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Votre nourriture


"Que vous ordonne votre médecin pour votre nourriture? Il m'ordonne du potage. - Ignorant. - De la volaille. - Ignorant. - Du veau. - Ignorant. - Des bouillons. - Ignorant. - Des œufs frais. - Ignorant. - Et le soir de petits pruneaux pour lâcher le ventre. - Ignorant. - Et surtout de boire mon vin fort trempé. - Ignorantus, ignoranta, ignorantum. Il faut boire votre vin pur; et pour épaissir votre sang qui est trop subtil, il faut manger de bon gros bœuf, de bon gros porc, de bon fromage de Hollande, du gruau et du riz, et des marrons et des oublies, pour coller et conglutiner."
Le Malade imaginaire, III, 10

Les aliments invoqués par Toinette correspondent, de manière inversée, à ceux qui étaient recommandés ou proscrits par les "Préceptes de la santé" de l'Ecole de Salerne". Le Commentaire en vers français sur l'école de Salerne (1671) de Du Four de La Crespelière en reprend la liste (1).

Dans l'essai "De l'expérience" (III, 13) de Montaigne (2), ainsi que dans l'"Entretien avec Burman" (1648) de Descartes (3), est avancée l'idée qu'un régime appétissant est bien plus favorable à la guérison que des remèdes rebutants.


(1)

(2)

Je n'aime point à guérir le mal par le mal: je hais les remèdes qui importunent plus que la maladie. D'être sujet à la colique et sujet à m'abstenir du plaisir de manger des huîtres, ce sont deux maux pour un. Le mal nous pense d'un côté, la règle de l'autre. Puisqu'on est au hasard de se méconter, hasardons-nous plutôt à la suite du plaisir.
(éd. C. Journel, Paris, 1659, p. 549-550.)

(3)

Optima autem vitam prolongandi via, et bonam distam conservandi ratio est, quando vivimus et edimus et similia sicut bestiae, videlicet omne id quod nobis arridet, sapit, et quidem id eatenus tantùm.
– Sed hoc bene quidem procederet in corporibus bene dispositis et sanis, quorum appetitus est ordinatus et corpori conducens, non autem in valetudinariis.
— Verum hoc nihil ; etiamsi enim aegrotemus, manet nihilominus eadem natura, quae etiam ideo hominem videtur in morbos conjicere, ut tanto validius se exserere possit, et impedimenta contraria despicere, si ei obsequamur. Et forte si medici permitterent hominibus eos cibos et potus, quos valetudinarii sœpe exoptant, longe melius sœpe sanitati restituerentur, quàm per tœdiosa illa medicamenta, ut id experientia etiam probat, quoniam in talibus casibus natura ipsa suî restitutionem consequi studet, quod ipsa sui optime conscia melius quàm externus medicus novit.
(Oeuvres, éd. Adam et Tannery, t. V., p. 179) ; voir également "la nature d'elle-même")




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