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Affaires fort délabrées


"L'aventure n'a pas été mauvaise pour vous, car sans moi vos affaires, avec votre permission, étaient fort délabrées, et mon argent a servi à reboucher d'assez bons trous."
Georges Dandin, I, 4

Le stéréotype selon lequel les hobereaux de campagne vivaient dans des conditions misérables avait été illustré dans la mascarade des Noces de village (1663) :

V. ENTRÉE
Le seigneur du village, pour ménager quelque repas et divertir aux dépens des mariés une compagnie de trois nobles et trois demoiselles qui l'étaient venus voir, les amènent à la noce sans prier.
(p. 3)

Charles Sorel, dans son traité De la prudence ou des bonnes règles de la vie (1673) présente cette situation comme une réalité :

De la noblesse incommodée
D'un autre côté, si on considère la petite noblesse qui est celle qui est contrainte de vivre aux champs du chétif revenu de ses terres, on verra qu'elle est presque toujours dans l'incommodité et la misère, sans qu'elle ait le pouvoir de s'en relever. [...] S'ils demeurent chez eux, attachés par un ménage comme ils font la plupart, ils y sont dans la compagnie de plusieurs personnes très basses et ils n'ont presque rien qui les distingue des paysans qu'une certaine fierté qui n'est pas toujours légitime. II ne faut qu'un procès contre un mauvais voisin avec quelques voyages à la cour ou aux grandes villes pour les accabler entièrement et leur faire manger en six mois le revenu de plusieurs années. Le principal sujet de leur misère vient de ce qu'ils ne croient point qu'autre application soit digne d'eux que celle des armes et qu'ils se persuadent fortement que ce serait une honte pour eux s'ils s'adonnaient aux professions qu'ils tiennent pour basses et ignobles. Parce que plusieurs d'entre eux ne vont pas même aux armées, il se trouve qu'ils demeurent toujours pauvres et oisifs, et qu'enfin la pauvreté excessive de leurs descendants les pourrait bien faire retourner dans la roture.
(p. 100)




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