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Un grès que sa main a jeté


"Agnès m'a confirmé le retour de ce maître,
En me chassant de là d'un ton plein de fierté
Accompagné d'un grès que sa main a jeté."
L'Ecole des femmes, III, 4 (v. 877-879)

L'épisode du grès est commenté


(1)

ARGIMONT :
Peut-on rien voir de plus forcé que l'incident du grès, et ne fait-il pas connaître que l'esprit de l'auteur est à la gêne lorsqu'il faut conduire un sujet ? (suite...)
(Zélinde, sc. III, p. 27)

--

(2)

Le grès n'est-il pas étonnant ?
Voit-on rien de si preste, et de si surprenant ?
Aucun des auditeurs osait-il se promettre
Qu'Agnès sût seulement ce que c'est qu'une lettre ?
(Le Portrait du peintre, sc. VIII, p. 27)

--

(3)

MÉLASIE.

Le Récit de l’aventure du grès et du billet me touche encore davantage. Notre Jaloux triomphe de ce qu’Agnès a suivi son ordre, il s’imagine que le grès est toute la réponse que son rival a reçue, et pour s’en divertir il lui demande si plaisamment,
Hé bien vos amourettes ?
Puis-je Seigneur Horace apprendre où vous êtes ?

Que ce brutal mérite bien ce qui lui arrive ! Que son interdiction est agréable lorsqu’il apprend autre chose que ce qu’il attendait ! Que son ris forcé est divertissant, et que je voudrais de mal à Horace s’il ne lui faisait point ce récit !

PHILINTE.

Arnolphe l’en priait de trop bonne grâce pour être refusé. Mais si le revers qu’il reçoit vous satisfait, la froideur avec laquelle il écoute ce récit m’a beaucoup plu, et quoi que l’on l’a condamnée, je trouve qu’il la colore agréablement quand il répond à Horace qui lui en demande la cause.
Il m’est vers la pensée
Venu présentement une affaire pressée.

CLÉONE.

Nous passons la plus sensible faute qui soit dans L’École des Femmes. Peut-on souffrir que cette Agnès qui dans les première Scènes paraît l’innocence même, se déniaise si promptement ? L’esprit lui vient furieusement vite ! Elle écrit le poulet et se sert du stratagème de son jaloux pour le faire tenir à Horace ; Cela est galant, et il y en a beaucoup dans le monde qui seraient plus sottes qu’elle.
(La Guerre comique, Dispute première, p. 23-25)

ALCIPPE.
[...] Parbleu son grès fait un effet fort plaisant ! Un grès dans une Comédie ! Ma foi cela est bon. Comment Diable comprendre qu’une fille jette un grès ? Car ce qu’on appelle un grès est un pavé qu’une femme peut à peine soulever. Arnolphe était bien des amis du Commissaire de faire pleuvoir impunément des grès par sa fenêtre en plein jour.

PHILINTE.

Il y a des grès de toutes tailles, et Horace dit qu’Agnès avait jeté d’une main celui dont tu parles.

ALCIPPE.

Parbleu il a dit aussi que le grès était de taille non petite et capable de l’assommer.

PHILINTE.

Aussi gros que le poing de cette marchandise assommerait un Géant.

CLÉONE.

Monsieur le Marquis qui fait tant le difficile en matière de grès se contenterait bien de la moitié. Mais n’avouerez-vous pas Philinte, qu’Horace perd le jugement de venir chercher une lettre autour de ce grès, ou plutôt quelque bon coup de pavé ? L’amour le rend bien téméraire ?

PHILINTE.

Horace ne doit rien craindre, il connaît l’amour d’Agnès, et cette lettre qu’il voit tomber avec ce grès l’assure assez des bons desseins de cette fille.
(La Guerre comique, Dispute deuxième, p. 33-35)




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