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Mon coeur abattu


"Le Ciel m'a seule condamnée.
Je pense ouïr déjà les mortels sifflements
De son ministre qui s'approche,
Ma frayeur me le peint, me l'offre à tous moments,
Et maîtresse qu'elle est de tous mes sentiments,
Elle me le figure au haut de cette roche,
J'en tombe de faiblesse, et mon cœur abattu
Ne soutient plus qu'à peine un reste de vertu."
Psyché, acte II, scène 4, vv. 847-854.

L'héroïne de l'"Histoire d'Ardélie", enchâssée dans le roman Carmente (1668) de Madame de Villedieu (Mlle Desjardins) est contrainte de se marier contre son gré.

La cérémonie est présentée comme un sacrifice, semblable à celui auquel la jeune fille est conduite :

Je passai une partie du jour et la nuit qui devança ces noces cruelles à me tourmenter d'une manière si étrange que je me suis étonnée depuis comme j'avais eu la force de résister à l'excès de mon désespoir. Mais enfin le ciel me réservait à d'autres aventures. Je surmontai tous les désirs qui me portaient à mourir et, le moment d'aller au temple étant arrivé, on m'habilla sans que je susse quasi ce qu'on faisait. On me mit de force dans un chariot et on me conduisit dans le lieu où tant de maux m'étaient préparés. Le roi y était déjà, qui avait mené Hermocrate, et voulant autoriser cette action de sa présence, il avait déjà exposé ses fausses raisons au grand prêtre qui devait nous épouser. J'étais si pâle et si saisie, lorsque j'arrivai, que j'attirais des larmes de tous ceux qui me regardaient, et le peu de charmes que j'ai reçus du ciel, augmentant la piété des spectateurs, il s'élevait un murmure confus dans cette assemblée, qui penchait fort à une révolte. Mais la présence du roi arrêtant l'audace des plus hardis, et la nouveauté de cette aventure attachant tout le monde à l'attention plutôt qu'à toute autre pensée, je fus conduite jusques au pied de l'autel [...] Hermocrate eut de la confusion à ces paroles. Mais il ne désista point de son dessein et, après avoir dit qu'il ne faisait qu'exécuter les ordres de celui qu'on devait regarder comme mon père, il me pria d'achever la cérémonie et de ne plus m'opposer à une chose où il fallait me résoudre, puisque par la bonté du roi rien ne pouvait y apporter d'obstacle.
(éd. de 1720, p. 451)




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