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Le coche
- "Votre sort est fort beau: de quoi vous plaignez-vous?
- Vous irez par le coche en sa petite ville,
- Qu'en oncles et cousins vous trouverez fertile,"
- Le Tartuffe, II, 3 (v. 656-658)
- "Votre père se moque-t-il de vouloir vous anger de son avocat de Limoges, Monsieur de Pourceaugnac, qu'il n'a vu de sa vie, et qui vient par le coche vous enlever à notre barbe?"
- Monsieur de Pourceaugnac, I, 2
Le spectacle ridicule que constituait ce moyen de transport de fortune avait été dépeint dans Les Tracas de Paris (1665) de François Colletet :
- Description d'un coche qui part de Paris
- Où grands fusils sont attachés,
- Etuis de chapeaux accrochés,
- Paniers et mannes qui brandillent,
- Châbles et cordes qui pendillent.
- Passe avec moi le ruisseau,
- De peur que dessus ton manteau
- Cette crotte ne rejaillisse,
- Et ton rabat blanc ne salisse.
- Ainsi, tous deux, hors d'embarras,
- Pour rire, tu remarqueras
- La diversité des visages,
- Les qualités des personnages
- Qui là-dedans sont entassés,
- Dont la moitié montrent le nez
- Par la fenêtre des portières
- Qui sont de cuir et de lanières.
- Vois-tu déjà trois Allemands,
- Qui jargonneut entre leurs dents,
- Trois Religieux et deux Prêtres
- Emmitouflés de bonnes guêtres,
- De bons habits, de grands chapeaux,
- De bonnes robes et manteaux,
- Quatre femmes, fines matoises,
- Ou Damoiselles ou Bourgeoises,
- Car on n'en peut rien deviner,
- A cause qu'allant promener
- Nous les voyons toujours masquées,
- Et de grands dominos flanquées,
- Qui font qu'on ne saurait savoir
- A les épier, à les voir,
- Ou si ce sont femmes honnêtes,
- Ou si ce sont de bonnes bêtes ;
- Mais, soit enfin ce que ce soit,
- Ce sont des femmes que l'on voit,
- Que l'on distinguera bien vite,
- A la couchée, au premier gîte.
- Item, voilà deux gros Marchands
- Qui témoignent d'être méchants;
- Un Gentilhomme de campagne
- Habillé d'un bon drap d'Espagne;
- Item, quatre autres à cheval,
- Montés tellement bien que mal,
- Qui font escorte à cette troupe,
- Qui porte vingt paniers en croupe,
- Quatre malles, quatre ballots,
- Trois coffres, tant petits que gros,
- Et de l'étoffe et de la toile,
- Marquée avec quelque étoile,
- Et quelques chiffres enlacés,
- Avec l'encre dessus tracés.
- Bon Dieu! quel bruit épouvantable
- Ce monde fait, sans être à table,
- Dans cette grande chambre d'osiers,
- Qu'on voit par le milieu plier,
- Et qui par les deux bouts balance
- Si fort qu'il semble qu'elle danse!
- Quel plaisir de voir ce Cocher
- Ivre et rustique, trébucher,
- Culebuter, cul dessus tête,
- En voulant monter sur sa bête,
- Et s'être cassé le museau
- Au beau milieu de ce ruisseau!
- Je crois qu'il tarde à ces personnes,
- Surtout à ces porte-couronnes,
- Que le cocher, de vin épris,
- Déjà ne soit hors de Paris,
- Car c'est un embarras étrange
- Qu'un si grand coche dans la fange;
- C'est presque un village roulant,
- Qui n'avance que d'un pas lent,
- Et qui trouve dedans les rues
- Toujours quelques coques-cigrues,
- Des carosses et des charrois,
- Qui l'arrêtent autant de fois,
- Brisent essieu, disloquent roue,
- Et couvrent les passans de boue.
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