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Vindicatifs, sans foi, pleins d'artifices


"Ces gens, dis-je, [...]
Sont prompts, vindicatifs, sans foi, pleins d'artifices,
Et pour perdre quelqu'un, couvrent insolemment,
De l'intérêt du Ciel, leur fier ressentiment."
Le Tartuffe, I, 5, v. 368-374

Le comportement que dénonce Cléante correspond à celui que décrivait Pierre Charron dans son traité De la sagesse (1609) :

N'aimer point, regarder d'un mauvais oeil celui qui est d'autre opinion que la leur, penser d'être contaminé de parler ou hanter avec lui, c'est la plus douce et la plus molle action de ces gens. Qui est homme de bien par scrupule et bride religieuse, gardez-vous-en et ne l'estimez guère. Et qui a religion sans prud'homie, je ne le veux pas dire plus méchant, mais bien plus dangereux que celui qui n'a ni l'un ni l'autre, omnis qui interficiet vos, putabit se obsequium praestare deo. Ce n'est pas que la religion enseigne ou favorise aucunement le mal, comme aucuns ou trop sottement ou trop malicieusement voudraient objecter ou tirer de ces propos; car la plus absurde et la plus fausse même ne le fait pas; mais cela vient que n'ayant aucun goût ni image, ni conception de prud'homie, qu'à la suite et pour le service de la religion, et pensant qu'être homme de bien n'est autre chose qu'être songeux d'avancer et faire valoir sa religion, croient que toute chose, quelle qu'elle soit, trahison, perfidie, sédition, rébellion et tout offense à quiconque soit, est non seulement loisible et permise, colorée du zèle et du soin de religion, mais encore louable, méritoire, et canonisable, si elle sert au progrès et avancement de la religion, et reculement de ses adversaires.
(II, 5, § 28)

La dénonciation sera réitérée dans la satire "Le Pharisien du temps ou le Dévot hypocrite" (s. d.) de Garaby de la Luzerne :

De même, ces guerriers de chaire et d’écritoire,
Piqués de jalousie et d’une vaine gloire,
Quoique sous le drapeau d’un commun général,
Ils disent ne vouloir que combattre le mal,
Étouffant toutefois la vertu la plus belle
Que Jésus-Christ enseigne à son peuple fidèle,
J’entends la charité qui se doit au prochain,
Ne tendent qu’à régner, les armes à la main,
Et, pour réduire tout dedans leur dépendance,
Ne pardonnent à rien qui fasse résistance.
(p. 54-55)




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