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Chercher des raisons pour être misérable


"Pourquoi substiliser et faire le capable
A chercher des raisons pour être misérable
Sur des soupçons en l'air je m'irai alarmer !
Laissons venir la fête avant que la chômer.
Le chagrin me paraît une incommode chose ;
Je n'en prends point pour moi sans bonne et juste cause,
Et même à mes yeux cent sujets d'en avoir
S'offrent le plus souvent, que je ne veux pas voir."
Dépit amoureux, I, 1 (v. 61-68)

Cette attitude est conforme à celle que prône La Mothe le Vayer dans La Prose chagrine (1661) (1) et dans le "petit traité" "Des adversités" (Opuscules ou petits traités (1643) (2).

Voir aussi "de moi si mortel ennemi" et "ne donnez point tant à votre imagination".


(1)

Tant il se trouve vrai que l’homme est la mesure de toute chose qui deviennent telles qu’il se les représente ; et tant il est constant que nos biens et nos maux croissent ou multiplient selon notre constitution intérieure, et selon que nous voulons les considérer. En effet ils ne sont presque rien d’eux-mêmes […].
(p. 338)

si les chagrins de la vie sont des maladies chroniques et inévitables tout ensemble, pourquoi les augmenterons-nous par une recherche trop exacte, et pourquoi ne ferons-nous pas plutôt réflexion sur nous-mêmes, sans irriter personne inutilement, pour tirer quelque profit de notre chagrin, si nous pouvons nous corriger de tant d’erreurs et de tant de mauvaises habitudes que nous y remarquerons ?
(p. 340)

mais puisque ces mêmes malheurs ne se peuvent éviter, étant si fort attachés que nous le disons à la condition de notre vie, pourquoi les augmenterons-nous par notre impatience et par un chagrin déraisonnable, puisque Démocrite et assez d'autres les ont notablement diminués en se riant de notre faiblesse et en s'accommodant doucement à tout ce qu'ils ne pouvaient éviter ?
(p. 372)

--

(2)

Et en effet on ne souffrirait que ce qui est déterminé par le présent, si notre imagination ne nous faisait appréhender tout ce qui est contingent ou possible, d'où naissent des soucis sans nombre, et des douleurs d'esprit infinies.
(Oeuvres, éd. de 1756, II, 2, p. 397)




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