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Nous nous fûmes coucher


"On servit. Tête à tête, ensemble nous soupâmes;
Et le souper fini, nous nous fûmes coucher.
- Ensemble? - Assurément. Quelle est cette demande? [...]
Ai-je fait quelque mal, de coucher avec vous?
- Non, ce n'était pas moi, pour ma douleur sensible.
Et qui dit qu'hier ici mes pas se sont portés,
Dit, de toutes les faussetés,
La fausseté la plus horrible."
Amphitryon, II, 2, v. 1018-1027

Le quiproquo entre Amphitryon et Alcmène sur le souper et la nuit qui le suivit agrémentait déjà l'Amphitruo de Plaute (1), ainsi que Les Sosies de Rotrou (2)


(1)
ALC.
Cena adposita est; cenavisti mecum, ego accubui simul.

AMPH.
In eodem lecto?

ALC.
In eodem. [...]

ALC.
[...]mensa ablata est, cubitum hinc abiimus.

AMPH.
Ubi tu cubuisti?

ALC.
In eodem lecto tecum una in cubiculo.
[...]
Quid ego tibi deliqui, si, cui nupta sum, tecum fui?

AMPH.
Tun mecum fueris? quid illac impudente audacius?

AL. On servit le soupé, vous mangeâtes avec moi, et nous couchâmes ensemble. AM. Dans un même lit ? AL. Dans un même lit. [...] la table fut levée, et de là, nous fûmes nous coucher. AM. Où fut-ce ? AL. Dans votre chambre, et dans un même lit. [...] Quelle faute ai-je commise contre vous, si étant votre épouse, je vous ai tenu compagnie ? AM. Vous m'avez tenu compagnie ? Qui eut jamais l'audace de parler de la sorte ?
(v. 804-818; trad. Marolles, 1658, p. 41-42)

(2)

ALCMENE :
Il fallut manger.nous lavâmes ensemble ;

AMPHITRYON.
Et puis ?

ALCMÈNE.
Nous prîmes place, où le couvert fut mis ;

AMPHITRYON.
Tout cela m’est suspect, nous étions trop amis,
Enfin, après souper.

ALCMÈNE.
Fatigué du voyage,

AMPHITRYON.
Je crains, et justement, d’en savoir davantage ;

ALCMÈNE.
Vous vous mîtes au lit.

AMPHITRYON.
Je tremble, achève, après.

ALCMÈNE.
J’en usai comme vous, et vous suivis de près.

AMPHITRYON.
Où ? c’est ici le point que sur tout j’appréhende.

ALCMÈNE.
Auprès de vous, pourquoi ? quelle est cette demande ?

AMPHITRYON.
Comment, en même lit ?

ALCMÈNE.
Avec la liberté,
Qu’une pudique femme a de l’honnêteté,
Et par la loi d’Hymen, immuable, et sacrée,
Qui m’y donne ma place, et m’en permet l’entrée.

AMPHITRYON.
Ô malheur !

ALCMÈNE.
Qu’avez-vous ?

AMPHITRYON.
Tais-toi, ne parle plus,
Ce funeste discours me rend assez confus ;
Ô malheur de mes jours, malheureux Hyménée,
Malheureuse cent fois ma triste destinée :
Ô voyage, ô triomphe à mon honneur fatal.
(II, 3)




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