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Puis-je empêcher les gens de me trouver aimable


"Des amants que je fais, me rendez-vous coupable ?
Puis-je empêcher les gens de me trouver aimable ?"
Le Misanthrope, II, 1, v. 461-462

L'argument de Célimène fait partie des justifications habituelles de la coquette.

On la retrouve dans :


(1)

L'héroïne de l'"Histoire de Méréonte et Dorinice" se dédouane ainsi de ses amitiés multiples :

Croyez-vous que j'aime fortement tous ceux qui se disent mes amis ? et pensez-vous qu'encore que je die bien souvent que j'ai un fonds d'amitié inépuisable, et que je pourrais avoir mille amis, que cela soit positivement vrai ? - Je ne sais pas, répondit Nyrtile, si cela est vrai, mais vous agissez comme si cela l'était ; et on dirait que vous croyez que tous ces gens-là qui vous connaissent sont effectivement les plus fidèles et les plus sincères amis du monde. - Je vous assure, répondit Dorinice, que je rends justice à tous mes amis ; car je sais fort bien faire la distinction de ceux qui me voient par vanité, par interêt, par coutume ou par inclination ; cependant je ne laisse pas d'avoir pour ceux qui m'aiment le moins cette espèce de civilité qu'on doit avoir pour tous ceux pour qui on a quelque sorte d'estime ; car si je ne l'avais pas, je me priverais de mille plaisirs que la conversation de tous ces gens-là me donne.
(p. 7279-7280)

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(2)

ISMENE (à Diane qui refuse d’agir en coquette avec les hommes) :
J’aime, mais j’eus toujours ma méthode en amour,
L’amant qui m’incommode est mon amant d’un jour,
Pour l’amour je ne brûle encore ni ne soupire,
J’en fais un jeu toujours et jamais un martyre,
N’en rebutant pas un, n’ai-je pas chaque jour,
Une foule d’amants qui tous me font la cour,
Qui tous pour m’aborder à l’envi font la presse,
Et sur qui je commande et je règne en princesse ?
Ils pensent à me plaire, ils vantent mes appas,
Lorsque je vais au temple, ils suivent tous mes pas :
Et j’ai plaisir à voir en des bergers si braves,
A ma suite pompeuse une troupe d’esclaves,
Je les satisfait tous en flattant leurs désirs
Si j’en fais de jaloux, j’y prends mille plaisirs. »
(Les Charmes de Félicie, I, 2, p. 6-7)

THIMANTE :
[…]
J’ai vu tant de bergers assis à tes genoux.

ISMENE :
Que Thimante en un mot est devenu jaloux,
Puisque tu veux m’aimer, apprends à me connaître,
Je suis libre Thimante, et ne veux point de maître,
Je ne prétends jamais dépendre que de moi,
Et t’avais-je promis de ne parler qu’à toi ?
Penses-tu que tu sois l’amant seul qui me serve
N’en ai-je pas encore qu’il faut que je conserve ?
Et de tous les bergers dont j’ai reçu la loi,
Si je n’ouvre la bouche et les yeux que pour toi,
Et que l’un de ces jours je cesse de te plaire,
Ou que je change aussi, comme tout se peut faire,
Tous les autres jaloux de ces bons traitements,
Quand je t’aurais perdu seraient-ils mes amants ?
Et si ma liberté pour tous n’était offerte,
Qui d’entre eux me voudrait consoler de ta perte ?
Je songe à l’avenir, dont tu n’es pas garant,
Du moins si l’un me quitte, un autre me reprend ;
Vois si l’humeur te plait, vois si sans jalousie,
Tu pourras me servir ainsi toute ma vie,
Et si cela se peut, espère, quelque jour,
Et la bouche, et la main, pour flatter ton amour,
Et peut-être le cœur si mon humeur me change.
(I, 3, p. 11-12)

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(3)

La coquette de la Défense de la jalousie (1642) de René Bary réplique à son soupirant mécontent (voir "de vos façons d'agir je suis mal satisfait") par les arguments suivants :

Vous dites que je suis trop facile, complaisante. Et d'où vient que je n'ai pu goûter votre humeur ? que je n'ai pu flatter votre bizarrerie ?
[...]
Vous dites que je fais bon visage à tout le monde. Et pourquoi voulez-vous que je sois dédaigneuse ?
(p. 31-39)




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