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Nous lisons des Anciens


"Nous lisons, des anciens, Mademoiselle, que leur coutume était d'enlever par force de la maison des pères les filles qu'on menait marier, afin qu'il ne semblât pas que ce fût de leur consentement, qu'elles convolaient dans les bras d'un homme."
Le Malade imaginaire, II, 6

Dans un passage de La Précieuse (1656-1658) de l'abbé de Pure, un "suppôt de l'université" invoquait l'autorité des coutumes antiques pour mettre en cause des pratiques modernes :

La compagnie ne fit que rire de la proposition de Gélasire, qui ayant accoutumé de traiter toute chose avec liberté, n'embarrassa point un de ces deux anciens suppôts de l'université, qui s'appelle Horacien, qui ayant aussitôt pris la parole, cita tout Cicéron et Quintilien, et puis conclut que c'était une chose épouvantable et bien expressive des malheurs du siècle que les femmes fussent la règle du discours et du mérite des choses de savoir. Gélasire n' avait garde de l'interrompre après le serment qu'il avait fait de lui donner favorable audience ; au contraire, comme il s'en divertissait, il l' obligea à reprendre tout ce qu'il pouvait avoir dit de ces doctes anciens qui ont traité de l'inaptitude que les dames peuvent avoir pour les lettres. Il eût de bon coeur fait médisance de certaines savantes du temps dont il avait connaissance ; mais le respect lui fit dire en latin quelques vers d'Horace, où, sous un ancien reproche, il débita son indignation
(éd. Magne, Paris, Droz, 1938, t. I, p. 165)

La même opposition des coutumes anciennes contre les pratiques modernes est établie plus loin à propos d'une autre question cruciale de civilisation :

Il reprend sa place, et dit à toute l' assemblée : "Qui ose ici prendre le parti des filles contre les femmes ? Je ne citerai pas des anciens auteurs comme vous, Monsieur... ; aussi ne dis-je pas mon bréviaire, mais je vous dirai ce que je sais, pour l' avoir éprouvé plus de trente fois, que les filles ne sont bonnes qu'aux jeunes gens et aux ignorants en l'art d'aimer".
(ibid., p. 258)

Le raisonnement type de Thomas Diafoirus est contesté dans le traité De l’éducation des dames (1674) de Poullain de la Barre :

Nous pouvons nous servir du secours que les auteurs nous ont laissé ; mais nous ne devons pas avoir plus de déférence pour eux, quoique leurs opinions aient été suivies pendant plusieurs siècles et par un grand nombre de gens qui ont passé pour savants, que si nous avions été leurs contemporains. Parce que la vérité ni la fausseté d’un sentiment ne sont point fondés sur son antiquité, ni sur la multitude des personnes qui l’ont approuvé ou condamné.
(p. 84)




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