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La statue de Memnon


"Mademoiselle, ne plus ne moins que la statue de Memnon, rendait un son harmonieux, lorsqu'elle venoit à être éclairée des rayons du soleil, tout de même me sens-je animé d'un doux transport à l'apparition du soleil de vos beautés. "
Le Malade imaginaire, II, 5

La statue de Memnon avait été évoquée dans des termes presque identiques au sein des Oeuvres de Tacite de la traduction de Perrot d'Ablancourt (1658) :

Le Prince contemplait encore avec étonnement d'autres merveilles. La statue de Memnon, qui rend un son harmonieux lorsqu'elle est frappée des rayons du soleil ; les pyramides élevées comme des montagnes parmi des plaines de sablons inaccessibles, monument de la grandeur et de la magnificence des rois d'Egypte.
(p. 92)

Elle était suffisamment connue pour être mentionnée dans un texte destiné au public mondain tel que le roman Almahide (1660-1663) des Scudéry (1)

En tant que lieu commun de la tradition rhétorique, elle sert de comparaison dans de nombreux textes du XVIIe siècle, parmi lesquels

Charles Sorel avait traité ce lieu commun sur le mode de la parodie dans son roman Le Berger extravagant (1627) (10)


(1)

Il était donc parvenu à cet endroit où l’on dit qu’était autrefois cette merveilleuse statue de Memnon, qui jouait de la lyre tous les matins, lorsque les premiers rayons du soleil la touchaient.
(III, 1, p. 498-9)

(2)

Vous n'avez, dit Philonime, qu'à consulter cet ancien ouvrier, qui a fait la statue de Memnon, qui parlait quand le soleil la regardait.
(éd. Magne, Paris, Droz, 1938, t. I, p. 221)

(3)

Autant de fois les vives lumières qui brillent dans tous vos discours se sont épanchées sur moi, et semblables aux rayons du soleil qui, éclairant certaine statue la faisaient parler, vous m'avez rendu capable de raisonner et d'écrire.
(épître, n. p.)

(4)

Mais à l'exemple de cette statue de Memnon qui rendait ses Oracles sitôt que le Soleil la touchait de ses rayons, M. Corneille a repris ses esprits et sa voix à l'éclat de l'or qu'un grand Ministre du temps a fait briller dans l'obscurité de sa retraite, la couleur et le son de ce beau métal l'on réveillé et remis sur le Théâtre.
(p. 24)

(5)

J'ai ressenti dans ce moment, par le lustre de vos personnes et de vos pourpres, l'effet des rayons de l'Aurore naissante sur la statue égyptienne de son fils, qu'elle animait chaque matin, et lui donnait assez de mouvements pour former un son harmonieux avec le sistre et l'archet qu'il tenait en ses mains.
(source : Despois, IX, p. 352)

(6)

On lit qu'en Ethiopie il y avait une statue qui rendait un son harmonieux, toutes les fois que le soleil levant la regardait.
(éd. de 1667, p. 3)

(7)

Philostrate écrit en un endroit que l'image de Memnon, qui était en Egypte, commençait à parler lorsque le soleil lui donnait en la bouche ; en quoi, je crois qu'il n'a voulu désigner autre chose que l'effet de la science et de l'érudition qui anime la langue et les lèvres de ceux qui ont à dire quelque chose de grand et de divin, sans laquelle la parole n'est qu'un vent et son perdu.
(éd. des Oeuvres de 1641, p. 401)

(8)

L'on dit que la statue de Memnon, insensible et sans âme, s'animait aux rayons du soleil, et que touchée de quelque divin Apollon ou Terpandre, elle attirait les passants sous l'accorte mignardise des fredons entrecoupés par les Sirènes qui y étaient encloses, la charmante voix desquelles pipait et ravissait les esprits des plus cauteleux Ulysse, qui tant soit peu prêtaient l'oreille aux doux accents de leur voie.
(réimpression, s. d., de l'édition de 1615, p. 9)

(9)

ils sont comme la statue de Memnon qu'il fallait que le soleil la regardât pour la faire parler.
(p. 84)

(10)

Nous composerons des livres ; nous ferons des plaidoyers, et nous irons haranguer devant les nymphes. Je vous donnerai une maîtresse si vous n'en avez déja une toute choisie. Vous la courtiserez, et en recevrez des faveurs fort grandes : mais il faudra un peu souffrir auparavant, car c'est une très discrète bergère. Ne lui ferez-vous pas bien un compliment amoureux ? On dit qu'en Ethiopie il y avait une statue de Memnon qui rendait un son harmonieux quand le soleil la regardait, dit Carmelin, ainsi lors que vous ou quelque autre de pareil mérite jettera ses rayons dessus moi, je dirai des choses qui contenteront vos oreilles. [..] N' alléguez point tant, dit Lysis, retournons à la statue de Memnon, je pense que je suis de son humeur. Dès que ma tête est frapée de l'ardeur du soleil, je commence à éternuer. Mais pour parler de ce qui vous concerne sans faire de digression, je vous jure que vous aurez avec moi des plaisirs que les plus puissantes paroles de votre éloquence, ni de la mienne ne sauraient exprimer jamais.
(Livre IV) (indication aimablement fournie par C. Barbillon)




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