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Son seigneur et son maître


"[le] profond respect où la femme doit être,
Pour son mari, son chef, son seigneur et son maître."
L'Ecole des femmes, III, 2 (v. 711-712)

Les idées émises par Arnolphe correspondent à celles qui seront très clairement formulées par Antoine Courtin dans son Traité de la jalousie (1674) (1).

Fondées sur le principe du vir caput mulieris, hérité de Saint Paul et, à sa suite, de Saint Augustin (2), elles étaient reprises dans

Ce type de conceptions fonde l'humour misogyne du Dépit amoureux ("Ainsi que la tête est comme le chef du corps"). On le trouve également dans L'Ecole des maris ("j'entends que la mienne vive à ma fantaisie").


(1)

Comme nulle société ne peut subsister que par le concert ou la subordination des parties qui la composent, la nature a aussi imposé cette loi dans le mariage, que l'un doit se soumettre à l'autre pour former l'union et tirer l'utilité qu'elle se propose de cette excellente société. Et en effet, nous voyons que, dans l'assemblage de plusieurs parties, il y en a toujours une qui, comme la plus noble, domine sur les autres pour les maintenir dans cet assemblage. Nous voyons que, quand il se trouve plusieurs volontés pour s'unir ensemble, il n'y en a qu'une qui est la maîtresse des autres pour maintenir l'union; que les peuples se dépouillent eux-mêmes de leur volonté et de leur pouvoir pour en revêtir un monarque qui leur commande; que les républiques se font volontairement des maîtres, que des sociétés et des communautés de personnes élisent des supérieurs à qui elles obéissent. C'est aussi cette subordination entre semblables qui forme la société du mariage, donnant de droit naturel l'empire entre les mains de l'homme à cause de la noblesse de son sexe, et imposant une nécessité indispensable à la femme, à cause de la faiblesse du sien, de le respecter et de lui obéir. [...] Cette subordination est donc tellement de l'essence du mariage que toutes les nations du monde, qui n'ont eu d'autre lumière que celle de la nature, sont de tout temps convenues de rendre l'homme le maître et même le juge souverain de sa femme.
(p. 47sq)

L'homme est toujours le maître et la femme doit toujours lui être soumise, parce que cette égalité personnelle n'exclut pas l'inégalité du sexe, laquelle étant naturelle demande dans la femme non seulement une soumission de bienséance, mais une soumission positive et réelle.
(p. 129)

Les femmes étant et devant être selon la loi de la nature et de Dieu sujettes à leurs maris, il s'ensuit que, comme il est impossible que ce qui est sujet soit supérieur, il ne se peut faire que ce qui est sujet ait droit de correction.[...] En effet le mari étant son maître, son supérieur et son roi, s’ingérera-t-elle de lui faire des leçons ?
(p. 134-135)

C'est un ordre que les femmes soient soumises à leurs maris, aussi bien que les enfants à leur pères et et mères (Gratian, cap XII)[...] Une femme qui ne voudrait pas obéir à son mari qui est le chef de la femme, comme J.C. est le chef du mari, ne pécherait pas moins que ferait son mari s'il ne voulait pas obéir à J.C.
(p. 75)

Qu'elle parle peu, mais à propos, dans une soumission et un respect plein de tendresse, se persuadant que, quand elle parle à son mari, elle parle à son maître, à son seigneur et à son roi.
(p. 151)

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(2)

La pratique du droit matrimonial français est fondée sur le principe chrétien du Vir caput mulieris, qui s'appuie sur Saint Augustin, lui même inspiré par Saint Paul :

des devoirs particuliers sont imposés à l'homme et à la femme ; il n'est pas permis à une femme mariée de dire : « Je fais de ce qui m'appartient ce que je veux » puisqu'elle ne s'appartient pas à elle-même, mais à son chef, qui est son mari (Ep. 5, 23).
Saint Augustin, Lettre CCLXII (à Ecdicia)

Car le mari est le chef de la femme, tout comme le Christ est le chef de l'Eglise, lui le Sauveur de son corps.
(Saint Paul, Ep., 5, 23)

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(3)

les lois positives ont voulu qu'elles [les femmes] fussent toujours sous la puissance et conduite d'autrui, de peur qu'elles ne s'émancipassent au-delà des bornes de la raison écrite ou que la nature leur prescrit ; car aussi l'ordre de la nature ou l'ordonnance divine a assujetti le sexe féminin au masculin, afin de le tenir en bride et sujétion, comme un animal dangereux et licentieux.
(Paul Caillet, Le Tableau du mariage représenté au naturel, Orange, 1635, p. 221)

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(4)

la femme ne peut paraître en jugement sans l'autorité du mari, comme un enfant de famille, n'étant pas émancipé, ne saurait s'y présenter sans l'aveu de son père.
(Grenaille, L'Honnête Mariage (1640), p. 230)

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(5)

Gardez l'autorité à votre mari, que toute la maison apprenne, à votre exemple, combien elle le doit honorer ; faites paraître par votre obéissance, et par vos services, qu'il est le maître ; montrez par votre humilité qu'il est grand [...] le mari, comme dit l'apôtre, est le chef de la femme, et n'y a rien qui orne davantage tout le reste du corps que la dignité du chef.
(Claude Maillard, Le Bon Mariage ou le Moyen d'être heureux et faire son salut en état de mariage, Douai, 1643) (1)

--- (6)

La femme qui ne veut obéir à son mari, en ce qui concerne le gouvernement de la famille et de la maison, et en ce qui concerne les vertus et bonnes moeurs, elle pèche : car la femme non seulement est obligée de faire le commandement de son mari, ains aussi de recevoir la doctrine si elle est bonne selon S. Paul [note : I.Cor.14: Mulieres domi viros suos interrogent], qui dit que les femmes interrogent leurs maris à la maison.

Si au contraire elle se veut empêcher du gouvernement de la maison pertinacement, contre la volonté de son mari, quand il le lui prohibe pour quelque bonne raison, elle pèche : car elle ne doit faire contre le vouloir de son mari, auquel elle est sujette par droit divin et humain. [...]

Celle [note: 33 q.5.c. Cum caput] qui enflée d'orgueil, de son bon esprit, de sa beauté de ses biens de son parentage, déprise son mari, ne lui voulant obéir, et principalement en choses équitables, comme de servir Dieu, bien gouverner le ménage, laisser ses pompes, vanités et mauvaises compagnies, etc. elle résiste à la sentence [note: Gen.3.1. Cor. 14) de Dieu, par laquelle il veut que la femme soit sujette au mari, lequel est plus noble et plus excellent que la femme, attendu qu'il est l'image de Dieu et la femme n'est seulement que l'image de l'homme, dit l'Apôtre. [...] Il est tout certain pour conclure que tout ainsi que celle qui avec humilité se soumet au joug du mari pour accomplir la sentence de Dieu en la rémission de ses péchés, mérite grandement, au contraire celle qui ne veut obéir résiste à la puissance de Dieu et pèche grandement.
(R.P. Benedicti, La Somme des péchés, et le remède d'iceux, Paris, A. Sittard, 1587)

-- (7)

[les jurisconsultes] mettent les femmes sous la puissance de leurs maris comme les enfants sous celle de leurs pères, et disent que c'est la nature qui leur a assigné les moindres fonctions de la société.
(Poulain de la Barre, De l'égalité des deux sexes, 1676, page ? )

-- (8)

Je sais qu'on prétend qu'une femme est à son mari comme un esclave à son maître, et qu'elle ne se peut communiquer sans voler quelque chose à son mari; mais cette plainte est semblable à celle que ferait un homme qui ne voudrait pas souffrir qu'un autre prît un peu d'eau de la mer, ou qu'il se servit de la lumière du soleil.
(Quatorzième des conférences de Richesource]], Second tome, p. 156)

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(1) cité par Renate Büff, Ruelle und Realität, Heidelberg, C. Winter, 1979, p. 246)




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