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Une personne qui ne devait pas être faite comme les autres


"Jamais il ne parut si sot, parmi une demi-douzaine de gens à qui elle avait fait fête de lui, et qui le regardaient avec de grands yeux comme une personne qui ne devait pas être faite comme les autres."
La Critique de L'Ecole des femmes, sc. II

Les désagréments de la confusion entre le personnage social de l'écrivain et son individualité avaient déjà été dénoncés par Sapho, dans un passage célèbre du tome X du Grand Cyrus des Scudéry :

Il n'y a rien de plus incommode que d'être bel Esprit ou d'être traité comme l'étant [...] on n'est point ce qu'est un autre de la même maison, et du même sang, qui ne se mêlera point d'écrire. En effet, on vous traite tout autrement et l'on dirait que vous n'êtes plus destiné qu'à divertir les autres.
[...]
Il y a assurément des gens dont il ne faut voir que les ouvrages, mais il y en a d’autres aussi dont la personne doit encore être préférée à leurs écrits. Cependant, ces gens qu’on appelle les gens du monde les confondent avec les autres et ne leur parlent point comme ils parlent à ceux qui ne se mêlent point d’écrire, quoique peut-être ils en soient plus dignes.
[...]
Cela n’empêche pas qu’il n’y ait toujours quelques instants où je sens tous les dégoûts que la réputation que j’ai me donne, car enfin je vois des hommes et des femmes qui me parlent quelquefois, qui sont dans un embarras étrange, parce qu’ils se sont mis dans la fantaisie qu’il ne me faut pas dire ce qu’on dit aux autres gens. J’ai beau leur parler de la beauté de la saison, des nouvelles qui courent, et de toutes les choses qui font la conversation ordinaire, ils en reviennent toujours à leur point et ils sont si persuadés que je me contrains pour leur parler, ainsi qu’ils se contraignent pour me parler d’autres choses qui m’accablent tellement, que je ne voudrais être plus Sapho quand cette aventure m’arrive.
(p. 6939-6942)




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