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Des bassesses à qui vous devez la clarté


"De grâce souffrez-moi par un peu de bonté
Des bassesses à qui vous devez la clarté;
Et ne supprimez point, voulant qu'on vous seconde,
Quelque petit savant qui veut venir au monde."
Les Femmes savantes, I, 1, v. 79-82

Dans ses Discours anatomiques (1675), Claude Lamy défend une conception animale de la sexualité humaine, motivée par l'instinct de reproduction :

L'unique remède ou plutôt le faible soulagement à la douleur qu'on a de se trouver en nécessité de mourir est de voir renaître un successeur ; cela fait que l'amour qui nous conduit à ce but est la plus forte de toutes les passions. S'il m'est pourtant permis de dire la vérité, que je cherche toujours et que je ne puis cacher quand je l'ai trouvée, j'assurerais qu'ordinairement c'est bien moins le désir des enfants qui fait accoupler les deux sexes, que le plaisir au bout duquel un enfant se trouve quelquefois, mais ce n'est pas toujours la fin qu'on s'était proposée.
(p. 78-79)

Il est à propos de vous entretenir de ce qui engage les filles à se perdre. Tout le monde sait que c'est l'amour, je n'ai pas à vous en parler d'une manière galante, mais comme un physicien qui doit vous dire par quelles nécessités l'amour naît dans le coeur de l'un et de l'autre sexe.
Il y a deux sortes d'amour, l'une est un violent désir de plaire à la personne qui nous plaît et de gagner son estime et sa tendresse, sans se proposer presque d'autre but que le bonheur d'être aimé. L'autre amour est une passion furieuse de s'accoupler, qui n'écoute guère la raison, et qui cherche à se satisfaire presque sans discernement. La première est la matière des romans, que je laisse par conséquent à expliquer à leurs auteurs, qui en savent toute la délicatesse. La seconde moins visionnaire et plus commune dans la nature sera le sujet du discours que je vais faire. [...] Les animaux ont eux-mêmes dans un certain âge de la semence qui doit absolument sortir et produire un animal de même nature, pourvu que les conditions s'y rencontrent. [...]
Quand l'esprit entre dans le corps de la semence, l'un et l'autre sexe ressent dans les parties naturelles un certain mouvement mêlé de plaisir et de douleur, qui fait naître l'envie de s'accoupler, comme la fin excite le désir de manger ; et de même qu'en mangeant on goûte un plaisir particulier, dont aucune partie n'est capable que la langue et le palais, aussi dans l'accouplement on trouve une volupté singulière qui ne peut se sentir que dans les parties de la génération. Il y a donc dans ces organes, outre celui du toucher, un sixième sens distingué de lui et de tous les autres, qui engage les animaux à se multiplier, comme le goût les oblige à se nourrir.
(p. 89-94)




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