres vices des hommes sont exposez exposés à la censure, et chacun a la liberté de les attaquer hautement, mais l'Hipocrisie l’hypocrisie est un vice privilegié, privilegié qui de sa main ferme la bouche à tout le monde, et joüit jouït en repos d'une d’une impunité souveraine. On souveraine ; on lie à force de grimace grimaces une societé étroite estroite avec tous les gens du party ; party, qui en choque un, un se les attire jette tous sur les bras, et ceux que l'on l’on sçait mesme agir de bonne foy là-dessus, là-dessus et que chacun connoist pour étre estre veritablement touchez : ceux-là, dis-je, touchez, ceux-là dis-je sont le plus souvent tousjours les dupes des autres, ils donnent bonnement hautement dans le panneau des grimaciers, et appuyent aveuglément aveuglement les singes de leurs actions. Combien actions : combien crois-tu que j'en connoisse, j’en connoisse qui par ce stratageme ont rhabillé adroitement les desordres de leur jeunesse, qui se sont fait un bouclier du manteau de la religion, et sous un dehors respecté, cet habit respecté ont la permission d'estre d’estre les plus méchans mechans hommes du monde ? on a monde ; ô qu’il est beau à sçavoir leurs intrigues, intrigues et les connoistre connoitre pour ce qu'ils qu’ils sont, ils ne laissent pas pour cela d'estre d’estre en credit parmy les gens, et quelque baissement de teste, un soûpir mortifié, soupir mortifié et deux roulemens d'yeux d’yeux rajustent dans le monde tout ce qu'ils qu’ils peuvent faire. C'est faire ; c’est sous cét cet abry favorable que je veux me sauver et mettre en seureté mes affaires. Je affaires, je ne quitteray point mes douces doues habitudes, mais j'auray j’auray soin de me cacher, cacher et me divertiray à petit bruit. Que bruit, que si je viens à estre découvert, decouvert, je verray sans me remuer prendre mes interests à toute ma cabale, et je seray défendu defendu par elle envers, envers et contre tous. Enfin, c'est là tous ; enfin c’est le vray moyen de faire impunément impunement tout ce que je voudray. Je m'érigeray voudray, je m’erigeray en censeur des actions d'autruy, d’autruy, je jugeray mal de tout le monde, monde et n'auray n’auray bonne opinion que de moy. Dés qu'une moy ; des qu’une fois on m'aura m’aura choqué tant soit peu, peu je ne pardonneray jamais, et garderay tout doucement une haine irreconciliable. Je irreconciliable ; je feray le vangeur de la vertu opprimée, des interests du Ciel, et sous ce pretexte commode, commode je pousseray mes Ennemis, ennemis, je les accuseray d'impiété, d’impieté, et sçauray déchaîner contr'eux dechainer contre eux des zelez indiscrets, Zelés indiscrets qui sans connoissance de cause crieront contr'eux. en public aprés eux, qui les accableront d'injures, d’injures, et les damneront hautement de leur authorité privée. C'est ainsi qu'il privée, c’est ainsy qu’il faut profiter des foiblesses des hommes, et qu'un qu’un sage esprit s'accommode s’accommode aux vices de son siecle.
SGANARELLE. SGAN.
O Ciel ! qu'entends-je icy ? Ciel, qu’entends je icy ! il ne vous manquoit manque plus que d'estre Hipocrite d’estre hypocrite pour vous achever de tout point, tous points, et voila voyla le comble des abominations. Monsieur, Monsieur cette derniere cy m'emporte, derniere-icy m’importe, et je ne puis m'empescher m’empescher de parler. Faites parler, faites moy tout ce qu'il qu’il vous plaira, batez-moy, assommez-moy battez moy, assommez moy de coups, tuez-moy, tuez moy si vous voulez, il faut que je décharge decharge mon cœur, et qu'en Valet fidele qu’en valet fidelle je vous dise ce que je dois. Sçachez, Monsieur, Sçachez Monsieur que tant va la cruche à l'eau, qu'enfin l’eau qu’enfin elle se brise : s’y brise, et comme dit fort bien cét Auteur cet autheur que je ne connois pas, l'homme que l’homme est en ce monde ainsi ainsy que l'oiseau l’oiseau sur la branche, la branche est attachée à l'arbre, l’arbre, qui s'attache s’attache à l'arbre l’arbre suit de bons preceptes, preceptes : les bons preceptes valent mieux que les belles paroles, les belles paroles se trouvent à la Cour. A Cour, à la Cour sont les Courtisans, les Courtisans suivent la mode, la mode vient de la fantaisie, la fantaisie est une faculté de l'ame, l'ame l’ame est ce qui nous donne la vie, la vie finit par la mort... hé... songez à ce que mort, la mort nous fait penser au Ciel, le Ciel est au dessus de la terre, la terre n’est point la mer, la mer est sujette aux orages, les orages tourmentent les vaisseaux, les vaisseaux ont besoin d’un bon pilote, un bon pilote a de la prudence, la prudence n’est point dans les jeunes gens, les jeunes gens doivent obeïssance aux vieux, les vieux ayment les richesses, les richesses font les riches, les riches ne sont pas pôvres, les pôvres ont de la necessité, la necessité n’a point de loy, qui n’a point de loy vit en beste brute, et par consequent vous deviendrez. serez damné à tous les Diables.
D. JUAN.
O le beau raisonnement ! raisonnement !
SGANARELLE. SGAN.
Aprés cela, si vous ne vous rendez, tant pis pour vous.
SCENE III.
D. CARLOS, D. JUAN, SGANARELLE. SGANA.
D. CARLOS.
Dom Juan, D. Juan je vous trouve à propos, et suis bien aise de vous parler icy plûtost plustost que chez vous, pour vous demander vos resolutions. Vous resolutions ; vous sçavez que ce soin me regarde, et que je me suis en vostre presence chargé de cette affaire. Pour moy, affaire, pour moy je n ne le cele point, je souhaite souhaitte fort que les choses aillent dans la douceur, et s'il n'y il n’y a rien que je ne fasse pour porter vostre esprit à vouloir prendre cette voye, et pour vous voir publiquement confirmer à ma sœur confirmer le nom de vostre femme.
D. JUAN
d'un ton hipocrite. JUAN.
Helas ! Helas ! je voudrois bien de tout mon cœur vous donner la satisfaction que vous souhaitez, souhaittez, mais le Ciel s'y s’y oppose directement, et il a inspiré à mon ame le dessein de changer de vie, et je n'ay n’ay point d'autres pensées d’autre pensée maintenant que de quitter entierement tous les attachements attachemens du monde, de me dépoüiller depouiller au plútost plustost de toutes sortes de vanitez, vanités, et de corriger desormais desormais, par une austere conduite tous les déreglemens dereglemens criminels où m'a m’a porté le feu d'une d’une aveugle jeunesse.
D. CARLOS.
Ce dessein, D. Juan, ne choque point ce que je dis, dis et la compagnie d'une d’une femme legitime peut bien s'accommoder s’accommoder avec les loüables louables pensées que le Ciel vous inspire. imprime.
D. JUAN.
Helas Helas, point du tout, c'est c’est un dessein que vostre sœur elle-mesme a pris, pris ; elle a resolu sa retraite, et nous avons esté touchez touchés tous deux en mesme temps.
D. CARLOS.
Sa retraite ne en peut nous satisfaire, pouvant estre imputée au mépris que vous feriez d'elle faites d’elle et de nôtre, nostre famille, et nostre honneur demande qu'elle qu’elle vive avec vous. nous.
D. JUAN.
Je vous assure asseure que cela ne se peut, j'en j’en avois pour moy toutes les envies du monde, et je me suis mesme encore aujourd'huy aujourd’huy conseillé au Ciel pour cela ; cela ; mais lors que lorsque je l'ay consulté, j'ay l’ay consulté j’ay entendu une vois voix qui m'a m’a dit que je ne devois point songer à vostre sœur, et qu'avec qu’avec elle assurément asseurement je ne ferois point mon salut.
D. CARLOS.
Croyez-vous, D. Juan, nous ébloüir esblouit par ces belles excuses ? excuses ?
D. JUAN.
J'obeïs J’obeïs à la voix du Ciel.
D. CARLOS.
Quoy Quoy, vous voulez que je me paye d'un d’un semblable discours ? discours ?
D. JUAN.
C'est C’est le Ciel qui le veut ainsi. ainsy.
D. CARLOS.
Vous aurez fait sortir ma sœur d'un Convent d’un convent pour la laisser ensuite ? ensuite ?
D. JUAN.
Le Ciel l'ordonne l’ordonne de la sorte.
D. CARLOS.
Nous souffrirons cette tache en nostre famille ? famille ?
D. JUAN.
Prenez-vous-en Prenez vous en au Ciel.
D. CARLOS.
Et Eh quoy toûjours toujours le Ciel ? Ciel ?
D. JUAN.
Le Ciel le souhait souhaitte comme cela.
D. CARLOS.
Il suffit, suffit D. Juan, je vous entends, entens, ce n'est n’est pas icy que je veux venir vous prendre, et le lieu ne le souffre pas ; pas, mais avant qu'il qu’il soit peu, peu je sçauray vous trouver.
D. JUAN.
Vous ferez ce que vous voudrez, vous sçavez que je ne manque point de cœur, et que je sçay say me servir de mon épée espée quand il le faut, je m'en vais m’en vay passer tout à l'heure l’heure dans cette petite ruë écartée escartée qui mene au grand Convent, convent, mais je vous declare déclare pour moy, moy que ce n'est point moy, n’est pas moy qui me veux battre, battre ; le Ciel m'en défend m’en defend la pensée, et si vous m'attaquez, m’y attaquez nous verrons ce qui en arrivera.
D. CARLOS.
Nous verrons, verrons de vray, nous verrons.
SCENE IV.
D. JUAN, SGANARELLE.
SGANARELLE. SGANA.
Monsieur, quel diable Diable de stile prenez-vous là ? prenés vous là ? cecy est bien pis que le reste, et je vous aimerois aymeroïs bien mieux encore comme vous estiez vousestiés auparavant, j'esperois toûjours j’esperois toujours de vostre salut, mais c'est c’est maintenant que j'en j’en desespere, et je croy que le Ciel qui vous a souffert jusques icy, icy ne pourra du tout souffrir dutout cette derniere horreur.
D. JUAN.
Va, Va va, le Ciel n'est n’est pas si exact que tu penses, et si toutes les fois que les hommes.... hommes...
SGANARELLE. SGAN.
Ah, Ah Monsieur, c'est c’est le Ciel qui vous parle, et c'est c’est un avis qu'il qu’il vous donne.
D. JUAN.
Si le Ciel me donne un avis, il faut qu'il qu’il parle un peu plus clairement, s'il clairement s’il veut que je l'entende. l’entende.
SCENE V.
D. JUAN, UN SPECTRE en un SPECTRE, une femme voilée , voylée, SGANARELLE.
LE le SPECTRE.
Dom D. Juan n'a n’a plus qu'un qu’un moment à pouvoir profiter de la misericorde du Ciel, et s'il s’il ne se repent icy, icy sa perte est resoluë.
SGANARELLE. SGAN.
Entendez-vous, Monsieur ? Entendez vous Monsieur.
D. JUAN.
Qui ose oze tenir ces paroles ? paroles, je croy connoistre crois connoitre cette voix.
SGANARELLE. SGAN.
Ha, Ah Monsieur, c'est c’est un Spectre, spectre je le reconnois au marcher.
D. JUAN.
Spectre, Fantosme, phantosme, ou Diable, Diable je veux voir ce que c'est. c’est.
Le Spectre change de figure, et represente le Temps avec sa faux à la main.
SGANARELLE. SGAN.
O Ciel, ! voyez-vous, Ciel ! voyez, Monsieur, ce changement de figure ? figure.
D. JUAN.
Non, non, rien n'est n’est capable de m'imprimer m’imprimer de la terreur, et je veux éprouver esprouver avec mon épée espée si c'est c’est un corps ou un esprit.
Le Spectre s'envole dans le temps que D. Juan le veut fraper.
SGANARELLE. SGAN.
Ah, Ah Monsieur, rendez-vous rendés vous à tant de preuves, preuves et jettez-vous jettez vous viste dans le repentir.
D. JUAN.
Non, non, il ne sera pas dit, quoy qu'il arrive, dit que quoy qu’il arrive je sois capable de me repentir, allons, suis-moy. repentir allons suis moy.
SCENE VI.
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LA STATUE, font-variant:small-caps;">
STATUE, D. JUAN, SGANARELLE. SGAN.
LA STATUE. STATUE
Arrestez, Arrestez D. Juan, vous m'avez hier m’avés bien donné parole de venir manger avec moy.
D. JUAN.
Oüy, Ouy, où faut-il aller ? faut il aller ?
LA STATUE. LA STATUE
Donnez-moy Donnés moy la main.
D. JUAN.
La voila. voyla
LA STATUE. STATUE
D. Juan, l'endurcissement Juan l’endurcissement au péché traîne peché trainé une mort funeste, et les graces du Ciel que l'on renvoye, l’on renvoye ouvrent un chemin à la foudre.
D. JUAN.
O Ciel, Ciel que sens-je ? sens-je ? un feu invisible me brûle, brusle, je n'en n’en puis plus, plus et tout mon corps devient un brasier ardent, ah ! devient...
Le tonnerre tombe avec un grand bruit et de grands éclairs sur D. Juan, la terre s'ouvre et l'abysme, et il sort de grands feux de l'endroit où il est tombé.
SGANARELLE. SGAN.
Voila Ah mes gages ! mes gages ! voyla par sa mort un chacun satisfait, Ciel offencé, Loix loix violées, filles seduites, séduites, familles deshonorées, parens outragez, outragés, femmes mises à mal, maris poussez poussés à bout, tout le monde est content ; content, il n'y n’y a que moy seul de malheureux, qui aprés tant d'années de service, n'ay point d'autre recompense que de voir à mes yeux l'impieté de mon Maître, punie par le plus épouvantable châtiment du monde. gages, mes gages, mes gages !