Content-Type: text/html; charset=UTF-8

Sans qu'elle apporte quelque chose


"Car encore n'épouse-t-on point une fille, sans qu'elle apporte quelque chose. - C'est une fille accoutumée à vivre de salade, de lait, de fromage, et de pommes, et à laquelle par conséquent il ne faudra ni table bien servie, ni consommés exquis, ni orges mondés perpétuels, ni les autres délicatesses qu'il faudrait pour une autre femme [...];Outre cela, elle n'est curieuse que d'une propreté fort simple, et n'aime point les superbes habits, ni les riches bijoux, ni les meubles somptueux, où donnent ses pareilles avec tant de chaleur [...]
L'Avare, II, 5

L'attitude d'Harpagon correspond à celle adoptée par la littérature facétieuse de la lésine. Selon La Fameuse compagnie de la lésine (1604) un homme devrait épouser une femme pourvue d'une dot importante. (1)

D'après les Questions et réponses sur les articles des coutumes de France de Guy Coquille, il est cependant préférable pour un homme riche d'épouser une femme pauvre. (2)

L'idée selon laquelle une femme riche mène en général une vie coûteuse est évoquée, sur le mode comique, dans La Veuve (1597) de Larivey.(3)


(1)

De prendre femme
Lorsque quelqu'un des Confrères sera forcé de se marier, qu'il se ressouvienne, et avise bien d'épouser une petite femme et grand dot. [...]
(La Fameuse Compagnie de la lésine, Paris, A. Saugrain, 1604, p. 60.)

(2)

Article CCCXV
Que c'est mauvais ménage à un homme d'épouser femme beaucoup plus riche, ou de plus grand lieu qu'il n'est
[...] c'est une vraie marque de coeur faible et moins que d'homme, de fonder son avancement sur le bien d'une femme pour être méprisé d'elle, pour être valet en sa maison, être commandé d'un maître intolérable, et avoir tout ce mal là domestique, et à tous le jours, et à toutes heures du jour. Ainsi bien disait le comique, que le mari qui reçoit l'argent de la dot de sa femme, est comme le vendeur, et la marchandise qu'il vend pour cet argent, c'est la liberté, et la puissance de commander. Martial en ses Epigrammes dit de soi qu'il ne veut épouser femme riche, pource qu'il ne veut être comme femme de sa femme. Et que pour faire les deux mariés bien pareils, ils faut que la femme soit moindre que son mari. Que si on veut regarder le fait des biens, je dis que le mari ne peut plus honnêtement vendre son héritage, que d'épouser une femme plus riche que soi. Car elle étant riche, ses parents aviséront au traité de mariage son seulement d'assurer sa dot, mais aussi d'y procurer des avantages de parisis au lieu des tournois; des assignaux, des grands douaires. Ces pactions avantageuses sont comme un cancar couvert, qui mange sans être aperçu. Cette femme ayant apporté cette grande dot voudra être somptueusement vêtue, changer d'habits à chacune nouveauté, avoir des bagues de grande valeur, avoir suite de chambrières, litières, carrosses et haquenées. Le mari de sa part voudra dépendre: bien souvent cela passe le revenu. Puis quand se vient à compter, qui est par la dissolution de mariage, après que tous les droits et avantages de sa femme sont pris, se voit un mari, ou des enfants coquins.
(éd. Paris, J. Jaquin, 1644, p. 905-906.)

(3)

LEONARD
Considère un peu la dépense des femmes. Il leur faut robes, cottes, manteaux, pelissons, toutes sortes de collets, chaînes, carcans, perles, ceintures, anneaux, bracelets, deux servantes, un serviteur, la provision tous les mois, une maison pour vous seuls, et tant d'autres choses, que dès le premier jour tu t'en morderais les pouces [...]
(Les Comédies facétieuses de Pierre de Larivey, Lyon, Benoist Rigaud, 1597, p. 120.)




Sommaire | Index | Accès rédacteurs