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Nos gens de province


"Ah Claudine, que ce billet s'explique d'une façon galante! que dans tous leurs discours, et dans toutes leurs actions les gens de cour ont un air agréable, et qu'est-ce que c'est auprès d'eux que nos gens de province ?"
Georges Dandin, II, 3

L'opposition entre "gens de cour" et "gens de province" avait fait l'objet d'une formulation explicite au tome III, 1 de l'Almahide (1663) des Scudéry :

Si la campagne, dit alors Abindarrays, était habitée par les gens de la cour, elle serait sans doute fort agréable ; mais les provinciaux pour la plupart sont de si étranges gens que je trouve qu’il vaut mieux revenir des champs à la ville que d’aller de la ville aux champs.
(p. 359)

Les provinciaux

ignorent si généralement les affaires du monde et les intrigues de la cour qu'on ne sait de quoi leur parler, ni qu'ils savent de quoi on leur parle, ni ce qu'ils doivent répondre.
(p. 364)

Cette opposition avait été développée dans le roman Carmente (1666) de Mlle Desjardins :

Je ne hais point leur personne, repartis-je, mais, pour leurs manières je crois qu’il n’y a point homme de bon sens, qui me puisse condamner à les aimer. Quoi, poursuivis-je avec impétuosité, pourrais-je trouver des charmes dans cette circonspection perpétuelle, qui leur fait étudier jusqu’à leurs éternuements et qui, les tenant en garde sur toutes leurs actions, fait que, par la peur de faire une sottise, ils demeurent dans une contrainte qui est en soi la plus grande sottise qu’ils puissent faire ? Ces contorsions qu’ils nomment des révérences, ces éclats de rire affectés et ces citations de bravoure, dont ils assaisonnent la conversation qu’ils ont avec les dames, comme si elles étaient des généraux d’armée, pensez-vous, dis-je, que toutes ces façons d’agir soient des qualités recommandables ?
(Oeuvres, 1720, p. 109)




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