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Loret, La Muse historique, Lettre VII du samedi 14 février 1665


Lettre VII, du samedi 14 février 1665, « Réveillée ».

L’effroyable Festin de Pierre,
Si fameux par toute la Terre,
Et qui réussissait si bien
Sur le Théâtre Italien,
Va commencer, l’autre semaine,
À paraître sur notre Scène,
Pour contenter et ravir ceux
Qui ne seront point paresseux
De voir ce Sujet admirable,
Et lequel est, dit-on, capable,
Par ses beaux discours, de toucher
Les coeurs de bronze, ou de rocher,
Car le rare esprit de Molière
L’a traité de telle manière,
Que les Gens qui sont curieux
Du solide et beaux sérieux,
S’il est vrai ce que l’on en conte,
Sans doute y trouveront leur compte ;
Et touchant le style enjoué,
Plusieurs, déjà, m’ont avoué
Qu’il est fin, à son ordinaire,
Et d’un singulier caractère.
Les Actrices et les Acteurs,
Pour mieux charmer les Auditeurs,
Et plaire aux subtiles oreilles,
Y feront, dit-on, des merveilles :
C’est ce que nous viennent conter
Ceux qui les ont vu répéter ;
Pour les changements de Théâtre,
Dont le Bourgeois est idolâtre,
Selon le discours qu’on en fait,
Feront un surprenant effet :
Mais je ne suis pas un Oracle,
Et n’ayant pas vu ce spectacle,
Que sais-je moi ? je puis errer ;
Ainsi, pour mieux m’en assurer,
Soit aux Jours gras, soit en Carême,
Que chacun l’aille voir soi-même.

(Texte saisi par David Chataignier à partir du Tome IV (années 1663-65) de l'édition de Ch.-L. Livet de 1878, Paris, Daffis éditeur).




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