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Libertins sans savoir pourquoi


"Il y a de certains petits impertinents dans le monde, qui sont libertins, sans savoir pourquoi, qui font les esprits forts, parce qu'ils croient que cela leur sied bien;"
Don Juan ou le Festin de pierre, I, 2

Ce type de libertin venait d'être dénoncé dans l'homélie académique "Des injures" ( Homélies académiques, 1664) de La Mothe le Vayer (1).

Il le sera encore dans la conversation "Sur l'hypocrisie" (Nouvelles conversations de morale, 1688) de Madeleine de Scudéry (2).


(1)

Mais n’est-ce pas une chose qui doit faire horreur, qu’on affecte de paraître impie, afin de passer pour esprit fort, dans la plus grande faiblesse d’entendement où l’on puisse tomber, qui est celle qui naît de l’irréligion ? En effet, il se trouve des gens qui n’ont point d’autre motif pour paraître libertins, pour se moquer de ce qu’il y a de plus saint au-dessus des nues, et pour jeter insolemment des crachats contre le Ciel, qui leur retombent misérablement sur le visage, que cette folle pensée d’être plus hardis et plus clairvoyants que les autres.
(éd. des Oeuvres de 1756, III, 2, p. 96)

(2)

- Mais qui appelez-vous des hypocrites en mal, dit Bérénice ? - Ce sont, reprit Méliton, de ces jeunes gens sans discernement et assez emportés, qui croient que pour être estimé homme d'esprit et homme de la cour, il faut paraître libertin, se moquer de ceux qui vivent avec bienséance, et qui affectent de paraître plus déréglés qu'ils ne sont naturellement. – Il est vrai, dit Euphranor, que je connais des gens de cette bizarre espèce ; et vous avez un parent qui par cette folle hypocrisie n'a que des livres libertins et satiriques et trop libres sur sa table, qu'il y laisse par vanité, sans les lire jamais ; il a même des tableaux que les dames ne peuvent voir ; et il a enfin la plus ridicule affectation qu'on puisse s'imaginer ; mais pour montrer qu'il n'est pas au fond ce qu'il paraît, c'est que dès qu'il a deux accès de fièvre, il veut renoncer à toutes ses extravagances. – Il est vrai que celui que vous dites, reprit Euphranor, a brûlé plus d'une fois des livres et des tableaux très impertinents ; car, pour son malheur, quand il est guéri, ses amis libertins qui se portent bien le raillent, et pour se remettre avec eux, il en achète d'autres.
(p. 21-23)




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