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Je vous l'ai dit vingt fois


"Je vous l'ai dit vingt fois, mon fils, toutes vos manières me déplaisent fort."
L'Avare, I, 4

Les propos d'Harpagon correspondent à une tirade classique de la commedia dell'arte, dans laquelle Pantalone adresse à son fils des remontrances pour ses dépenses excessives et son goût pour le jeu (1).

On retrouve dans La Belle Plaideuse (1655) de Boisrobert un échange entre père et fils qui est inspiré de cette tradition (2).


(1)

Dans son traité Dell'arte rappresentativa premeditata ed all'improviso (1699), Andrea Perrucci donne un exemple de formulation de cette tirade, précédant immédiatement celle de "maledizione al figlio" ("je te donne ma malédiction") :

Persuasiva al figlio

Che speris tù fio, de menar una vida così lizensiosa. No ti vedi che la mia casa xè in malora ? ti ha lassao il studio, ti te le fa cò sti beca feri, co sti buli, tuto el dì per le scarabaze, sempre al reduto. Cosa credestù, che anco i tesori d'un Creso, d'un Craso, e d'un Mida non finisa ? no che le stropole, e bazecole che gh'avemo in casa. Per causa toa le mie casse xè diventae casse de' morti,; m'avè sbudellao i scrigni, fato deventar arzento vivo l'arzenteria, e la xè andà in fumo; [...] El ziogo el xè un Lovo, che quanto più el divora più vol magnar.
(éd. A. G. Bragaglia, Firenze, Sansoni, 1961, p. 196)

On en retrouve une version à la scène I, 4 de la commedia ridicolosa La moglie superba (1630) de Vergilio Verucci :

MAGNIFICO
Questo non sarave niente, respetto a tanti latri vitij e desviamenti, come l'andar tutto el dì per queste hostarie de Roma con altri giotti e serrocconi a consumar tutt'el mio te par mo che staga ben ?
[...]
sastu quel che voio dir ? che se tu non mudi vita, te mandarò fuora de casa, senza darte un bagatin, e cò faro testamento te privarò della mia heredità come indegno, e disobediente, e te mandarò accatando, e forsi anco te farò peggio.
(p. 20-21)

(2)

AMIDOR
Parais-tu pas plus qu'eux, insolent, effronté,
Dans tes habits d'hiver, dans tes habits d'été,
Tu fais plus, tous les jours tu fais tes promenades
Tu donnes des festins mêlées de sérénades.

ERGASTE
Est-ce de votre bien, vous ai-je dérobé?

AMIDOR
Le péril est plus grand où je te vois tombé,
Car vivant jour et nuit dans ce désordre extrême,
Tu travailles méchant à te voler toi-même.
Où prends-tu tout, dis-moi jusqu'à ce riche habit,
Que je vois sur ton corps, si ce n'est à crédit,
Et jusqu'à ses plumets qui volent sur ta tête?
Si tu te contentais d'un entretien honnête,
Tu m'aurais vu bon père, et selon ton état,
Je t'aurais fait paraître avec asse d'éclat.
Mais tes profusions lassent ma patience,
Il y va de l'honneur, et de la conscience,
Je ne puis plus souffrir tels fols comportements.
Il faut donner un frein à tes débordements.
Va, va, je sais ta vie et des sourdes pratiques,
Tu te pers de débauche en des maisons publiques
Et ce valet infame

FILIPIN
En est le maquereau?

AMIDOR
Oui reste de potence, oui gibier de bourreau,
A tes tours de souplesse on ne voit point de trêve.
Mais un de ces matins tu le payeras en grève.

FILIPIN
En grève?

AMIDOR
Scélérat tu répliques encore,

Toi tu feras coffre demain dans S. Victor,
Tiens-le pour tout constant maudit enfant prodigue,
Je romprai ton commerce ainsi que ton intrigue
[...]
(p. 18-19)




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