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Qui joueront et donneront cadeaux


"- SGANARELLE: Et chez vous iront les damoiseaux ?
- ARISTE: Et quoi donc?
- SGANARELLE: Qui joueront et donneront cadeaux ?"
L'Ecole des maris, I, 2, v. 225-226

L'aspect pernicieux du jeu, pour les jeunes femmes, est dénoncé dans L'Ecole des filles en dialogues (1659) (1).

Celui des cadeaux est stigmatisé dans Le Portrait de la coquette, ou la Lettre d’Aristandre à Timagène (1659) (2).

Voir aussi "que visiteraient marquis et beaux esprits" (L'Ecole des femmes)


(1)

Eudoxie : « ...cette aversion naturelle que vous avez pour le jeu est une marque que vous n’avez pas l’âme fainéante; et ce que vous ajoutez que vous jouez néanmoins lorsque la bienséance vous y oblige, fait bien voir que vous savez vous accomoder au temps et aux compagnies où vous êtes, et que vous ne ferez jamais rien qui vous fasse estimer d’une humeur trop particulière. Pour moi je ne veux pas absolument blâmer le jeu, quoi que je ne l’aime guère ; et je sais même qu’il y a de certains moments dans la vie qui peuvent être assez agréablement passés dans le jeu ; mais je sais bien aussi qu’il n’y a guère de chose qui soit plus désavantageuse à une fille que de passer pour une grande joueuse. » (L’Escole des filles, en dialogues, Paris, Louis Chamhoudry (et se vendant à Avignon, chez Antoine Duperier), 1672, Dialogue premier : Parthénie, ou la fille à marier, p. 9-10).

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(2)

Les promenades au Cours, celles qui se font dans les lieux plaisants, qui sont aux environs de Paris, et les Cadeaux prémédités et non prémédités, sont les plus agréables divertissements qu’elle se puisse proposer dans cette Saison [l’été].
(Le Portrait de la coquette, ou la Lettre d’Aristandre à Timagène, Paris, Sercy, 1659, p. 182)

Dans cette saison qui est celle des promenades, le Galant le plus avare doit faire effort, pour paraître magnifique, s’il veut plaire à la Coquette ; car si son cœur est capable d’attendrissement, c’est particulièrement en faveur de celui, qui aura pris soin de faire trouver à l’improviste un magnifique Cadeau tout préparé, dans quelque maison aux environs de Paris.
(Le Portrait de la coquette, ou la Lettre d’Aristandre à Timagène, Paris, Sercy, 1659, p. 195)

La Coquette s’estime heureuse lorsqu’elle a plusieurs galants d’humeur à lui procurer de semblables divertissements ; c’est pourquoi elle tâche de les ménager autant qu’elle peut, pour se les conserver longtemps, car il faut mettre une grande différence entre deux sortes de Coquettes, dont les unes tendent à ruiner leurs Galants, pour s’enrichir de leurs dépouilles, et les autres ont pour but seulement de les engager à quelque dépense, qui puisse servir à leur faire passer agréablement quelques moments. Les unes et les autres sont très dangereuses, mais les premières beaucoup plus que les autres ; car comme elles n’ont point d’autre but que leur intérêt, elles ruineraient en un jour tous leurs Galants, si elles pouvaient. Si ces Coquettes avaient cent mains, elles les tiendraient toujours ouvertes pour recevoir des présents de toutes parts, cependant elles ne laissent pas de se fâcher contre ceux qui leur en font, lorsqu’ils ne se servent pas de quelque adresse pour leur faire prendre.
(Ibid., p. 197-198)

[Les autres] sont bien aises que [leurs Galants] subsistent quelque temps, pour leur procurer plus longuement du divertissement. Ils sont toujours les bienvenus chez elles, autant de temps qu’ils sont en état et en humeur de leur faire passer agréablement le temps. […] une Coquette de cette sorte ne veut régner que sur des sujets qui soient en état, et en humeur, de contribuer à ses plaisirs : c’est pourquoi il faut qu’un Galant donne à tout le moins un Cadeau de temps en temps, s’il ne veut être retranché du nombre de ceux qu’elle souffre sans répugnance. S’il n’obtient pas d’elle tout ce qu’il en désire, il a toujours cet avantage d’être le favori, jusqu’à ce qu’un second Cadeau, donné par un autre Galant, ait effacé le souvenir du sien.
(Ibid., p. 200-201)




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