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Ces honnêtes diablesses


"Pensez-vous qu'à choisir de deux choses prescrites,
Je n'aimasse pas mieux être ce que vous dites,
Que de me voir mari de ces femmes de bien,
Dont la mauvaise humeur fait un procès sur rien,
Ces dragons de vertu, ces honnêtes diablesses,
Se retranchant toujours sur leurs sages prouesses,
Qui, pour un petit tort qu'elles ne nous font pas,
Prennent droit de traiter les gens de haut en bas,
Et veulent, sur le pied de nous être fidèles,
Que nous soyons tenus à tout endurer d'elles?"
L'Ecole des femmes, IV, 8 (v. 1292-1301)

Dans son "Epître chagrine au Maréchal d'Albret" parue en 1659, Paul Scarron avait dépeint le personnage de la prude sous un jour semblable :

Vous en serez, vous dont la chasteté,
Remplit l'esprit d'une sotte fierté,
Qui prétendez qu'aux pudiques Lucrèces,
Il est permis de faire les diablesses
Et que pourvu qu'on garde son honneur,
On peut n'avoir ni bonté ni douceur.
(éd. des Oeuvres de 1786, p. 173)

Le héros d'une des histoires enchâssées du roman Tarsis et Zélie (1665) de Le Vayer de Boutigny connaît le malheur d'épouser une de ces "honnêtes diablesses" :

Ce qu'il m'est permis de vous dire, c'est que toute sage, toute pieuse, toute attachée à son mari et à son ménage, toute vertueuse enfin que fût Esinie, elle sut consacrer toutes ces vertus pour m'en faire une persécution et un supplice : en forte qu'après six années de patience de ma part, elle a eu le secret de me rendre ma maison insupportable, et de me la faire abandonner.
(éd. de 1720, p. 324)




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